Le changement d'appellation de la loi de règlement répond au voeu du Parlement qui souhaite traduire les changements profonds introduits par la LOLF. L'examen de la loi de règlement doit devenir un moment plus important du débat parlementaire, consacré à rendre compte. Rendre compte, ce n'est pas seulement rendre des comptes, c'est aussi informer sur les résultats. Les commissions se sont largement impliquées dans l'évaluation des résultats.
En 2007, le déficit budgétaire arrêté dans le projet de loi de règlement s'établit à 35,7 milliards d'euros. J'ai eu l'honnêteté de ne pas retenir ce chiffre dans la communication du Gouvernement car il inclut des recettes exceptionnelles : le produit de cessions de titres EDF, pour 3,7 milliards, enregistré provisoirement sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » pour financer le plan Campus. En dehors de cette opération, le déficit budgétaire atteint 38,4 milliards. C'est un montant proche de celui retenu dans la loi de finances rectificative pour 2007 – 38,3 milliards – et, en tout état de cause, inférieur de 3,6 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale.
Pour couper court à la discussion sur le montant du déficit, je conteste les correctifs qui ont été apportés, tendant à gonfler le déficit, en particulier le retraitement de l'apurement de la dette de l'État vis-à-vis de la sécurité sociale. Je ne comprends pas le raisonnement qui consiste à augmenter de 5,1 milliards les dépenses budgétaires de l'exercice 2007 pour traduire l'annulation de la dette de l'État au 31 décembre 2006. Cette dette n'a pas à figurer dans le traitement comptable et budgétaire de l'année 2007. La remise des créances de la sécurité sociale sur l'État constitue la contrepartie de l'annulation d'une dette détenue par la Caisse de la dette publique. C'est donc une opération de bilan. À supposer que l'on puisse effectuer un retraitement, c'est aux exercices antérieurs à 2007 qu'il faudrait l'imputer. Quoi qu'en pensent les experts, je rappelle en tant que ministre des comptes publics que cette opération est pleinement assumée sur le plan politique. Elle devait être faite car elle est importante pour la crédibilité de l'État dans ses relations avec la sécurité sociale, même si elle ne change pas grand-chose au déficit maastrichtien. La reconstitution de la dette, en revanche, c'est une autre affaire.
L'amélioration du déficit en 2007 est le résultat, d'une part, de la bonne tenue des recettes de l'État – plus 4,1 milliards d'euros par rapport à la LFI – en dépit d'une conjoncture moins favorable que prévu, d'autre part, d'une meilleure maîtrise des dépenses du budget général. Le plafond de dépenses arrêté par le Parlement a été strictement respecté. Certes, je n'ignore pas les conséquences du choix que nous avons fait l'année dernière de ne pas détricoter la loi de finances initiale. Les insuffisances de la budgétisation de certains postes ont conduit à la reconstitution d'une dette envers la sécurité sociale dès 2007. Mais nous avons décidé de jouer le jeu de la LOLF et de ne pas rebattre en cours d'année les cartes distribuées aux ministères. La LFI pour 2008 marque d'incontestables progrès dans l'évaluation des dotations, même si des progrès restent encore à réaliser.
L'analyse de l'exécution budgétaire est éclairée par les résultats qu'offre le volet comptable du projet de loi de règlement. Je tiens à saluer le travail des administrations qui a permis de concrétiser cet apport important de la LOLF. Les comptes de ce deuxième exercice sont à nouveau le résultat d'une année d'effort pour consolider les acquis de ce qui a été appelé le big bang comptable et pour faire progresser la qualité de l'information financière. Le certificateur, c'est-à-dire la Cour des Comptes, nous a accompagnés dans cette démarche d'amélioration. Pour l'ensemble des ministères, plus de 90 % des recommandations formulées par la Cour dans son rapport de l'an dernier ont été mises en oeuvre. Elles se traduisent par un enrichissement significatif des opérations enregistrées au bilan et des informations portées en annexe. Par exemple, les immobilisations ont fait l'objet d'un recensement plus systématique et leur valorisation a été améliorée. L'actif du bilan a ainsi été réévalué à 555 milliards d'euros, contre 534 milliards en 2006. D'importants travaux ont été engagés depuis l'an dernier, afin de mieux identifier les provisions et les dettes non financières de l'État, ce qui a conduit, au-delà de l'augmentation de la dette financière, à revoir à la hausse le montant du passif qui s'établissait à 1 211 milliards d'euros. Les progrès réalisés ont été reconnus par la Cour qui a levé trois réserves sur treize, mais elle en a aussi introduit de nouvelles, non substantielles. Il faut reconnaître que la Comptabilité publique et la Cour sont entrées dans un processus de progrès parallèle : le certificateur affine lui aussi ses méthodes de certification. La certification porte incontestablement ses fruits.
Pour autant, le chantier comptable est loin d'être achevé. Les efforts devront être poursuivis pour améliorer la qualité de l'information. C'est tout le sens des engagements que nous avons renouvelés auprès de la Cour. C'est une tâche de longue haleine qui doit nous inciter à ne pas relâcher l'effort de transparence, de fiabilité et de sincérité de nos comptes.
L'interprétation du résultat comptable enregistré en 2007 – un déficit de 41,4 milliards d'euros –, et surtout de son évolution par rapport à 2006 où le déficit se montait à 31,6 milliards d'euros, mérite des explications car il pourrait être tentant de contester l'amélioration du déficit budgétaire en mettant en avant la dégradation du résultat comptable. En 2006 a eu lieu la privatisation des sociétés concessionnaires d'autoroutes. Il ne s'est rien produit de tel en 2007. La seule différence du produit de cession représente les trois quarts de l'écart. Pour le reste, les différences ne sont pas significatives et les tentatives de rapprochement avec le déficit budgétaire sont rendues très délicates du fait des provisions et des amortissements, notions évidemment absentes de la comptabilité budgétaire.
