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Intervention de général Roland Gilles

Réunion du 6 mai 2009 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

général Roland Gilles :

Loin de là : elles sont parfaitement libres.

Vous me demandez ce qui, outre l'héritage de l'histoire, justifie le maintien d'une organisation duale des forces de sécurité. Les deux forces ont été bâties avec des modes d'organisation et de fonctionnement totalement différents. Elles sont à fronts renversés : alors que la police nationale a vocation à travailler dans les coeurs urbains, sur des espaces géographiques réduits mais regroupant de fortes concentrations de population, la gendarmerie prend en charge les grands espaces ainsi que les flux. Elle est confrontée à des situations très diverses, puisqu'elle peut intervenir dans des zones à très faible densité de population comme dans des zones périurbaines.

Confrontées à des situations différentes, les deux forces ont apporté des réponses différentes. La police nationale fonctionne comme une police secours : elle est réactive et capable à tout moment d'amener des moyens policiers pour répondre à un événement. La gendarmerie, quant à elle, s'est sédentarisée depuis 1720. Nous tenons à l'obligation, pour le gendarme, de résider en caserne, qui garantit cet ancrage au sein de la population auquel nous sommes tous tant attachés. La gendarmerie doit savoir gérer la sécurité des flux de population, sur ce que l'on appelait autrefois les « grands chemins ». Elle doit être d'abord présente sur tout le territoire – d'où le maillage opéré par les 3 600 brigades – de façon à anticiper les événements et à les gérer au mieux lorsqu'ils surviennent.

La différence entre les organisations résulte de cette divergence d'approche. La police nationale fonctionne par roulement, avec des équipes qui se relaient en permanence. Dans les faits, lorsqu'ils ont fini leur service, les policiers sont rarement rappelés. Les gendarmes travaillent de façon préventive : leurs brigades effectuent des missions de « surveillance générale », pour observer ce qui se passe sur le territoire, aller à la rencontre de la population. Toutes ces raisons me semblent justifier le maintien des deux forces.

Ensuite, il existe une raison pratique. Avons-nous les moyens de financer une force de sécurité organisée selon un modèle unique, celui de la force civile ? Je ne pense pas qu'il serait possible de couvrir tout le territoire dans ces conditions.

Vous vous interrogez sur les différences de statut entre gendarmes et policiers et entre gendarmes et militaires. La gendarmerie doit-elle se démarquer des règles de gestion de la communauté militaire ? Il existe dans le projet de loi une disposition à laquelle nous tenons, prévoyant une grille indiciaire spécifique pour la gendarmerie. Comme le Président de la République l'a indiqué dans son discours du 29 novembre 2007, l'équilibre des conditions entre policiers et gendarmes passe en effet par cette possibilité donnée à la gendarmerie de s'affranchir, si nécessaire, des grilles indiciaires applicables aux autres militaires. Dès lors que chaque corps, au sein des armées, bénéficie d'un statut particulier, il doit être possible de doter les gendarmes d'un statut qui ne serait pas trop éloigné de celui des policiers. Cependant, la parité ne saurait être stricte, en raison de notre appartenance à la communauté militaire. Et notre objectif n'est pas d'obtenir la parité dans tous les domaines. Il faut un équilibre global, sans que le détail des conditions d'emploi soit aligné mécaniquement.

Les deux forces, police et gendarmerie, ont pleine compétence nationale sur l'ensemble du spectre missionnel – et, en ce qui concerne la police judiciaire, sur l'ensemble du spectre infractionnel. Elles doivent la conserver. En matière de police judiciaire, le principe du libre choix par le magistrat du service enquêteur conduit naturellement à ce que le recours à ces forces soit géré de façon équilibrée. La mise sous tutelle du ministre de l'intérieur ne change rien aux relations entre la gendarmerie et le pouvoir judiciaire. C'est ce que l'on observe depuis 2002.

En ce qui concerne la participation aux OPEX, il est vrai qu'elle a un coût élevé, d'autant qu'elle requiert des équipements particuliers. Ainsi, nous aurons besoin de blindés en Afghanistan. En Géorgie, déjà, nous sommes parvenus à en louer grâce à la coopération de l'armée de terre et d'un constructeur privé – il s'agissait de petits véhicules protégés Panhard. Mais cela coûte cher, et il est certain qu'il n'est pas dans la culture du ministère de l'intérieur d'avoir recours à de tels engins. Il vous appartiendra, le moment venu, de veiller à ce que la gendarmerie puisse renouveler ce type de gros équipements.

Vous avez évoqué les hélicoptères : pour moi, il était naturel de les mettre à disposition de la police nationale, d'autant que nos équipages ont acquis à cette occasion une expérience utile sur les interventions en zone urbaine. En outre, alors que les contrats de maintien en condition opérationnelle souscrits pour nos hélicoptères nous allouent jusqu'à 24 000 heures de vol par an, nous n'en utilisions que 17 500. Nous avions donc la possibilité de satisfaire les besoins particuliers de la police nationale sans affecter notre potentiel.

Lorsqu'une crise atteint un certain niveau de gravité, les forces de police ne peuvent plus intervenir et le recours à l'armée peut se révéler inopportun. Dans de tels cas, la gendarmerie a tout son rôle à jouer, à condition de pouvoir faire usage de certains gros équipements, dont les engins blindés. C'est pourquoi il est important d'être en mesure de les renouveler le moment venu.

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