Voici donc le deuxième projet de loi de finances rectificative de l'année 2008, une première loi de finances rectificative pour le financement de l'économie ayant été adoptée en octobre dernier. Il réactualise les prévisions de recettes en fonction des dernières estimations connues. Il opère les nécessaires ajustements de dépenses en fin d'exercice avec ouvertures et annulations de crédits, lesquelles se compensent strictement. Il introduit enfin de nouvelles dispositions en matière fiscale.
Le solde budgétaire associé à ce collectif s'établit à -51,4 milliards d'euros, en recul de deux milliards d'euros par rapport à la prévision de la loi de finances rectificative pour le financement de l'économie et de 9,7 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale. Cette aggravation du déficit témoigne à la fois du jeu des stabilisateurs économiques et de la forte augmentation de la charge de la dette du fait de l'inflation.
Les prévisions de recettes fiscales, déjà revues à la baisse de cinq milliards d'euros dans la loi de finances rectificative d'octobre dernier, le sont de nouveau de deux milliards d'euros, soit une baisse totale de sept milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale – conformément d'ailleurs à la prévision du président de votre commission des finances…
Le produit de l'impôt sur les sociétés est lui aussi revu à la baisse d'un milliard d'euros, suite à la crise du secteur financier qui représente, à lui seul, un quart des recettes. L'hypothèse est prudente car nous ne connaîtrons le montant exact des rentrées qu'après le paiement du dernier acompte en décembre.
Les recettes de TVA, dont nous constatons la diminution depuis septembre, sont elles aussi revues à la baisse d'un milliard d'euros. Cette révision intègre notamment un remboursement de 600 millions d'euros collectés à tort sur les contributions d'exploitation versées par les régions à la SNCF, au titre des transports régionaux de voyageurs. Les sommes indûment versées par les régions leur ont été restituées aujourd'hui même et la DGF qui leur sera allouée en fin d'année ajustée en conséquence. Les deux opérations se traduisent tout de même par un gain de quelque 85 millions d'euros pour les régions – et donc une perte de même montant pour l'État –, mais il m'étonnerait qu'elles s'en plaignent.
La dégradation du déficit est cependant contenue grâce à une stricte maîtrise des dépenses, hormis l'augmentation de la charge de la dette. Le projet de loi de finances rectificative propose des ouvertures de crédits, strictement limitées à celles nécessaires pour solder la gestion. Ces ouvertures, qui correspondent à des besoins apparus en cours d'année, s'élèvent à 1,1 milliard d'euros, dont près de 800 millions d'euros afin de mettre à niveau les dotations versées à la Sécurité sociale et d'éviter la reconstitution d'une dette de l'État à son égard. J'ai ainsi tenu à ce que soient notamment rebudgétisées l'allocation aux adultes handicapés – AAH –, l'allocation de parent isolé – API – ou encore l'aide médicale d'État – AME.
Dans le prolongement de l'apurement de 5,1 milliards d'euros de dettes constituées auprès du régime général en 2007, j'ai choisi d'affecter le surplus de recettes attendu par la Sécurité sociale au titre de la compensation des exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires prévues dans la loi TEPA, d'une part à hauteur de 150 millions d'euros au financement des exonérations de charges sur les rachats de jours de RTT, d'autre part à hauteur de 750 millions d'euros au remboursement de dettes anciennes.
Ces ouvertures sont entièrement gagées par des annulations de crédits de même montant, réparties sur l'ensemble des missions du budget général et portant sur des crédits initialement mis en réserve au titre de la réserve de précaution ou devenus sans objet.
D'autres ouvertures, dont l'urgence ne permettait pas d'attendre le collectif de fin d'année, ont été intégrées par anticipation dans un décret d'avance, actuellement soumis à l'avis des commissions des finances des assemblées. Ce décret comporte 380 millions d'euros pour le financement de la prime de Noël, revalorisée et désormais versée en novembre aux bénéficiaires du RMI et de l'allocation de solidarité spécifique – ASS. Ces ouvertures sont également strictement compensées par des annulations de même montant.
Le projet de loi de finances rectificative comporte en outre diverses mesures fiscales.
Tout d'abord, pour soutenir nos entreprises, ce qui est particulièrement important dans la conjoncture actuelle, il est proposé d'instituer un dégrèvement permanent de taxe professionnelle à hauteur de la valeur locative des équipements et biens mobiliers neufs acquis par les entreprises entre le 23 octobre 2008, date de l'annonce de la mesure par le Président de la République, et le 31 décembre 2009. Cette mesure bénéficiera même aux entreprises dont la taxe professionnelle est aujourd'hui plafonnée. La baisse attendue de recettes pour l'État est estimée à environ un milliard d'euros en 2011.
Ensuite, sont prévues des mesures spécifiques au profit des territoires touchés par les restructurations du ministère de la défense : exonération d'impôt sur les bénéfices, totale pendant cinq ans puis partielle pendant deux ans, exonération de certaines cotisations patronales de sécurité sociale, crédit de taxe professionnelle pour les micro-entreprises.
Enfin, pour mieux lutter contre la fraude fiscale, le projet de loi tend à renforcer les prérogatives des agents des impôts. Lors des perquisitions opérées dans les entreprises, ils auront désormais le droit d'entendre – ce n'est pas possible aujourd'hui – les auteurs présumés de la fraude. Quant à la lutte contre l'évasion des capitaux vers les paradis fiscaux, le projet de loi porte de trois à six ans le délai de prescription et alourdit le montant de l'amende encourue pour non-déclaration de compte, laquelle pourrait aller jusqu'à 5 000 euros...