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Intervention de Dominique Baert

Réunion du 7 novembre 2007 à 16h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Baert, Rapporteur spécial :

, a indiqué, à titre liminaire, qu'il était regrettable que seules 25 % des réponses à son questionnaire budgétaire lui soient parvenues au délai organique du 10 octobre. Si, aujourd'hui, le taux de réponse est proche de 90 %, la « performance » est toute relative puisque, par rapport à l'année précédente, le volume du questionnaire budgétaire a été réduit de moitié.

La mission Engagements financiers de l'État est un assemblage de crédits à la destination diverse, mais qui ont tous pour objet de couvrir différents « passifs » de l'État. En volume (42,4 milliards d'euros en 2008), elle est la troisième mission du budget général, après les Remboursements et dégrèvements (83,2 milliards d'euros) et l'Enseignement scolaire (59,3 milliards d'euros). Elle regroupe quatre programmes :

– Charge de la dette et trésorerie de l'État. C'est de loin le plus important en volume, avec 40,8 milliards d'euros en 2008, soit 96 % des crédits de la mission ;

– Appels en garantie de l'État. Quoique ses dépenses soient inférieures à 290 millions d'euros en 2008, c'est un programme sensible, puisqu'il porte toutes les garanties que l'État a accordées ;

– Épargne. Ce programme concerne essentiellement les primes versées par l'État au titre de l'épargne logement, qui représentent plus d'un milliard d'euros chaque année ;

– Majorations de rentes. Il s'agit d'un dispositif « fermé » et en cours de lente extinction (227 millions d'euros en 2008).

L'examen de cette mission aboutit à une relative satisfaction, tempérée par trois séries d'incertitudes et de questionnements.

La satisfaction réside dans la performance du programme Charge de la dette et trésorerie de l'État en 2006, qui doit être analysée conjointement à l'examen du compte de commerce Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État – lequel ferait l'objet d'autorisations de découvert de 15 milliards d'euros sur sa première section dédiée à la gestion primaire de la dette et de 1,7 milliard d'euros sur sa seconde section consacrée à la gestion active de la dette.

La politique d'endettement de l'État s'appuie sur des principes généraux désormais classiques : simplicité de l'offre de titres, organisée autour des trois grandes catégories que sont les BTF, les BTAN et les OAT (dette à, respectivement, court, moyen et long termes) ; liquidité du marché, afin d'attirer les investisseurs et de leur donner la possibilité d'effectuer des arbitrages ; transparence, avec la mise en oeuvre d'une procédure de vente des titres qui assure l'égalité de tous les investisseurs et leur mise en concurrence.

Pour 2006, le premier rapport annuel de performances (RAP), joint au projet de loi de règlement, permet de conclure à la performance globalement très satisfaisante du programme. Cette satisfaction ne peut toutefois être que relative car certains objectifs n'ont pas – ou pas complètement – été atteints. Ainsi : la durée de vie moyenne de la dette – 7 ans à la fin 2006 –, n'a pas été réduite, cet objectif étant conditionné à la reprise du programme de contrats d'échange de taux (swaps), suspendu depuis 2002 du fait de la volatilité des taux à court terme et, surtout, de la faiblesse persistante des taux à long terme.

De même, le taux d'annonce par les collectivités territoriales de leurs opérations financières supérieures à un million d'euros affectant le compte du Trésor a atteint 92 % en 2006, soit un niveau à peine meilleur qu'en 2004 et 2005 et inférieur à la prévision de 95 %. Ce résultat n'est néanmoins pas totalement imputable au responsable de programme.

Enfin, le nombre d'incidents d'exécution des opérations de dette et de trésorerie, qui a été supérieur aux prévisions. Les incidents qui dégradent le niveau du compte à la Banque de France (lorsque, par exemple, une contrepartie n'honore pas ses engagements financiers) ont été au nombre de 31, au lieu d'un objectif nul. Les conséquences financières pour l'État ont cependant été minimes, la plus importante étant une dégradation de trésorerie de 8,5 millions d'euros du fait d'un incident sur une opération de pension livrée.

Au-delà de la performance du programme, un premier « coup de projecteur » mérite d'être effectué sur les conditions de financement de l'État pour 2008. Son besoin de financement est, en effet, de plus en plus important et s'élèverait l'année prochaine à 145 milliards d'euros, après 111 milliards d'euros en 2007 (+ 31 %) : outre un déficit à peine réduit par rapport à 2007 (41,8 milliards d'euros à l'issue du vote par l'Assemblée nationale de la première partie du projet de loi de finances pour 2008), les amortissements de dette augmenteraient très fortement pour dépasser les 100 milliards d'euros. Ce besoin de financement serait couvert par les émissions de titres à moyen et long terme (BTAN et OAT) pour près de 120 milliards d'euros, par des annulations de titres par la Caisse de la dette publique pour 3,7 milliards d'euros (annulations permises par l'affectation de recettes de cessions d'actifs) et par l'augmentation, très sensible, de l'encours de titres à court terme (BTF) de plus de 22 milliards d'euros.

