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Intervention de Jean-Luc Warsmann

Réunion du 9 juin 2009 à 15h00
Loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014 — Article 12

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Warsmann, président de la commission des lois :

L'ensemble du dispositif ayant pour premier objectif de protéger tous les documents couverts par le secret de la défense nationale, nous avons pris certaines dispositions techniques que je résumerai brièvement.

Lorsqu'un magistrat voudra effectuer une perquisition dans un lieu identifié et déclaré comme susceptible d'abriter des documents marqués « secret défense », il devra s'assurer, avant de commencer la perquisition, de la présence d'un représentant de la commission consultative du secret de la défense nationale qui aura, seul, le droit de lire tout document classifié que le juge pourra découvrir au cours de la perquisition. Le représentant de la commission demandera alors au magistrat si l'élément classifié est relatif aux infractions sur lesquelles portent les investigations. Si tel n'est pas le cas, le document sera remis à sa place ; si le document a un rapport avec l'enquête, le document pourra être saisi et le magistrat demander à ce que la procédure de déclassification soit engagée. La commission émettra un avis et le ministre prendra la décision finale.

Lorsqu'un magistrat ou un policier tombera sur un élément classifié dans un lieu non susceptible d'en abriter un, le document, sans que le magistrat ait eu le droit de le lire, sera placé sous scellé et transmis à la commission, avant que, le cas échéant, la procédure de déclassification ne soit engagée.

Quatre points, hier, posaient encore problème. Sans constituer autant d'Anapurna à escalader, ils exigeaient toutefois que nous avancions dans la voie de leur résolution. Je crois pouvoir affirmer que les amendements qui vous seront présentés répondent précisément à ces quatre difficultés.

Il s'agit premièrement de conserver à la perquisition l'effet de surprise. C'est pourquoi, lorsqu'un magistrat s'apprêtera à effectuer une perquisition, il ne devra fournir au représentant de la commission consultative que les informations nécessaires au rendez-vous. En revanche, le lieu exact de la perquisition et les détails relatifs aux infractions sur lesquelles portent les investigations ne seront donnés qu'au commencement de la perquisition. L'amendement que nous avons déposé en ce sens permet de trouver un bon équilibre en la matière.

Il convient deuxièmement d'éviter les détournements, l'objectif du Gouvernement étant de protéger uniquement ce qui est couvert par le secret défense. Le risque évident, en raison de la publication d'une liste de lieux classifiés au titre du secret de la défense nationale – cela pourra être un coffre-fort placé dans le bureau d'un directeur de cabinet d'un préfet, voire d'un responsable d'une entreprise privée dont les activités sont en relation avec le secret de la défense nationale –, c'est que la loi soit utilisée pour détourner les procédures de droit commun. Si un juge, par exemple, recherche, au cours d'une perquisition, les contrats de nettoyage du sol d'une entreprise, ceux-ci ne doivent pas pouvoir être rangés dans un coffre classifié secret défense !

Un accord a été trouvé, instaurant une incrimination pénale avec, à la clef, trois ans de prison pour toute personne qui utiliserait les lieux classifiés en vue de rendre plus difficile la communication à un magistrat de documents n'ayant aucun rapport avec le secret de la défense nationale.

Troisièmement, des perquisitions doivent pouvoir avoir lieu simultanément dans des lieux abritant des éléments classifiés. Or la commission n'est composée que de cinq membres : trois représentent le Conseil d'État, la Cour des comptes et la Cour de cassation – ils sont traditionnellement choisis pour leur sagesse, leurs connaissances et leur pondération – et deux, le Parlement. À mes yeux, ce n'est pas la mission des parlementaires que d'accompagner un magistrat au cours d'une perquisition. Afin de faire face à toutes les situations possibles, il est proposé de permettre au président de la commission de désigner des délégués habilités au secret défense, qui soient en nombre suffisant et couvrent l'ensemble du territoire national ; j'ai déjà donné l'exemple d'une perquisition possible à Papeete, mais toute autre partie du territoire national peut être concernée.

Le quatrième et dernier point a trait à la question de l'automaticité : si une perquisition doit avoir lieu un lundi matin à six heures, le président de la commission ne doit pas pouvoir s'y opposer pour une question d'organisation. L'amendement qui vous sera présenté sur le sujet prévoit que le président ou son représentant, qui peut être un délégué habilité, « se transporte sans délai » sur le lieu de la perquisition, ce qui est très clair puisque l'objectif n'est pas d'entraver une procédure ouverte par un magistrat mais de garantir son automaticité.

En ce qui concerne la classification de lieux entiers, chacun a déjà pu s'exprimer hier et les choix sont faits. Ils offrent, à mes yeux, le maximum de garanties, grâce à deux avancées notables.

La première, qui avait été suggérée hier par M. le ministre, fait aujourd'hui l'objet d'un amendement : il s'agit du caractère public de la liste, disposition qui permettrait, s'il y avait lieu, de susciter un débat républicain.

La seconde est une novation puisque la classification ne sera valable que pour cinq ans, délai après lequel il faudra rouvrir la procédure pour prolonger la classification d'un lieu ; la commission devra rendre un nouvel avis et la décision sera de nouveau rendue publique.

Je tiens, après le président de la commission de la défense, à souligner, moi aussi, le fait que le travail de ces dernières heures a permis de réaliser des avancées importantes sur tous ces sujets. En matière de procédure de droit commun, nous avons rempli les conditions qui avaient été soulevées et donné les garanties exigées. En matière de classification, nos amendements permettront de faire figurer dans le texte des garanties supplémentaires.

Je tiens à remercier les différents acteurs de ces avancées, notamment M. le Premier ministre et M. le ministre de la défense : grâce aux efforts de chacun, nous sommes parvenus à concilier le mieux possible la nécessaire protection du secret de la défense nationale avec l'efficacité des procédures pénales et leur équilibre, indispensables dans la lutte contre la délinquance et la recherche des auteurs d'infractions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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