Au-delà des comptes, l'enjeu véritable du projet de loi de règlement porte sur la mesure de la performance de l'action publique. Avec la LOLF, le Parlement a voulu revaloriser la loi de règlement pour en faire un moment de vérité budgétaire, pendant lequel le Gouvernement rend compte de sa gestion et le Parlement peut juger des résultats de l'action gouvernementale. Nous avons un peu manqué le premier rendez-vous, celui de l'année dernière, à cause du calendrier électoral. Cette année, le processus, sans être parfait, sera meilleur. Vous en avez d'ailleurs apporté la preuve avec l'organisation d'une dizaine d'auditions de ministres en commission élargie, ce qui ne s'était pas fait l'année dernière. En outre, trois ministres s'exprimeront en séance publique. Votre président, dont on sait qu'il partage la paternité de la LOLF, n'y est sans doute pas étranger.
Dans leur ensemble, les rapports annuels de performances intègrent mieux la démarche de performance. Nous n'en sommes après tout qu'au deuxième exercice. Cela représente un changement culturel très profond pour les administrations. Il ne s'agit plus de vanter les taux de consommation des crédits, mais de conforter la mise en oeuvre d'une stratégie avec les moyens qui ont été alloués par le Parlement. L'exploitation des indicateurs de performance témoigne de résultats satisfaisants. Seuls 20 % des indicateurs ne peuvent être exploités, et le taux de réalisation des objectifs atteint 60 % pour les 80 % restants, parmi lesquels 20 % traduisent des progrès significatifs, même si la cible n'est pas atteinte. Je vous renvoie aux synthèses des rapports annuels de performances.
L'année dernière, 50 % des indicateurs étaient exploités, cette année 80 %. En matière de sécurité et de justice, l'objectif de réduction des crimes et délits en zone police est dépassé – moins 4,2% au lieu d'une fourchette de moins 1 %-2 % – ; le taux d'élucidation des affaires a été de 34,2 % pour un objectif de 33,5 % ; les poursuites des parquets sont en ligne avec les prévisions ; et les évasions ont été moins nombreuses que prévu, puisqu'il n'y en a eu qu'une pour 60 000 détenus. La recherche de résultat n'est pas exclusive de la préoccupation de maîtrise de la dépense publique. Il est possible de faire mieux au bénéfice du citoyen et de l'usager au meilleur coût pour le contribuable. C'est le sens de la révision générale des politiques publiques. Les RAP montrent que les ministères savent parfaitement exploiter les leviers de la LOLF dans leur gestion en redéployant les crédits. Ils commencent à le faire. La réduction des effectifs n'est pas antinomique d'une amélioration des résultats. L'exercice 2007 se solde par une suppression de 15 500 ETPT, conforme à l'objectif initial de 15 000, et supérieure aux 9 500 suppressions en 2006. Les efforts peuvent encore être amplifiés et la RGPP nous permettra d'aller plus loin.
S'agissant du déficit budgétaire, celui de 2006 était certes majoré d'un treizième mois de pension, mais nous travaillons sur les opérations comptabilisées. Il y a eu des opérations exceptionnelles en 2006, il y en a eu aussi en 2007 qui rendent la comparaison plus difficile. Je conviens néanmoins qu'il faut essayer de stabiliser les référentiels. Mais rien dans les règles n'ayant changé entre les deux exercices, ils sont comparables, à la cession des titres EDF près.
Le déficit maastrichtien est de 2,7 % du PIB, contre 2,4 % prévu. Cet écart provient, pour 0,2 point, d'une dégradation inattendue du besoin de financement des collectivités locales – qui se répercute non sur le déficit budgétaire, mais sur le déficit global – et, pour 0,1 point, de retraitements comptables de recettes imposés par Eurostat qui réduisaient le déficit budgétaire, mais pas le déficit maastrichtien. Il s'agit essentiellement des recettes annuelles de la Coface qu'Eurostat, dans son calcul du déficit, a plafonnées au montant du résultat de la Coface. Franchement, c'est plus que contestable puisqu'il s'agit bien d'argent encaissé qui appartient à l'État.
Il est vrai que la dette de l'État envers la sécurité sociale se reconstitue. Le montant des dettes exigibles à la fin de l'année 2007 était de 1,7 milliard d'euros. La Cour des comptes l'évalue à 2,5 milliards en ajoutant aux factures impayées les charges à payer aux organismes de sécurité sociale au titre de l'allocation pour adulte handicapé et de l'allocation pour parent isolé pour le mois de décembre qui sont versées au mois de janvier, et que la Cour a rattachées à l'exercice 2007. Nous les avons, en ce qui nous concerne, comptabilisées en 2008, sans changer la norme. Pour éviter que la dette n'augmente à nouveau, il faut progresser dans la qualité de la budgétisation initiale. Nous avons certes fait des progrès en 2008, par exemple dans l'évaluation de l'aide médicale d'État qui était systématiquement et fortement minorée. Les gestionnaires des ministères ont reçu une circulaire leur donnant instruction de ne pas imputer les dettes envers la sécurité sociale sur des crédits gelés. Au fur et à mesure, nous allons régler cette dette. J'ai bien l'intention de le faire dans le projet de loi de finances pour 2009.