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Intervention de général d'armée Jean-Louis Georgelin

Réunion du 10 septembre 2008 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

général d'armée Jean-Louis Georgelin :

Je résumerai toutes vos questions par une seule : nous, pays membres de la coalition, voulons-nous, ou non, nous donner les moyens de régler au fond la crise afghane ? Je crois qu'il n'y a pas d'autre solution – mais j'y reviendrai.

Avant de répondre à vos questions, je voudrais revenir rapidement sur l'embuscade du 18 août, afin que nous soyons au clair sur un certain nombre d'éléments bien établis et que le chef d'état-major des armées que je suis fasse deux ou trois commentaires fondamentaux. Pardon si, pour certains – notamment ceux qui vous ont accompagné sur le terrain, monsieur le président – cela a un air de redite, mais je veux que les choses soient claires.

L'embuscade du 18 août s'est déroulée dans le commandement régional Capitale – RC-C –, dans un district excentré situé à une soixantaine de kilomètres à l'est de Kaboul, le district de Surobi. Il s'agit d'une zone relativement isolée, située entre une heure trente et trois heures de route de Kaboul, ou vingt à trente minutes d'hélicoptère. Depuis 2006, le contrôle de cette zone est dévolu à la nation chargée du commandement de la région Capitale ; chacun l'assure à tour de rôle, ce qui est un aspect intéressant de la stratégie générale. La France y était déjà présente en 2006 ; le 6 août dernier, elle a repris la tête du commandement, succédant aux Italiens, qui eux-mêmes avaient succédé aux Turcs.

Depuis 2006, pour contrôler cette zone, le RC-C a retenu comme mode opératoire le déploiement d'une base opérationnelle avancée – ce qu'on appelle, dans le langage de l'OTAN, une FOB, Forward Operations Base ; il s'agit en l'occurrence de la FOB Tora, désormais connue de tous les Français ou presque. Une compagnie, soit 150 hommes, y est déployée. Soit dit en passant, la garnison soviétique qui tenait cet emplacement avait été, à l'époque, complètement détruite par les Afghans.

Tora est un poste isolé situé sur un point haut, qui permet de contrôler le débouché de cinq vallées vers la ville de Surobi. Il s'agit d'une zone clé dans la mesure où Surobi est un point de passage obligé de l'axe en provenance de Jalalabad, à l'est, pour rejoindre soit Kaboul, soit Bagram et, plus au nord, les républiques d'Asie centrale, à travers la fameuse vallée de Kapisa. Ce cadre général est important, il faut l'avoir présent à l'esprit.

Suivant les directives de la FIAS, le commandant du RC-C a confié au bataillon français la mission de reconnaître l'ensemble de la zone qui lui avait été attribuée – ce qui est normal. Les opérations ont débuté le 8 août. L'action de combat qui a retenu l'attention s'est déroulée le 18 août au cours d'une de ces reconnaissances, effectuée dans la vallée de d'Uzbeen, qui est une vallée de 25 kilomètres de long et qui, contrairement aux autres vallées, est particulièrement peuplée puisqu'elle compte une trentaine de milliers d'habitants. La mission visait à reconnaître les points importants du terrain et à prendre contact avec la population : dans une guerre contre-insurrectionnelle, la pénétration du tissu humain est en effet une clé du succès. Le dispositif était constitué de deux sections françaises, de deux sections de l'armée nationale afghane et d'un détachement des forces spéciales américaines – douze hommes dont un JTAC (Joint Terminal Attack Controller), c'est-à-dire une équipe permettant de guider, dans des conditions optimales, un appui aérien. C'est au moment où elle procédait à la reconnaissance d'un col contrôlant les débouchés est de la vallée que la section du 8e RPIMa est tombée dans une embuscade. L'embuscade est la hantise du soldat ; tout détachement d'infanterie envoyé sur le terrain la craint comme la peste : par définition, une embuscade, quand elle est bien montée, surprend.

À 13 heures 30, après avoir atteint le village de Sper Kunday, la section du 8e RPIMa entame la reconnaissance du col situé à 1 500 mètres de celui-ci. La route n'étant plus carrossable à partir de ce point, la reconnaissance s'effectue à pied. L'embuscade est déclenchée à 15 heures 45, alors que les hommes de tête de Carmin 2 abordent le dernier lacet conduisant au col ; c'est ce que j'appellerai à partir de maintenant l'heure « H ».

