Premièrement, je suis d'accord avec les propos de Sophie Ernst sur la comparaison et la synergie internationales. Encore faut-il savoir qu'aujourd'hui, en France, beaucoup de choses se règlent dans le cadre de programmes et d'actions de type européen, notamment dans des compétitions dans le détail desquelles je ne vais pas entrer, par exemple entre le Conseil de l'Europe et d'autres instances européennes. La mission d'information pourrait peut-être se pencher sur la question suivante : qu'est-il dit – et dans quelle cacophonie – sur histoire et mémoire en termes européens ? Avec quelles implications en France ? Si vous souhaitez m'auditionner un jour sur cette question, j'ai un certain nombre d'éléments de réponse…
Deuxièmement, nous avons sans doute contribué, même modestement, à éclairer la mission sur les traces. De la trace à l'oeuvre, il y a un véritable cheminement pédagogique. Que l'on considère l'élève dans son environnement, que l'on mène un travail d'établissement et d'équipe : il y a peut-être là une patrimonisation en cours qui pourrait déboucher sur de la vraie création et de l'activité critique.
Troisièmement, je constate que nous continuons à toujours parler aussi benoîtement d'histoire, sans ajouter, après un trait d'union, « géographie ». Ce non-dit commence à devenir singulièrement irritant. On pourrait imaginer un jour poser publiquement cette question.
Quatrièmement, la question difficile et controversée de l'histoire nationale, non pas tant dans sa constitution que dans ses transcriptions actuelles en termes de mythologie, pourrait être résolue d'une manière assez élégante, qui aurait l'avantage de dédramatiser certaines situations. On admettrait, comme beaucoup d'autres pays d'Europe, que les enseignements d'histoire n'ont pas à faire une histoire nationale comme au XIXe siècle, au temps de Vidal de la Blache et de Lavisse, mais de faire du mieux possible, et dès le primaire, une sorte de récit des origines de tout un chacun, c'est-à-dire de tous les élèves confiés à l'institution scolaire. On pourrait dire que l'histoire est aussi un récit des origines que l'on fabrique pour montrer à la génération qui vient qu'il y a eu et qu'il y a encore des capacités à vivre ensemble, sur un territoire donné qui s'est constitué en État Nation au fil de l'histoire. Il y aurait peut-être là une possibilité non négligeable de retrouver une unité dans la diversité. En tout cas, l'usage exclusif et contesté du concept d'histoire nationale aujourd'hui rend cette évolution tout à fait impossible en l'état de fixation des choses.
Enfin, la question de fond qu'il faut poser à propos de la formation continue des enseignants et des professeurs est la suivante : comment la différencier ? A quel moment, sur quelles urgences, académie par académie ? Autrement dit, comment lui donner une souplesse spatio-temporelle ?
Vous avez bien compris, s'agissant des cinq points que je viens d'examiner, que rien ne pourra être réglé sans une déconcentration importante, constante, très active et très intériorisée par l'institution, de ces nouvelles modalités d'action qu'elle doit à tout prix inventer sous peine de se rigidifier un peu plus.