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Intervention de général Roland Gilles

Réunion du 6 mai 2009 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

général Roland Gilles :

Comme toute la hiérarchie de la gendarmerie, j'adhère totalement à l'idée que l'état militaire ne résulte pas seulement d'un statut. L'adhésion aux valeurs de discipline et de disponibilité est certes indispensable, mais il faut également tenir compte de l'époque à laquelle nous vivons. Nous avons donc tenté, ces dernières années – avec succès, me semble-t-il –, de concilier l'état d'esprit des jeunes engagés avec les principes fondamentaux sur lesquels se fonde notre institution.

Vous avez raison de souligner à quel point les contraintes imposées aux gendarmes ont pu être lourdes. En effet, alors que la société civile réglemente la durée du travail, dans la gendarmerie, les seuls textes existants ne concernent que le repos, fixé à deux jours hebdomadaires. C'est pour cette raison que jusqu'en 1989, un gendarme départemental était assujetti à son travail cinq fois vingt-quatre heures par semaine. En dehors de ses huit heures quotidiennes, il était d'astreinte et devait rester chez lui, près de son téléphone. La création en 1989 des centres opérationnels départementaux, chargés de prendre en compte les alertes et de redistribuer les interventions, a permis de diviser par deux le poids de cette astreinte. C'était nécessaire, compte tenu de l'évolution des mentalités et de l'état d'esprit des nouvelles générations. La création des communautés de brigades s'inscrit d'ailleurs également dans ce mouvement.

Pour autant, nous ne changeons rien au principe selon lequel un gendarme doit être disponible, ce que confirme d'ailleurs le texte sur le service intérieur de la gendarmerie départementale, en cours de rédaction. La disponibilité est cependant distinguée selon le degré de réactivité : immédiate lorsque le gendarme est à son poste ; différée s'il est en repos. Toutefois, le système des astreintes demeure, faute de quoi il ne serait pas possible d'assurer la même présence sur le territoire ni de maintenir le contact avec la population. Un gendarme en permission pourra être rappelé par décision du commandement central ; il n'y a guère qu'en cas d'hospitalisation que ce rappel sera impossible. De même, il va sans dire que les exigences en matière de discipline seront maintenues.

En ce qui concerne la réquisition, je ne vois dans le texte du projet de loi aucune démarche attentatoire aux grands principes républicains. En effet, la loi de 1791, qui rend cette réquisition nécessaire pour la mise en mouvement de la force armée, ne visait pas la gendarmerie. C'est en 1926, lorsque l'on a créé les pelotons mobiles de gendarmerie spécialisés dans le maintien de l'ordre, que la procédure de réquisition actuellement en vigueur a été instituée.

Si le ministre de l'intérieur, par l'intermédiaire du préfet, doit procéder par voie de réquisition pour mobiliser la gendarmerie, c'est parce que celle-ci est une force armée relevant du ministère de la défense. À partir du moment où la gendarmerie est rattachée au ministre de l'intérieur, faudra-t-il que le ministre s'adresse à lui-même une réquisition pour l'emploi des troupes dont il a la tutelle ?

Dans la pratique, les escadrons de gendarmerie mobile interviennent dans des opérations de maintien de l'ordre de façon pratiquement identique à celle des compagnies républicaines de sécurité. Cependant, pour ces dernières, la procédure mise en oeuvre est simplifiée, alors qu'elle est beaucoup plus formelle dans le cas de la gendarmerie. En effet, à une réquisition générale nécessaire pour mettre en oeuvre l'unité, il faut ajouter une réquisition particulière destinée à préciser la mission sur le terrain – empêcher une manifestation de franchir un carrefour, par exemple. Le document, signé par l'autorité civile « au nom du peuple français », se caractérise par un formalisme suranné. Et si la situation se dégrade, le commandant de l'unité de gendarmerie doit se voir adresser un nouveau document, la réquisition complémentaire, pour pouvoir employer la force.

Un tel formalisme apparaît aujourd'hui inadapté pour des opérations quotidiennes : c'est pourquoi le Gouvernement souhaite l'alléger, sans pour autant porter atteinte aux principes républicains. En revanche, lorsque des moyens spéciaux sont engagés pour des opérations lourdes, il est indispensable de garantir la traçabilité de l'ordre donné, de l'objectif assigné, de la technique requise, et que le commandant de l'unité puisse rendre compte de son action. Le projet de loi prévoit justement qu'un décret pris en Conseil d'État fixe les conditions de cette traçabilité.

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