À « H » plus huit minutes, la deuxième section française Rouge 4, qui progressait derrière Carmin 2, se porte à hauteur du village pour appuyer celle-ci. Elle est immédiatement prise sous un feu nourri à partir des hauteurs nord du village.

À « H » plus vingt-cinq minutes, un sous-groupement renforcé par des éléments d'appui quitte la FOB Tora pour rejoindre la zone des combats. Il lui faut près d'une heure pour l'atteindre en sûreté. Dès son arrivée, une heure et vingt minutes après les premiers accrochages, elle est prise à partie aux abords du village. Elle réussit cependant à appliquer les premiers tirs d'appui au profit de Carmin 2 et de Rouge 4 : mortier, Milan et canon de 20 mm.

Au même moment, à « H » plus vingt-cinq minutes, le chef de section de Carmin 2 fait une demande d'appui aérien. À « H » plus trente-cinq minutes, soit dix minutes après – comme c'est la règle à la FIAS –, les avions A10 de l'armée américaine détachés à la FIAS sont sur zone. Compte tenu de l'imbrication des insurgés et des forces françaises, ils ne peuvent pas ouvrir le feu ; les insurgés ont parfaitement compris qu'en procédant ainsi, ils rendaient difficile le jeu des appuis.

À « H » plus deux heures et cinq minutes, Carmin 2 peut enfin entamer un repli, appuyée par des hélicoptères et des avions A10 américains, qui peuvent maintenant appliquer leur tir. Il est 17 heures 50 et l'appui durera près d'une heure. Lorsque la nuit tombe, à 19 heures 30, soit « H » plus trois heures et quarante-cinq minutes, Carmin 2 poursuit toujours son repli. Les insurgés tentent de la devancer sur le village de Sper Kunday pour fermer la nasse et l'encercler.

À 20 heures, soit « H » plus quatre heures et quinze minutes, les renforts provenant de Kaboul arrivent sur zone. Ils réussissent à reprendre l'initiative des combats. Ils bénéficient à « H » plus cinq heures et quinze minutes de l'appui d'un drone Predator américain de la coalition, qui permet de préciser le renseignement et de guider les tirs d'appui. Les premiers blessés sont évacués par hélicoptère.

À 22 heures, soit « H » plus six heures et quarante-cinq minutes, la reprise des abords est du village est lancée. Un C 130 « Gunship » américain de la coalition commence à appliquer des tirs dans la profondeur au-delà du col. En deux heures, toute la zone du village est sous contrôle. Il est minuit, soit « H » plus huit heures et quinze minutes. Les premiers corps de nos soldats sont relevés à 1 heure 40, soit dix heures après le début de l'embuscade.

Au lever du jour, l'ensemble du col est sous contrôle ; alors que des tirs de harcèlement sont toujours appliqués par les insurgés, l'appui aérien des forces américaines de la coalition est continu. La zone est entièrement contrôlée à 12 heures, soit vingt heures après le début des combats.

À l'issue du recueil de l'ensemble des éléments, la mission drone du RC-Est, en appui de la coalition, se poursuit ; elle va durer jusqu'au 20 août dans la matinée, soit près de quarante-huit heures après le début de l'embuscade, afin de localiser les éléments rebelles réfugiés dans la province voisine de Laghman. Ces éléments sont attaqués grâce à l'action combinée des forces spéciales américaines et des appuis aériens, avions et hélicoptères, guidés par les forces au sol, ce qui permet de détruire deux énormes caches destinées à la logistique des insurgés.

Voilà, présentée de manière très sommaire, la chronologie des faits telle que je l'ai établie. J'ai passé sur beaucoup de détails ; nous y reviendrons si vous le souhaitez.

Cet accrochage nous ramène à la réalité des actions de guerre : quand des troupes ouvrent le feu, elles conduisent des actions de guerre. La nation dans son ensemble vient de prendre conscience qu'envoyer des militaires en opération comporte toujours des risques ; si ce n'était pas le cas, le recours à la force serait inutile, d'autres instruments permettraient d'atteindre les objectifs fixés. Il faut avoir les idées justes et reconnaître que l'action de guerre, dans son essence, reste une réalité. Elle demeure l'affrontement de volontés où chacun, par l'usage de la force, tente de dicter sa loi à l'adversaire. Elle n'a pas changé de nature, elle s'est simplement transformée.

