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Intervention de René Ricol

Réunion du 16 décembre 2008 à 16h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

René Ricol, médiateur du crédit aux entreprises :

C'est un travail à plein temps. J'ai dû cesser de gérer mon cabinet d'expertise comptable. Je me suis engagé pour une durée d'un an au plus. Pendant cette période, je veux bien me consacrer à temps plein à ma tâche, et c'est une vraie récompense que de lire les témoignages de reconnaissance de certains entrepreneurs.

En revanche, je milite pour que le dispositif perdure après moi. Plusieurs formes sont possibles. La surprise formidable est la mobilisation des médiateurs départementaux : ils se sont emparés de la fonction.

Je me prépare aux vagues de difficultés. Une première devrait arriver en février et mars, une deuxième ensuite. Notre métier est de se préparer au pire en espérant qu'il n'ait pas lieu.

Il fallait que les banquiers redeviennent banquiers. Lorsqu'une banque accordait un crédit, elle ne s'intéressait plus qu'aux conditions dans lesquelles elle pourrait le revendre ; le métier de la banque était devenu un métier de courtage. Aujourd'hui, les banquiers savent que, quelle que soit l'évolution des régulations, ils devront conserver au moins une partie des risques auxquels ils ont souscrit. On voit donc réapparaître la fonction, très utile, de gestionnaire des risques : exercer ce métier, c'est rentrer dans l'entreprise, comprendre son projet, apprécier sa solidité, en prenant en compte non pas le seul dirigeant, mais l'ensemble de ses salariés. C'est ainsi, par la connaissance des entreprises, qu'autrefois les banquiers construisaient la richesse de leurs portefeuilles. Ils avaient perdu cette connaissance ; ils sont en train de la retrouver.

Le critère du succès d'une médiation, c'est la satisfaction de l'entreprise. Il est vrai qu'il arrive que l'entreprise n'en soit pas contente alors que nous pensons qu'elle devrait l'être.

Je suis d'accord pour reconnaître l'iniquité sectorielle de la réduction des délais de paiement. Depuis vingt-cinq ans, je milite pour cette réduction. J'avais même créé un observatoire des délais de paiement, que j'ai finalement dissous. En son temps, j'avais convaincu Mme Cresson de réduire à trente jours ces délais dans la filière des produits frais. On nous avait prédit que cela tuerait la filière ; or nous l'avons sauvée ! J'ai le même sentiment aujourd'hui. Et s'il n'est pas possible de réduire brutalement ces délais, réduisons- les d'un jour ou même de trois jours par an et, en vingt ans, le problème sera réglé. La longueur des délais de paiement est une plaie. C'est l'élément déclencheur d'une faillite sur deux. Elle profite aux banques, qui font de l'escompte ; elle a aussi permis le développement d'un secteur hypertrophié de la grande distribution ; elle a entraîné des séismes. Et pourtant, on a déjà progressé : il y a vingt ans, les délais étaient à cent vingt ou cent quarante jours. Il ne faut pas lâcher la pression !

Il faut certes trouver la manière de compenser les effets asymétriques pour les entreprises de distribution de détail, qui vendent au comptant, qui ont des délais à quatre-vingt-dix jours et qui ne peuvent donc pas équilibrer la réduction de leurs propres délais de paiement à leurs fournisseurs. Mais la situation dans lesquels elles se trouvent montre d'abord que leurs capitaux propres sont insuffisants. Aidons-les à s'adapter, mais ce serait un drame d'abandonner : notre pays est la lanterne rouge de l'Europe.

Il est vrai que la question concerne aussi les collectivités publiques. Un de nos dossiers concerne un hôpital dont les paiements ont quatre mois de retard. L'État est devenu bon payeur ; en revanche, les collectivités territoriales et les établissements publics continuent à pratiquer des délais importants.

La violence tient en partie au fait que des interlocuteurs se trouvent sans pouvoir. Le chef d'entreprise n'a pas d'autre alternative que de négocier avec la banque, et il a en face de lui des gens dont le pouvoir de décision est très faible. Nous essayons d'y remédier, en demandant aux banques de mettre en face de l'entreprise des salariés dotés d'un pouvoir de décision. Il y a dans les banques des difficultés d'organisation et de structure. L'interlocuteur du créateur d'entreprise n'a que le pouvoir de l'écouter présenter son dossier, de lui dire qu'il le trouve très intéressant et qu'il le transmet au comité de crédit avec avis favorable. Ensuite, celui-ci fait ce qu'il veut, et peut refuser le prêt.

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