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Intervention de Michel Camdessus

Réunion du 30 janvier 2008 à 18h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Michel Camdessus :

s'est dit honoré d'avoir à nouveau l'occasion de s'exprimer devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale.

C'est en effet la décision de la Commission européenne qui a conduit le Premier ministre à demander une étude de la réforme de la distribution du livret A, dans la perspective de mettre la France en conformité avec les règles communautaires tout en préservant scrupuleusement les missions d'intérêt général qui sont attachées à ce produit : le logement social, mais aussi l'accessibilité bancaire. En d'autres termes, puisqu'il faut changer, peut-on faire de nécessité vertu ?

Sur la situation actuelle, la position exprimée dans le rapport est plutôt pessimiste. Malgré les efforts consentis pendant tant d'années pour résorber ce problème, il existe en France plus d'un million de personnes mal logées ou sans domicile fixe. Récemment, le Gouvernement a décidé de doubler l'effort en faveur du logement social et le Parlement a adopté la loi instituant le droit au logement opposable. L'harmonie préétablie entre la production de ressources par le livret A et les besoins de logement, sur laquelle on a longtemps vécu, sera-t-elle préservée dans ces conditions ? La question ne concerne pas seulement le volume des ressources, mais aussi la capacité à les bonifier, ce qu'a si bien fait, jusqu'à présent, la Caisse des dépôts et consignations.

L'analyse développée dans le rapport est que cette harmonie historique est en danger. À partir de 2013 environ, non seulement la ressource de base risque de se révéler insuffisante, mais la capacité de bonification par la CDC risque également de s'amenuiser et même de disparaître. Du reste, on peut penser que le taux des prêts consentis par la Caisse au logement social est déjà très élevé au regard de la capacité des personnes logées dans les HLM à acquitter leurs loyers.

Actuellement, le livret A apporte au logement social une ressource qui coûte 4,12 % alors que l'on prête à 3,8 %, ce qui constitue un élément de déficit patent. De plus, il apparaît que le logement financé à quarante ans n'est en fait pas remboursé au bout de cette période : en moyenne, ce sont les deux tiers de l'immobilisation initiale qui restent à rembourser, ce qui soumet la trésorerie des organismes d'HLM à une tension de plus en plus forte et explique qu'ils soient peu enclins à construire et que leur capacité à assurer l'entretien et la rénovation se réduise. En dehors même de la décision de Bruxelles, il existe donc un problème auquel il faut faire face.

On sait bien qu'il est impossible d'augmenter les loyers des HLM en valeur réelle car les locataires ont de plus en plus de mal à les payer. On sait également que l'état des finances publiques ne permettra pas au Gouvernement de trouver dans le budget des moyens de subvention à la mesure de l'effort supplémentaire qui serait nécessaire. Comment, dès lors, trouver les ressources tout en maintenant la garantie de l'État sur ce financement ? On est contraint de se focaliser très étroitement sur le coût primaire de la ressource : le taux du livret A et le taux des commissions versées aux établissements collecteurs.

Or le rapport a pu établir que, si l'on cesse de surrémunérer le livret A – étant entendu qu'il y a surrémunération lorsque l'on sert, sur cette ressource à vue, des intérêts supérieurs à ce que représentent l'inflation et une petite marge – et si l'on ramène les commissions des trois groupes qui collectent cette ressource à un niveau normal, on dégagera 2 milliards d'euros par an, soit 75 % du montant actuel des aides à la pierre. Cette analyse ne vaudra à son auteur aucun ami, puisque les mal logés ne constituent pas un groupe de pression et que ceux dont on va resserrer les commissions sont très hostiles à cette idée.

Le Président Didier Migaud a demandé à M. Michel Camdessus à quel taux il estimait le « niveau normal » des commissions.

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