Comme j'ai eu l'occasion de le dire lors de mes précédentes auditions devant la commission de la défense de l'Assemblée, nous sommes aujourd'hui confrontés à des opérations plus dures, à des adversaires plus déterminés, qui se sont adaptés à nos méthodes de combat et qui entendent bien nous porter les coups les plus sévères. La réalité des conflits asymétriques, c'est que l'on bascule désormais instantanément de la basse intensité à la haute intensité et à l'extrême violence. Nous sommes engagés dans des opérations longues et complexes, où la persévérance est le premier facteur de réussite. Or – et les talibans l'ont bien compris – cette persévérance est impossible sans le soutien de la nation dans son ensemble et, en particulier, celui de la représentation nationale. De ce fait, nous sommes engagés dans une véritable bataille de la communication, dont il nous faut tirer tous les enseignements.

Je crois que tous les commentaires entendus au lendemain de l'accrochage prennent racine dans le refus d'accepter la vraie nature des opérations de guerre ; cela est particulièrement le cas de nos mentalités occidentales, encore marquées par les abominations de deux siècles de guerre totale.

La vocation du soldat n'est pas de mourir. En revanche, sa grandeur est d'accepter de tuer et de se faire tuer, de donner librement sa vie pour que d'autres puissent vivre. La mort d'un soldat au combat, aussi regrettable soit-elle, reste inhérente à l'action de guerre, qui ne pourra jamais être réduite à un modèle mathématique.

En conclusion de cette brève introduction, je veux saluer le courage et la bravoure dont ont fait preuve nos soldats. Partis pour une simple reconnaissance, ils ont trouvé la mort, avec noblesse et héroïsme. Je rappelle le bilan des coups portés à l'adversaire, que nous connaissons grâce aux témoignages de nos soldats, aux renseignements fournis par les capteurs américains et aux écoutes des réseaux de communication adverses : entre trente et quarante rebelles ont été mis hors de combat dans la journée du 18 août et autant le lendemain, lors des interventions du RC-Est. Je veux aussi rendre hommage à la dignité des familles de nos morts, ainsi qu'au courage de leurs frères d'armes qui, restés sur place, ont été profondément blessés – vous le rappeliez, monsieur le président – par les commentaires sur leur jeunesse, leur préparation insuffisante ou leur équipement défectueux. Enfin, je note que, depuis l'embuscade d'Uzbeen, le 18 août dernier, vingt-deux autres soldats de la coalition ont trouvé la mort, rejoignant ainsi la liste des 879 qui ont donné leur vie depuis le début des opérations en 2001.

Les questions que vous m'avez posées touchent à la nature même des opérations conduites en Afghanistan et aux conditions dans lesquelles elles sont menées.

Pour aborder la question des effectifs, il convient d'avoir à l'esprit l'enchaînement des événements qui ont conduit à la situation présente, le point de départ étant les attentats du 11 septembre 2001. Une coalition, menée par l'armée américaine et à laquelle nous avons participé, s'est alors mise en place et a lancé les premières opérations destinées à détruire les camps d'entraînement des terroristes et à renverser le régime taliban. Ensuite, la conférence de Bonn a représenté une étape essentielle, en fixant le cadre des actions menées – non seulement sur le plan militaire, mais aussi sur tous les autres aspects – en en attribuant des responsabilités à chaque pays de la coalition. L'Afghanistan a été doté d'un gouvernement provisoire de façon à ce que l'État retrouve un fonctionnement normal. Par la suite, une assemblée nationale a pu être élue, un gouvernement et un président ont été désignés et une constitution a été adoptée. Ni la police, ni l'armée locale n'étant en mesure d'assurer la sécurité du pays, il a également été décidé, lors de cette conférence, de confier, à titre provisoire, ce rôle à une force internationale d'assistance et de sécurité jusqu'à ce que les forces afghanes puissent prendre le relais. Dès le départ « l'afghanisation » était le but poursuivi par la communauté internationale.

