Passé le temps des élections, l'heure est à l'action. Très vite va se poser la question de la présidence de la Commission européenne. À cet égard, et je m'adresse surtout à la gauche, l'enjeu n'est pas la désignation ou non de M. Barroso, c'est de savoir quel projet la Commission va porter avec le Parlement européen, avec les chefs d'État et de gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.) Les Français attendent précisément, en effet, que nous soyons au rendez-vous des engagements que nous avons pris de faire bouger les choses et de les changer.
Nous avons bien sûr de grands défis devant nous. La crise mondiale ne peut se satisfaire de réponses exclusivement nationales, chacun le sait. Nous avons devant nous le défi de nos futures politiques communes. La réforme de la PAC inquiète nos agriculteurs – les manifestations dans le secteur laitier en témoignent. Nous avons besoin de refixer des objectifs pour cette politique.
Le défi de la recherche, du développement solidaire, le défi écologique, le défi de notre défense commune dans un monde qui est bousculé, le défi de la protection de notre économie, sur tous ces sujets nous devrons être volontaires et engagés. Alors oui nous attendons beaucoup de ce premier conseil européen d'après élections. Nous en attendons d'abord un signal. Il doit être l'occasion pour l'Europe d'aller plus loin dans la réglementation et la surveillance du secteur financier, d'aller plus loin dans les réponses apportées aux racines du mal auquel nous sommes confrontés, d'aller plus loin dans la régulation face au laisser-faire, dans la formation de nos jeunes pour faire face à cet avenir que nous avons à construire.
Dans le prolongement de cette dynamique qui avait permis à l'Europe de se présenter unie au sommet du G20, il faut engager une réforme en profondeur de la supervision du secteur bancaire et financier.
Le défi qui est posé au conseil européen sera, sur la base des propositions formulées par le groupe d'experts mandatés par la Commission, de répondre aux questions que se posent les Français. Comment empêcher à l'avenir de nouvelles déflagrations financières telles que celles auxquelles nous avons assisté à l'automne dernier ? Comment prévenir désormais la reconstitution artificielle de bulles spéculatives vouées à l'éclatement, avec leurs conséquences sur l'emploi et sur les économies réelles ?
Pour répondre aux attentes des citoyens, l'Europe doit jouer un rôle plus déterminant dans le soutien à l'économie réelle ainsi qu'à l'emploi. Elle dispose d'outils, tel le fonds d'ajustement à la mondialisation qui doit être désormais plus amplement mobilisé. Sans doute faudra-t-il en inventer d'autres pour encourager la relance. Au groupe Nouveau Centre, nous avions fait la proposition d'un grand emprunt européen pour participer à cet effort de relance.
Je l'ai déjà indiqué, à plus long terme, c'est par des politiques volontaristes telles qu'un soutien accru à la recherche et à l'innovation que nous construirons l'Europe de l'emploi, l'Europe qui sortira de la crise.
À ce titre, la stratégie de Lisbonne, qui ambitionne de bâtir en Europe la première économie mondiale de la connaissance, contient la plupart des éléments permettant à nos économies d'être au rendez-vous de la reprise économique. Je le dis aujourd'hui : la nouvelle Europe à laquelle nous aspirons doit être au rendez-vous de cette espérance nouvelle et de la reprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
Les questions énergétiques et environnementales sont également un défi auquel les Européens ont réaffirmé avec force leur attachement. Ce sera un des sujets du prochain conseil européen. C'est un enjeu planétaire, mais c'est aussi pour nous tous un engagement. L'adoption, en décembre dernier sous présidence française, du paquet Énergie-Climat est un engagement fort, notamment la réduction d'ici à 2020 de 20 % des émissions de gaz à effet de serre.
L'Europe et la France ont ainsi fait le choix de l'exemplarité. La conférence de Copenhague permettra de s'accorder, je l'espère, sur les modalités de l'après Kyoto. L'Europe devra y jouer un rôle essentiel.
Le défi climatique constitue une question majeure de notre siècle, et l'Europe a une responsabilité particulière dans la tenue de ces négociations. L'Europe ne peut pas et ne doit pas céder aux visions de court terme. Elle ne peut pas renoncer à adopter un nouvel accord ambitieux.
La France a montré l'exemple avec la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement qui reviendra très prochainement devant le Parlement. Le Grenelle c'est une méthode, mais c'est aussi une ambition que nous devons partager avec d'autres. Ce sera un des enjeux de ce conseil européen, et notamment en ce qui concerne le financement des mesures qui seront adoptées.
Au groupe Nouveau Centre, nous avons eu l'occasion de le dire lors d'un débat sur l'énergie que nous avions initié : le succès de la conférence de Copenhague est essentiel. Cette conférence constituera aussi pour l'Europe un test déterminant sur sa capacité à peser dans les grandes négociations internationales. Il faudra que nous y allions groupés.
Pour réussir, vous l'avez dit vous-même, monsieur le Premier ministre, nous devrons aussi avancer sur les questions institutionnelles : l'Europe ne pourra relever ces défis, le Parlement européen ne pourra prendre toute sa place, que si le Traité de Lisbonne est adopté. C'est la possibilité d'étendre la procédure législative de codécision, entre le Parlement et la Commission et de renforcer les prérogatives du Parlement européen dans la procédure budgétaire, notamment. Le Traité de Lisbonne c'est en fait une étape qui permettra au Parlement européen de s'affirmer comme une enceinte pleinement politique, au sens noble du terme. Nous avons besoin de nouvelles institutions pour faire avancer l'idée européenne. Nous avons besoin de renouer avec le rêve des pères fondateurs de l'Europe, pour constituer un espace politique cohérent, un acteur global.
Le Traité de Lisbonne ne réglera pas tout, mais c'est une étape indispensable pour avancer sur le chemin de l'Europe politique que nous appelons tous de nos voeux.
Oui, ce premier conseil européen d'après élection sera un rendez-vous important. Les peuples attendent que les messages adressés soient portés par nos parlementaires européens ainsi que par les chefs d'État et de Gouvernement et ici même, dans notre Parlement.
Monsieur le Premier ministre, nous avons confiance en notre avenir collectif parce que, dans la globalisation que nous connaissons, nous savons qu'il sera européen ou qu'il ne sera pas. Nous savons l'engagement du chef de l'État et nous saluons son volontarisme pour réussir l'Europe et moderniser la France. Vous pouvez être assuré de notre soutien dans cet engagement. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)