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Intervention de Anne Rebeyrol

Réunion du 27 mai 2009 à 16h00
Mission d’évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes

Anne Rebeyrol :

Il y a, effectivement, de quoi travailler.

Les nouveaux programmes d'éducation civique au collège (je rappelle qu'on parle d'instruction civique et morale dans le primaire, d'éducation civique au collège et d'ECJS, éducation civique, juridique et sociale, au lycée), qui sont de la compétence des professeurs d'histoire-géographie, mettent l'accent sur l'égalité – l'égalité fillesgarçons est approchée à travers le droit à l'instruction pour tous en sixième – et la lutte contre les discriminations, particulièrement en classe de cinquième. Le programme de cette classe s'appelle « De la diversité à l'égalité » et traite de sujets tels que « des êtres humains, une seule humanité », « différents mais égaux », « égalité : un principe républicain », ou encore « responsabilité collective et individuelle dans la réduction des inégalités ». À partir de situations concrètes, qui peuvent être tirées d'un journal, le professeur fait réfléchir les élèves afin de les rendre capables de reconnaître une situation de discrimination, de savoir comment y répondre, de connaître les dispositions de la loi concernant ce type de situations et de monter des actions pour y remédier.

Comme les programmes d'histoire sont axés sur l'histoire politique, les femmes y sont moins présentes que s'il s'agissait d'une histoire économique et sociale. Leur place est, cependant, étudiée au moment de la Révolution française, en classe de quatrième, au moment de la révolution industrielle et dans leur conquête du pouvoir politique en classe de troisième.

Dans les programmes d'histoire des premières et terminales générales, le rôle et le statut des femmes en France, en Europe et dans le monde sont un axe d'étude à aborder, tout au long de l'année, lorsqu'un sujet d'histoire s'y prête.

Les plus grandes avancées se rencontrent dans les programmes des lycées professionnels, où peuvent se rencontrer des situations conflictuelles entre les filles et les garçons.

En seconde professionnelle, le programme d'éducation civique porte sur les thèmes du « vivre en citoyen », de l'égalité, des différences, de la discrimination. Les trois grands sujets d'étude parmi lesquels les enseignants doivent choisir sont : premièrement, l'exclusion, qu'il s'agisse du racisme, du sexisme ou du handicap ; deuxièmement, les salaires hommesfemmes et, troisièmement, la discrimination positive. La réflexion est menée à partir de sujets d'actualité.

En première, l'un des sujets obligatoires porte sur les femmes dans la société française de la Belle Époque à nos jours et ce sujet peut se décliner selon trois grandes thématiques : Louise Weiss et le vote des femmes, la scolarisation des filles, Simone Veil et l'IVG. Cette approche est nouvelle par rapport aux anciens programmes des lycées professionnels.

Dans le cadre de l'éducation civique, juridique et sociale, sont abordés, de la seconde à la terminale, de grands thèmes comme la citoyenneté, « République et particularismes », « citoyenneté et droits de l'homme ». Ces thèmes, qui brassent des notions souvent polysémiques, permettent de travailler sur les rapports entre filles et garçons.

J'aborderai la question de la formation des enseignants sous trois angles.

Le premier est le rôle d'impulsion joué par le ministère de l'Éducation nationale. Il organise, à l'intention des cadres de l'Éducation nationale, des séminaires nationaux sur des problématiques qu'il demande ensuite aux académies de reprendre et de décliner. En mars 2008, il y en a eu un sur « Égalité fillesgarçons à l'école : quelles réalités, quelles perspectives ? ». Un autre se tiendra en octobre prochain sur le thème : « Lutter contre les discriminations : la diversité à l'école », dans lequel la problématique fillesgarçons sera également abordée.

Le deuxième angle est la formation initiale des enseignants. Le cahier des charges des IUFM mentionne par deux fois, parmi les compétences attendues des futurs enseignants, la mixité, l'égalité fillesgarçons et le respect des valeurs de la République. Cela étant, il appartenait à chaque IUFM de décliner celui-ci et, si nombre d'instituts ont proposé des cours sur ces sujets, il serait faux d'affirmer que c'était le cas de tous. Dans le cadre de la formation générale, qui est transversale, étaient prévus des cours sur les valeurs de la République, l'égalité fillesgarçons, la laïcité, la psychologie des adolescents mais, dans les formations disciplinaires, destinées à aider les jeunes certifiés, agrégés ou professeurs des écoles, ces sujets n'étaient pas abordés partout. J'ai vu, cependant, des formations où les futurs enseignants étaient éclairés sur ce qu'était le genre en histoire et sur la manière dont on pouvait travailler sur l'égalité politique de la Révolution à nos jours. Les initiatives en ce domaine sont un peu éparses et je ne sais pas du tout ce qu'il va advenir dans le futur, mais on ne peut pas dire que le sujet soit absent.

Troisième et dernier angle : la formation continue, à laquelle tout enseignant peut s'inscrire, même s'il ne dispose que de peu d'heures à cet effet et que ces dernières doivent être remplacées. Il y a, en ce domaine, des verrous, l'un d'eux étant – je puis en témoigner, ayant été moi-même enseignante – qu'il est très difficile pour des enseignants de se penser comme producteurs d'inégalité et, donc, comme ayant besoin d'une formation sur l'égalité fillesgarçons. Des formations spécifiques ont été proposées sur ce thème mais les enseignants ne s'y inscrivaient pas. Il faut donc réfléchir à une façon différente de procéder. La solution me semblerait être d'organiser des formations sur d'autres thèmes – par exemple, le développement durable – et d'aborder la question de l'égalité hommesfemmes à cette occasion.

Je conclurai sur la convention interministérielle, qui a été renouvelée en 2006. Elle est déclinée dans les deux tiers au moins des académies par des conventions académiques pour l'égalité fillesgarçons. Un comité de pilotage a été mis en place pour travailler à cette déclinaison.

La convention comprend trois grands axes : une orientation plus diversifiée des filles et des garçons, le respect mutuel entre les filles et les garçons, et la formation des enseignants. Depuis la nomination de Mme Marie-Jeanne Philippe, rectrice de l'académie de Besançon, nous avons mis en place des journées interacadémiques destinées, d'une part, à faire remonter des bonnes pratiques et, d'autre part, à réfléchir à la manière de mettre en synergie nos réseaux avec ceux de nos partenaires : service des droits des femmes, ministères de l'agriculture et de la culture, enseignement supérieur, etc. Une première journée interacadémique a eu lieu à Nancy il y a un mois. La prochaine aura lieu le 4 juin à Lyon. Il en est prévu cinq. De nombreuses expériences positives sont menées dans les académies et dans les collèges. Des outils pédagogiques sont élaborés, des liens tissés avec des associations qu'il est intéressant de connaître et de faire connaître.

L'expérience menée à l'académie de Strasbourg de remontée des faits de violence sexués est un exemple de bonne pratique à mettre en valeur lors des journées interacadémiques.

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