Depuis lors, des conférences ont eu lieu chaque année. À Londres, en 2006, un document capital, l'Afghan compact, a été élaboré. Il fixe des objectifs quantifiés dans des domaines tels que la gouvernance, le développement économique, les droits de l'homme ou la sécurité. Il confirme la volonté de transférer aux Afghans eux-mêmes la charge d'assurer la sécurité du pays. Ce document a été repris lors du sommet de Bucarest dans un autre document, qui détaille la stratégie adoptée par l'OTAN. Contrairement à ce que j'entends souvent dire, en effet, il y a une stratégie en Afghanistan, et celle-ci découle des trois documents que je viens de citer, complétés par la résolution des Nations unies. La stratégie politico-militaire reprise à Bucarest repose sur sept objectifs: assurer un environnement sécurisé ; assister le gouvernement dans le développement de l'ANA, l'armée nationale afghane ; permettre, grâce aux équipes provinciales de reconstruction, l'expression de l'autorité du gouvernement et de l'État de droit ; soutenir la stabilité régionale – le Pakistan, mais aussi l'Iran sont nommément cités ; améliorer la communication stratégique et prendre l'ascendant sur celle des talibans, en particulier en ce qui concerne les dommages collatéraux, réels ou supposés ; soutenir le gouvernement dans le domaine de la lutte contre la drogue ; et, enfin, améliorer la coordination internationale en favorisant l'expansion de la mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).

La dernière conférence de suivi de l'action de la communauté internationale s'est tenue à Paris. Elle n'était pas seulement une conférence de donateurs, mais a conduit à réaffirmer les objectifs affichés, notamment par le Président de la République, à Bucarest : s'engager durablement au côté des Afghans, renforcer la mission des Nations Unies et mettre le gouvernement afghan devant ses responsabilités. C'est dans ce cadre général que doit se comprendre l'action des forces de l'OTAN.

L'action militaire est confiée à l'Alliance atlantique. Dans ce domaine, on ne peut que constater la suprématie des Américains, lesquels représentent 38,8 % des forces déployées. Dans ces conditions, il faudrait être hypocrite pour s'étonner de les voir maîtriser le tempo des opérations. Par ailleurs, une autre caractéristique importante des forces déployées en Afghanistan est qu'elles sont « caveatisées ». Cela signifie que le général américain McKiernan, qui commande les 50 000 hommes de la FIAS – mais aussi les forces américaines et de celles de l'opération Enduring freedom –, ne dispose pas librement des troupes mises à sa disposition, car les nations imposent des restrictions sur l'usage de leurs forces. Par exemple, l'Allemagne, qui a des troupes dans le nord de l'Afghanistan, interdit qu'elles soient employées ailleurs, et limite à certains cas déterminés l'usage de ses avions Tornado. Il en est de même pour l'Italie, stationnée dans l'ouest du pays, etc. Au total, il existe une liste impressionnante de 83 caveat. Ainsi, avant de s'interroger sur le volume des effectifs, il faut s'interroger sur le fonctionnement d'une coalition, car toutes ces contraintes compliquent la tâche des commandants sur le théâtre des opérations.

De même, avant de poser la question des effectifs, il convient de savoir quelle est l'action menée sur le terrain. J'entends parfois poser la question : « quand y aura-t-il victoire – ou défaite ? » Mais nous ne sommes pas dans un schéma de type clausewitzien : il ne s'agit ni de détruire un ennemi identifié, ni de conquérir des territoires. Il s'agit d'une entreprise combinée, civilo-militaire, qui comprend des actions de développement dans toutes les branches d'activité. Des progrès ont ainsi été accomplis dans les domaines de l'éducation, des communications, de l'eau, etc. Dans ce domaine du développement, l'Allemagne, par exemple, met plus d'argent qu'un pays comme le nôtre. De même, les PRT, c'est-à-dire les équipes provinciales de reconstruction – dont nous ne faisons pas partie – sont des éléments clés de la tactique sur le terrain. Les troupes militaires sont là pour assurer une présence, rassurer la population et faire en sorte que celle-ci abandonne les talibans et bascule du côté du gouvernement afghan.

Bien entendu, compte tenu de l'étendue du pays, si nous reprenions, par exemple, les ratios employés en Algérie, il faudrait un ou deux millions de soldats. Ce n'est évidemment pas ce que je réclame. Tout dépend de notre détermination et de l'objectif que nous souhaitons atteindre. Avons-nous vocation à mener une opération d'une telle ampleur ? Ce n'est pas à moi de répondre à cette question.