De ce programme de financement dépend étroitement l'évolution de la charge de la dette. En 2006, la dette de l'État a – ponctuellement et exceptionnellement – diminué en euros courants, sous l'effet d'un montant particulièrement important de cessions d'actifs – plus de 16 milliards d'euros ont été affectés au désendettement – et de la « mobilisation » de la trésorerie, c'est-à-dire l'abaissement du compte courant du Trésor de plus de 25 milliards d'euros en fin d'année. Cela a permis de quasiment stabiliser la charge nette de la dette de l'État entre 2005 et 2006. Mais ces deux facteurs ne joueront plus – ou beaucoup moins – en 2007 et en 2008 : les recettes de privatisation devraient être beaucoup plus limitées (environ 4 milliards d'euros chaque année) ; les efforts d'« optimisation » de la trésorerie ne pourront plus jouer qu'à la marge, sauf à faire peser un risque excessif sur la continuité financière de l'État. En outre, les années 2007 et 2008 devraient être marquées par une absence de réduction notable du déficit budgétaire et par une remontée des taux d'intérêt, à court comme à long terme.

Dans ces conditions, la charge de la dette de l'État augmentera sensiblement en 2007 (la prévision de la loi de finances initiales devrait être dépassée d'au moins 200 millions d'euros) et, plus encore, l'année prochaine. En 2008, la charge nette de la dette après swaps s'établirait à 40,6 milliards d'euros, en augmentation de 1,6 milliard d'euros par rapport à la loi de finances pour 2007 (+ 4,2 %). Sachant que cette tendance devrait se prolonger dans les années à venir, il y a de quoi nourrir quelque inquiétude.

La mission Engagements financiers de l'État suscite par ailleurs d'autres questionnements, en matière de garanties accordées par l'État. Le programme Appels en garantie de l'État occasionnerait des dépenses en 2008 de 288 millions d'euros, essentiellement dues à des garanties de prêts de l'Agence française de développement (174 millions d'euros) et à des garanties d'aides à l'exportation de la COFACE (52 millions d'euros). Toutefois, c'est moins le niveau de la dépense qui doit attirer l'attention que le montant des encours garantis par l'État, qui sont autant de risques pesant sur sa situation financière. Régulièrement, de nouvelles garanties sont octroyées : en loi de finances pour 2006 par exemple, l'État a repris à sa charge les engagements antérieurement souscrits par le Fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (FGAS) sur les prêts à l'accession sociale et les prêts à taux zéro antérieurs à 2007 ; en loi de finances pour 2007, l'État a accordé sa garantie à l'Agence française de développement sur les versements que cette dernière devra effectuer à la Facilité de financement internationale pour la vaccination. Au total, les encours garantis par l'État dépassent les 60 milliards d'euros, sans même prendre en compte l'encours géré par la COFACE avec la garantie de l'État (plus de 40 milliards d'euros). Il y aurait sans doute matière à examiner de plus près le contenu de ces encours, en particulier ceux bénéficiant des procédures d'aides aux exportations de la COFACE.

Enfin, une autre inquiétude réside dans les reports de charges constatés en 2006 et en 2007 sur le programme Épargne. Ce programme, doté de 1,1 milliard d'euros en 2008, assure essentiellement le financement des primes payées par l'État aux détenteurs de comptes épargne logement (CEL) et de plans épargne logement (PEL). La modification du régime fiscal et social des PEL adoptée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 et en loi de finances pour 2006 (en particulier l'assujettissement à l'impôt sur le revenu des intérêts des « vieux » PEL de plus de 12 ans) a entraîné de nombreuses clôtures de PEL en 2006 et, dans une moindre mesure, en 2007. Il en a résulté une forte augmentation du nombre de primes versées – et donc de la dépense budgétaire en 2006. Cette dernière a atteint 1,4 milliard d'euros, au lieu de 1,2 milliard d'euros prévus en loi de finances initiale. Mais ce montant aurait dû être encore bien supérieur, la loi de finances rectificative pour 2006 n'ayant pas couvert la totalité des dépenses entraînées par le mouvement de « décollecte » de l'épargne logement : les ouvertures de crédits supplémentaires ont été limitées à 220 millions d'euros, entraînant des reports de charges sur 2007 d'environ 500 millions d'euros. Une autorisation de découvert a donc dû être contractée, dans des conditions peu transparentes, auprès du Crédit foncier de France (CFF), établissement chargé de la liquidation des primes pour le compte de l'État.

Pour 2007, les crédits ont été initialement fixés à 1 149 millions d'euros, mais ce montant s'est rapidement révélé insuffisant, la quasi-totalité ayant été consommée dès la fin avril. La prévision d'exécution budgétaire réalisée au 31 août dernier pour l'ensemble de l'année 2007 s'établissait ainsi à environ 1 450 millions d'euros, soit un besoin de financement d'environ 300 millions d'euros. Ajoutés aux reports de charges de 2006, ce sont donc 800 millions d'euros supplémentaires qui restent à ouvrir afin d'apurer les dettes de l'État vis-à-vis du Crédit foncier de France.

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