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Intervention de général d'armée Jean-Louis Georgelin

Réunion du 10 septembre 2008 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

général d'armée Jean-Louis Georgelin :

Nous pouvons faire mieux. Cependant, je le répète, nous bénéficions de la mutualisation des moyens au sein de la coalition. Dans l'affaire du col d'Uzbeen, nous avons ainsi obtenu le soutien, suivant les normes de l'OTAN et de la FIAS, d'hélicoptères américains de la FIAS.

S'agissant de la coopération avec les Russes, elle consiste à tirer tous les enseignements de l'intervention russe en Afghanistan. C'est la tâche de la direction du renseignement militaire, non celle des forces déployées sur le terrain. Ce travail de renseignement se passe bien. Il existe encore en Afghanistan de nombreuses caches d'armes datant de l'époque soviétique ; la coalition en détruit presque tous les jours, remplies de mines, de munitions, de roquettes soviétiques. Et tous les jours, les insurgés tirent des roquettes contre les FOB. Il faut dire que, dans leur tactique, ces attaques tendent à s'ajouter aux IED, aux attentats suicides et aux embuscades. C'est pourquoi je m'emploie à mieux protéger les FOB.

Comme l'ont montré l'Afghan Compact de Londres et le conseil stratégique de l'OTAN au sommet de Bucarest, les contacts avec le Pakistan et l'Iran sont au coeur de la stratégie de la coalition. Une action déterminée du Pakistan sur les camps d'entraînement terroristes et les déploiements abondants de talibans sur son territoire serait l'un des meilleurs remèdes aux difficultés de l'Afghanistan. Mon homologue américain, le général McMullen, a d'ailleurs reçu la semaine dernière le chef d'état-major pakistanais sur le porte-avions américain Abraham-Lincoln, qui croisait au large des côtes pakistanaises, afin de lui demander d'accentuer son action. L'idée d'une concertation rapide et efficace, à un niveau restant à définir, afin de persuader le Pakistan de faire sa part du travail, fait son chemin. Elle me paraît essentielle.

En ce qui concerne la presse, ce n'est certainement pas moi, serviteur de la nation, qui appellerai à la bâillonner : ce serait une maladresse absolue. Cependant, il est choquant de constater qu'une journaliste peut avoir accès à des terroristes ayant tué des soldats de son pays. Cela provoque un certain malaise. La liberté de la presse est un trésor à préserver, mais comme le disait Clemenceau, la liberté est le droit de se discipliner soi-même pour ne pas être discipliné par les autres. La presse doit donc faire preuve d'une certaine mesure.

J'étais présent lorsque, à la FOB de Tora, les parachutistes ont appris par la télévision la publication des photos de Paris Match. J'ai été impressionné par le silence réprobateur avec lequel ils ont accueilli cette nouvelle.

La question du renseignement est particulièrement complexe. Bien sûr, à un certain moment, l'événement annoncé à de nombreuses reprises finit par se produire. Ainsi, lorsque j'étais à la FOB de Tora, une threat warning a été transmise : on annonçait qu'une attaque aurait lieu dans la nuit. Que faire dans un tel cas ? Partir, se réfugier dans des abris ? J'ai choisi d'aller me coucher. C'est le flair, la faculté de faire le tri dans les renseignements qui fait la différence, et c'est difficile. Bien sûr, on peut faire des erreurs, mal sentir les choses. Et au bout du compte, on vous dit toujours : « on vous l'avait bien dit ».

Le caractère instantané du traitement de l'information a complètement modifié le travail de l'état-major. Vous avez dû le voir sur place, on est informé en permanence de tous les événements concernant la coalition, ce qui permet, à chaque fois, le choix des moyens les plus adaptés. Ainsi, des A-10 tournent en permanence dans le ciel afghan. On a une meilleure idée du contexte de l'accrochage d'Uzbeen lorsque l'on sait que ce jour-là, cinquante opérations du même genre étaient en cours.

Vous m'avez interrogé sur les sections engagées en Uzbeen. La première section française a pris le col ; la seconde a été immédiatement fixée par des tirs nourris, ce qui montre que l'affaire était bien montée. Je vous ai expliqué comment les renforts de la FOB de Tora sont arrivés sur le terrain dans un délai d'une heure et ont permis, en engageant le combat, de faire relâcher la pression sur la section rouge. Les premiers appuis étaient rendus difficiles par le feu des talibans et l'imbrication des forces. À vingt heures, 300 soldats français étaient présents.

Dans le cadre de la formation de l'ANA, toute force de la coalition qui part en opération doit être accompagnée de troupes afghanes. Cela complète l'action des OMLT. Les deux sections françaises étaient donc accompagnées de deux autres sections composées d'une quinzaine d'hommes. L'une était une unité de la garde présidentielle chargée de surveiller un barrage situé en contrebas, et n'était pas habituée au combat. L'autre aurait dû se trouver en tête, la règle étant de placer les Afghans devant puisqu'il s'agit de défendre leur pays. Mais leur véhicule est tombé en panne et ils ont été retardés. Cette section a été prise sous le feu, comme la section rouge, et s'est comportée très honorablement.

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