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Intervention de René Ricol

Réunion du 16 décembre 2008 à 16h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

René Ricol, médiateur du crédit aux entreprises :

C'est nous qui avons alerté l'État sur le privilège du Trésor. Un texte va être présenté. Cependant, cela concerne non pas la médiation du crédit, mais le trésorier-payeur général. Le recours au TPG est dans certains cas un moyen d'aller très vite. Une entreprise qui n'a pas de vraie ligne de crédits auprès de sa banque aura beaucoup de mal à obtenir ponctuellement et de façon urgente une crédit de 30 000 euros. Faire passer les entreprises par le TPG est alors très efficace. Mais certaines entreprises ne veulent pas utiliser ce canal de peur, parce qu'elles sont allées chez le TPG, de ne plus être éligibles à l'assurance-crédit. Nous avons donc demandé qu'un dispositif législatif supprime cette inscription de privilège. Nous doublons aussi la mise en essayant d'obtenir des sociétés d'assurance-crédit qu'elles s'interdisent de traiter les délais comme un signal d'alerte, mais qu'elles les considèrent comme des compléments de concours bancaires, la question au fond étant gérée dans le cadre de la médiation du crédit.

L'argument du soutien abusif nous a plusieurs fois été présenté par des banques. Nous ne l'acceptons pas. Cependant, c'est une vraie difficulté. Nous souhaiterions qu'un texte soit pris ; il pourrait établir qu'il n'y a pas de soutien abusif à une entreprise sous médiation. Cela nous suffirait.

Nous avons milité pour que le seuil de 250 personnes maximum pour l'éligibilité au soutien d'OSEO soit supprimé. Cette limite était ingérable : comment expliquer à une entreprise qu'elle pourra être sauvée si elle emploie 250 salariés, mais qu'elle ne pourra l'être si elle en compte 262 ou 400 ?

En revanche, nous sommes plus hésitants sur le délai de carence ; peut-être demanderons nous qu'il soit réduit. Pour l'instant, nous ne l'avons pas fait. Un des reproches les plus graves qu'on peut faire aux entreprises et aux banques est qu'elles n'anticipent pas les difficultés. Or il est aussi de la responsabilité du banquier d'une entreprise, lorsqu'il voit des difficultés pointer, de demander à celle-ci ce qui, selon elle, va se passer à échéance des trois prochains mois. C'est aussi le rôle des experts comptables des entreprises. Si nous sommes saisis en amont, nous saurons mieux régler les problèmes. Aujourd'hui, nous sommes saisis en urgence ; c'est insupportable, et je ne suis pas sûr que nous pourrons continuer ainsi. Ce délai de neuf mois est une sauvegarde qui oblige les banques à anticiper. Dans les dossiers que nous sauvons aujourd'hui figurent des éléments qui devraient être sur la table depuis six ou neuf mois. Je pourrais citer une entreprise qui aurait dû avoir saisi le Comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI, depuis un an et demi ! Ainsi, 200 personnes vont se retrouver au chômage. Il faut pousser les gens à anticiper : l'anticipation est de la responsabilité partagée des entreprises, de leurs conseils et de leurs banques.

La crise actuelle, quelque dramatique qu'elle soit, donne un délai d'anticipation de deux mois ; c'est une chance suffisamment rare pour que les entreprises en tirent parti, en rencontrant le médiateur du crédit, ou en négociant avec leur banque. Tel n'est pas le cas. À ce jour, nous n'avons quasiment pas reçu de dossiers anticipant des difficultés, une rupture de trésorerie par exemple. Or, comment négocier dans l'urgence avec les banques ? Je m'attends à voir arriver en mars des dossiers, extrêmement difficiles, d'entreprises qui savent déjà aujourd'hui qu'elles seront alors dans une situation désespérée. Les conseils de ces entreprises jouent leur crédibilité professionnelle. Nous n'avons donc pas soutenu la thèse d'un délai de carence trop long, considérant qu'OSEO faisait un travail remarquable et que, si l'on réduisait ce délai, les banques se défausseraient sur cette institution.

Je ne dispose pas de chiffres sur l'assurance-crédit.

Nous avons alerté vigoureusement le Gouvernement sur la nécessité de mettre très vite en place un dispositif d'assistance aux entreprises qui vont souffrir de la réduction des délais de paiement. Une majorité silencieuse d'entreprises souhaite la réduction de ces délais. À l'extrême, la disparition des délais de paiement ferait disparaître l'assurance-crédit ! Je milite depuis vingt-cinq ans pour leur réduction. Ils coûtent cher ; lorsqu'une entreprise dépose son bilan, la cause principale est souvent la faillite du client. Certes, beaucoup d'entreprises – nous les avons identifiées – vont souffrir parce qu'elles ne pourront pas répercuter sur leurs clients la réduction des délais de paiement à leurs fournisseurs.

Dans le même temps, les accords dérogatoires sont nombreux et la majorité silencieuse s'indigne en les découvrant. Le fait qu'une minorité souffre de la réduction des délais ne doit pas faire oublier que la majorité l'attend avec impatience. Pour cette minorité, comme l'a annoncé le Président de la République, un système de crédit à court terme devrait permettre de compenser les effets asymétriques de la réduction des délais. Notre expérience du terrain nous montre qu'il s'agit là d'une question préoccupante.

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