Nous menons des opérations de contre-insurrection : il s'agit de déstabiliser un adversaire qui se structure progressivement et devient de plus en plus efficace. Dans un tel contexte, le renseignement constitue une des clés du succès. Celui-ci n'est pas seulement affaire de satellites et de capteurs – même s'ils ont leur rôle à jouer – mais consiste en un ensemble de perceptions permettant d'évaluer l'état de la menace représentée par les talibans. Tous les livres consacrés à la guerre insurrectionnelle insistent en particulier sur la nécessité d'établir un organigramme de la rébellion, car en neutralisant leurs chefs, on rend plus difficile l'action des rebelles. On a beaucoup entendu parler, ces derniers temps, de « soldats de la paix », de « french touch », mais la réalité opérationnelle à laquelle nous sommes confrontés est aujourd'hui beaucoup plus difficile.

Les Américains ont fait d'un écrivain français totalement inconnu en France, David Galula, l'inspirateur de toute leur action. Il est intéressant de relire, en ayant à l'esprit la situation en Afghanistan, les réflexions de cet auteur sur les conditions de succès d'une insurrection. Ces conditions sont l'existence d'une cause à défendre – c'est le cas pour les talibans ; d'une faiblesse dans la contre-insurrection – contraintes propres à la constitution d'une coalition internationale, moyens chichement distribués, caveat de toutes sortes; d'une géographie favorable – l'Afghanistan est un pays très montagneux et connaissant des conditions climatiques extrêmes, avec des températures de 40 degrés en été et de moins 15 en hiver ; d'un soutien extérieur, qu'il soit moral, politique, technique, financier ou militaire – c'est le cas pour les talibans, qui reçoivent des financements en provenance du Pakistan ou d'autres pays du golfe arabo-persique. Par ailleurs, selon Galula, une stratégie victorieuse contre l'insurrection passe par huit étapes : détruire ou expulser la majorité des insurgés ; déployer des unités statiques au contact de la population ; renforcer le contrôle de celle-ci ; détruire les structures politiques de l'insurrection ; organiser des élections locales ; tester la fiabilité des leaders élus ; organiser un parti de gouvernement ; enfin, nettoyer les dernières poches de résistance. Je ne rappelle pas tout cela pour indiquer ce qu'il faut faire ; je résume simplement ce que sont, d'après les gens qui ont réfléchi à ces questions, les conditions optimales pour parvenir à des résultats significatifs dans une guerre de type contre-insurectionnelle, dont l'issue dépend en grande partie de la détermination dont on fait preuve.

Évidemment, il faudrait davantage d'effectifs. Mais les pays européens y sont-ils prêts ? Est-ce souhaitable sur le plan politique ? Ce n'est pas à moi de répondre. Mais je note que d'après le général Schloesser, qui commande la RC-Est, depuis l'arrivée, dans la région de Kapisa, d'un bataillon français de 700 hommes – ce qui représente un effectif taillé au plus juste –, six chefs talibans régionaux ont été tués, et les villageois sont plus nombreux à offrir spontanément des renseignements à l'armée nationale afghane et aux embedded training teams. Cela traduit une plus grande confiance de la population et une plus grande emprise du gouvernement afghan sur la région. De même, dans les vallées qui, comme celles d'Uzbeen ou de Tizin, sont gouvernées par Surobi, même si un seul bataillon représente un effectif faible, la combinaison de différentes actions permet de parvenir à des résultats. Si elle veut être plus efficace, la communauté internationale doit donc rendre plus souples les capacités du commandement de la FIAS sur l'ensemble des forces qui sont mises à sa disposition, poursuivre opiniâtrement les objectifs, tant civils que militaires, qu'elle s'est fixés, développer le renseignement et persévérer dans le processus d'afghanisation. La formation de l'armée et de la police du pays doit se poursuivre, en dépit des critiques et malgré les incidents qui ne manqueront pas de survenir. Nous avons déjà transféré, depuis le 28 août, un certain nombre de districts de Kaboul aux Afghans, et la ville ne s'est pas effondrée pour autant. Notre calendrier devrait d'ailleurs nous conduire à transférer, d'ici à l'été, l'ensemble de la région Centre aux autorités afghanes, à l'exception du district de Surobi, qui pourrait être rattaché à la région Est.

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