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Intervention de Didier Guérin

Réunion du 3 juin 2009 à 16h00
Mission d’évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes

Didier Guérin, conseiller à la chambre criminelle de la Cour de cassation :

Le meilleur arrêt est le premier, celui de septembre 1990, à propos de la loi de 1980. Il y est écrit que « l'article 332 du code pénal de l'époque, qui n'a d'autres fins que de protéger la liberté de chacun, n'exclut pas de ses prévisions les actes de pénétration sexuelle entre les personnes unies par les liens de mariage lorsqu'ils sont imposés dans les circonstances prévues par ce texte. » C'était clair.

Votre troisième point d'interrogation, à savoir les violences psychologiques, est plus délicat. Il faut voir quels sont dans la jurisprudence les arrêts permettant de les définir.

Passant sous silence un vieil arrêt de 1972, je citerai, tout d'abord, l'arrêt du 13 juin 1991 – bulletin criminel 1991, n° 253. Le prévenu adressait par la voie postale des lettres anonymes contenant des papiers sur lesquels il dessinait des croix gammées et des cercueils et, dans certains cas, des écrits injurieux à des personnes. Les juges relèvent que ces envois ont, par leur contenu, vivement impressionné les destinataires. Ils acceptent de condamner la personne pour violence volontaire. La Cour de cassation a admis ces décisions : « en l'état de ces constatations, la cour d'appel a décidé, à bon droit, que ces agissements étaient constitutifs de violences ou voies de fait avec préméditation dès lors que les violences ou voies de fait visées par le texte que j'ai cité comprennent celles qui, sans atteindre matériellement la personne ni lui causer d'incapacité de travail, sont cependant de nature à provoquer un choc émotif. »

Le résultat des agissements est pris en compte, à savoir le choc émotif. Il est intéressant de noter que les pratiques ne portaient pas atteinte directement, par un acte matériel, à la personne et que les actes étaient ponctuels.

Dans l'affaire qui a donné lieu à l'arrêt du 17 juin 1992 – Bulletin criminel 1992, n° 243 –, un technicien avait mis une annonce sur le minitel rose ainsi libellée : « Jeune fille de 21 ans cherche homme viril » mentionnant les nom, prénom et domicile d'une ancienne amie. À la suite de la diffusion de ce message, cette dernière a reçu de nombreuses lettres dont le contenu offensant pour sa pudeur l'a affectée au point d'entraîner des troubles du comportement attestés par certificat médical. L'individu a été déféré pour violences ou voies de fait n'ayant pas entraîné d'incapacité de travail mais commises avec préméditation. La Cour de cassation a estimé que les faits ainsi constatés caractérisaient en tous les éléments constitutifs le délit reproché de violence volontaire avec préméditation dès lors que l'atteinte délibérément recherchée à l'intégrité de la victime est le résultat du mécanisme qu'il a sciemment élaboré et mis en oeuvre et dont l'intervention finale de tiers n'a été qu'un élément.

Là encore, il n'y a pas de contact physique entre l'agresseur et l'agressé. Une démarche ponctuelle entraîne un choc psychologique.

L'arrêt du 30 avril 1996 est intéressant sur le plan du résultat. Une personne a un revolver et tire volontairement à côté d'une autre personne provoquant chez celle-ci un choc émotif. La chambre criminelle a reconnu qu'il y avait violence dans le fait de tirer pour faire peur. Dans ce cas, il y a contact en quelque sorte matériel puisqu'il y a présence. De plus, il s'agit d'une agression.

Dans l'affaire qui a conduit à l'arrêt du 2 septembre 2005 – Bulletin criminel 2005, n° 2012 –, des personnes arrivent en groupe et font peur à une autre personne alors que, dans le même temps, une agression se produit entre l'un de leurs compagnons et une tierce personne. C'est une ambiance de violence qui crée l'état de violence. Là encore, c'est la perturbation psychologique et le choc émotif qui sont retenus.

On voit donc que la notion de perturbation psychologique n'est pas ignorée de la jurisprudence.

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