On peut l'appeler ainsi, en effet. (« Ah ! » sur les bancs du groupe GDR)
Second point, qui découle directement du premier : la réponse à la crise financière ne peut passer que par la régulation. Il faut mettre au point des règles, des protections et des sécurités pour empêcher qu'une autre crise ne se déclenche à l'avenir et pour permettre une vraie prévention des tremblements de terre financiers.
C'est pourquoi un premier jeu de mesures devrait être pris rapidement. À un premier niveau, il faudrait rattraper le retard pris par la régulation face à l'innovation financière absurde qui s'est développée ces dernières années. Le Parlement européen a adopté, en septembre, une série de recommandations sur les fonds spéculatifs et les fonds de capital-investissement : mise en place d'un cadre harmonisé pour ces fonds, droit à l'information et à la consultation du personnel des firmes reprises. Ces recommandations doivent impérativement, monsieur le Premier ministre, se traduire par une proposition législative de la Commission.
À un second niveau, il faut moraliser les marchés financiers, c'est-à-dire supprimer les conflits d'intérêts et les excès. Il y a deux pistes pour y parvenir : il faut soumettre les agences de notation à un contrôle public, et il faut aussi plafonner les rémunérations, parachutes dorés et bonus que s'octroient les dirigeants de la sphère financière. L'absence de transparence dans ce domaine encourage les prises de risque extrêmes et le court-termisme, et elle récompense l'échec. C'est là-dessus que nous attendons un signal très fort et très ferme du Conseil européen des 15 et 16 octobre : à l'issue de ce Conseil, il faut que les chefs d'État et de Gouvernement européens envoient un message d'une clarté absolue à la Commission. Nous demandons des propositions législatives immédiates visant à réguler les marchés financiers. S'agissant de la France, nous sommes favorables à une grande loi de régulation financière co-produite avec le Parlement.
Deuxième leçon : il faut plus d'Europe politique et plus de puissance publique.
En effet, au-delà des premières pistes que j'ai indiquées, la leçon à retenir de la séquence de ces dernières semaines, c'est que seule une réponse politique coordonnée s'appuyant sur une puissance publique prenant toute sa place et toutes ses responsabilités à l'échelle européenne et, au-delà, à l'échelle mondiale, est susceptible d'apporter une réponse efficace. L'Eurogroupe a pris de premières dispositions, mais nous souhaitons, nous, que les chefs d'État et de gouvernement soient beaucoup plus offensifs et plus volontaristes dans leur soutien à une Europe politique renforcée, qui aurait les moyens de réagir en cas de crise. C'est pour y parvenir que nous suggérons d'indiquer clairement, à l'issue du prochain Conseil européen, que l'Union soutient les efforts du Fonds monétaire international pour mettre en oeuvre, sur les recommandations de son directeur général, les propositions du Forum de stabilité financière visant à mieux surveiller les risques et à accroître la transparence. La feuille de route existe, et elle est bonne, mais il manque les autorités pour l'exécuter. Il faut donc renforcer le rôle du FMI.
Il est grand temps de créer ce gouvernement européen dont nous, nous parlons depuis Maastricht, et dont cette crise a prouvé l'absolue nécessité. En effet, la crise des derniers mois a démontré l'inefficacité des interventions étatiques ponctuelles et individuelles, qui n'ont jamais réussi à rassurer les marchés financiers, et, à l'inverse, l'efficacité de l'intervention publique lorsqu'elle est coordonnée au niveau européen. Il aura fallu que soient clairement soutenus les mécanismes régulateurs pour que les marchés se redressent enfin. Nous devrons, à l'avenir, conserver cette leçon, et changer de philosophie économique, fermement et sans hésiter. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC et du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, le Conseil européen devra faire le point demain sur le traité de Lisbonne : j'espère qu'il conservera à l'esprit les événements de ces dernières semaines pour faire rebondir l'Europe politique, et même pour la faire progresser, car elle nous a manqué cruellement. (Applaudissements ironiques sur les bancs des groupes UMP et NC.) Vous m'applaudissez, mais n'oubliez pas que l'Europe politique, les socialistes l'ont faite avant vous et bien plus que vous ! Je vous remercie de les applaudir, mesdames, messieurs de la majorité ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Enfin, troisième leçon : il faut dès à présent se pencher sur l'économie réelle, qui donne de dangereux signes de faiblesse, et même pis encore puisqu'elle est aujourd'hui entrée en récession. Certes, il faut sauver les banques, mais il ne faut pas perdre de vue un tableau plus large. (Mêmes mouvements)