Il est injustifié de stigmatiser une singularité française. La quantité de prescriptions est peut-être plus élevée qu'à l'étranger mais les habitudes de prescription pourraient également être appréciées à l'aune de la qualité des soins. Les incidents indirects – par exemple la progression de la résistance aux antibiotiques pour les accidents thérapeutiques – sont beaucoup trop fréquents au regard du niveau de développement de l'Europe. Beaucoup de progrès sont à accomplir dans ce domaine.
Cela dit, les habitudes de prescription passent d'abord par l'attitude individuelle des médecins et les caractéristiques de l'environnement économique. Les données sont difficilement comparables d'un pays à l'autre. À Chypre, 50 % des citoyens sont couverts par une assurance volontaire. En Grande-Bretagne, les médecins sont sévèrement encadrés par les instances locales du National Health Service, le NHS, à travers un système décentralisé où la liste des médicaments prescriptibles varie selon le code postal. L'Espagne, la Grèce et, dans une moindre mesure, l'Italie sont régies par des systèmes analogues. Si elles veulent relever les défis actuels, elles devront changer de méthode. Il est tout de même incroyable que les Anglais traversent la Manche pour venir chercher leurs médicaments en France ou en Belgique.
En résumé, les habitudes de prescription dépendent du régime d'assurance dont le patient relève, de son médecin et de l'organisation du système de soins. Le biais scientifique est la seule façon d'infléchir la situation, par un dialogue avec les médecins, qui doit débuter à l'université. Malheureusement, dans les cours de médecine, les maladies sont décrites en détail tandis que les traitements sont traités en cinq lignes.