La liste n'est pas exhaustive !
…des écrivains de renom : Aimé Césaire, Daniel Maximin et bien d'autres encore ?
Nous ne sommes pas seulement une terre de consommation mais aussi une terre de production, qui confère à la France sa dimension intercontinentale.
Le Président de la République, lors de son intervention du 19 février 2009 sur RFO, a dit, en parlant des Antilles : « cette crise nous oblige en même temps à ouvrir le grand chantier de la transformation sociale qui permettra de renouer le pacte républicain ».
Même si ce texte, je vous le concède, comporte quelques avancées, nous sommes loin de ce grand projet pour le développement et la promotion de l'excellence de l'outre-mer dont on nous parlait il y a quelque temps. Nous ne retrouvons pas ces bonnes intentions dans ce texte, qui manque cruellement d'ambition et d'audace. C'est tout au moins un texte qui n'est pas à la hauteur des enjeux de nos sociétés insulaires et ne répond certainement pas aux aspirations exprimées avec force par nos populations.
Rarement l'impérieuse nécessité d'une autre vision du développement se sera autant fait sentir pour sortir de cette « fin de cycle historique », cycle marqué par une profonde crise sociale. Rarement a-t-on eu autant besoin d'en recommencer un autre, vertueux cette fois, et porteur de progrès en termes de cohésion sociale, de responsabilités collectives, d'activités nouvelles génératrices d'emplois nouveaux.
Rarement un texte conçu, entre autres, pour améliorer la performance économique des entreprises des DOM aura autant montré ses limites face aux contraintes imposées par la loi de finances de 2009, avec, pour conséquence d'affaiblir, que dis-je, de neutraliser la politique d'exonération de charges et d'incitation à l'investissement.
S'agissant de la politique du logement, le retrait de la défiscalisation du logement libre au profit du logement social, au-delà de la nécessaire reconfiguration qu'il convenait d'apporter à ce dispositif pour qu'il n'organise pas l'éviction des ultramarins au profit de spéculateurs de tout acabit, est la preuve que votre volonté réelle est bien de diminuer la LBU, jugée trop coûteuse pour le budget de l'État. Or c'est précisément la LBU qui, au coeur de l'effet multiplicateur de l'investissement des collectivités, sociétés d'HLM et entreprises du BTP, articulait la double dimension sociale et économique du logement.
Quant aux zones franches globales d'activités, principale mesure de votre dispositif, qui doit, selon vous, élever le niveau d'attractivité des investissements pour quatre ou cinq secteurs prioritaires, elle a déjà montré ses limites. D'ailleurs, nous avons déjà tiré les enseignements d'expériences comparables, celle de la Corse par exemple. Il ressort que, si cet outil peut améliorer les conditions d'exploitation des entreprises, il ne peut apporter une plus forte structuration macroéconomique de secteurs productifs tels que l'agriculture, la pêche, le transport ou l'artisanat, et répondre en toute cohérence aux besoins du marché domestique.
Votre texte, monsieur le secrétaire d'État, fait l'impasse sur le renforcement des ressources des collectivités locales, et singulièrement de celles des communes. Les collectivités locales d'outre-mer participent pour plus de 80 % l'investissement public, contre 73 % pour la France métropolitaine, et ce en dépit de finances qui ne cessent de se dégrader. Nous savons tous que l'État compense plus mal encore que dans l'hexagone les transferts de compétences et de charges.
À la vérité, l'unique objectif de votre gouvernement est de remettre en cause les dispositifs de soutien à l'économie des départements d'outre-mer contenus dans la loi Girardin votée en 2003, à l'origine pour quinze ans, et qui ont fait la preuve de leur efficacité. Comment s'étonner des désaccords formulés tant par les élus locaux que par les organisations patronales, qui se sont longtemps plaintes de l'absence d'évaluation de la loi Girardin avant sa remise en cause, aggravée par le manque de concertation et l'imposition d'une démarche centralisatrice ?
Bien sûr, on nous renvoie sans cesse aux états généraux de l'outre-mer, comme si c'était la panacée, une sorte de remède universel. Le groupe socialiste du Sénat avait demandé le report de ce texte. La sagesse eût été de différer son examen et de l'enrichir des nombreuses remontées que ne manqueront pas de susciter les prochains états généraux. L'urgence n'exclut pas la sérénité et la réflexion, dès lors qu'elle permet de prendre en compte les problèmes de fond récurrents que l'on rencontre.
La sagesse eût été que ce dispositif économique se nourrisse des réflexions d'envergure déjà menées et validées dans nos régions par les élus et les forces vives, où l'on retrouve les socioprofessionnels, les syndicats, les associations et autres structures populaires.
Je regrette de finir mon propos en notant combien, à travers ce texte, il est difficile à l'État français de sortir de sa vision centralisatrice, difficile à l'État d'intégrer les démarches démocratiques et émancipatrices si nécessaires aux outre-mer.
En ce moment de post-crise, tout pousse à la créativité dans nos régions. C'est donc un énième rendez-vous que nous risquons de rater. Comme le disait il y soixante-trois ans le poète Aimé Césaire dans cet hémicycle, le 12 mars 1946 : « Entre désintégration et intégration, il y a de la place pour l'invention. Nous sommes condamnés à inventer ensemble ou à sombrer, et pas forcément pavillon haut ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)