Je le dis très tranquillement, de manière plus calme et moins injurieuse que certains ne l'ont fait ce matin.
Tout d'abord, pour ce qui est des interrogations sur la perte d'indépendance de l'audiovisuel, l'ingérence politique, les dangers que présenteraient les modalités proposées de nomination et de révocation du Président de France Télévisions, je crois qu'il faut aussi considérer les garanties d'indépendance qui sont prévues. Or précisément, concernant cette dernière question, il existe des garanties, sauf à considérer que le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et les commissions en charge des affaires culturelles à l'Assemblée nationale et au Sénat ne servent à rien. Car l'intervention de ces instances est bien prévue. Je le dis d'autant plus que ce point ne correspond pas à ce que préconisait la Commission pour la nouvelle télévision publique. Mais vous mettez l'accent sur ce sujet alors que, par ailleurs, 95 % des recommandations de la Commission ont été repris dans les projets de loi.
Les débats préalables à notre discussion d'aujourd'hui ont été très longs : ils ont duré environ une année, quelque 250 auditions ont été effectuées, un millier de contributions écrites ont été recueillies, un site Internet a été mis en place… Bref, ce travail en amont et en profondeur constitue un format inédit pour une réflexion ayant associé des parlementaires de toutes les sensibilités politiques : on est loin de l'examen d'un projet de loi le dos au mur et dans l'urgence. Tout au long de cette phase préalable ont été présents, je le redis, des députés, mais aussi des professionnels de la télévision, des scénaristes,… Voilà ce que l'on peut répondre à ceux qui considèrent que le travail législatif est précipité.
Finalement, vos critiques, vos remarques, ne sont pas nouvelles. Très franchement, c'est le même prétexte qu'a utilisé l'opposition au moment où elle a quitté la Commission pour la nouvelle télévision publique. Cela, alors même que les conclusions des travaux de la Commission ont recueilli un très large consensus et que certaines contributions individuelles ont été annexées au rapport.
Pour ce qui est de la question du financement, c'est exactement l'inverse de ce qui est reproché qui est prévu. On va passer de ressources aléatoires et de moins en moins certaines à des ressources beaucoup plus pérennes et plus dynamiques. Le risque ne porte plus sur 800 millions d'euros de recettes publicitaires comme par le passé, mais sur les 350 millions d'euros de recettes publicitaires prévues l'an prochain. En tout état de cause, l'impact d'une éventuelle baisse de recettes publicitaires sera moins grand que celui qui prévalait précédemment. Dans le même temps, je comprends les inquiétudes qui peuvent se manifester, y compris venant de M. Benoist Apparu.
Au nom du groupe UMP, je souhaite poser une question au rapporteur. Ne conviendrait-il pas d'introduire dans le texte une sorte de clause de rendez-vous, dont la périodicité est à discuter ? Il ne me semble pas opportun de la prévoir seulement à l'été 2011, à l'extinction de la diffusion analogique, car le délai pourrait être un peu long pour apprécier l'état du marché publicitaire, pour mesurer certains effets d'aubaine qui soulèvent des questions légitimes, pour évaluer le rendement des deux taxes ou encore, pour prendre la mesure des économies réalisées grâce aux efforts de productivité, à l'extinction de la diffusion analogique et à la création de l'entreprise unique, du fait aussi de l'augmentation des recettes issues des produits dérivés. Le principe de l'annualité pour ce rendez-vous doit-il être retenu ? Ce point est à discuter.
Une autre question se pose également, celle de l'interprétation de la disposition figurant à l'article 1 du projet de loi selon laquelle « La société nationale de programme dénommée France Télévisions est chargée de concevoir et programmer des émissions de télévision à caractère national et local ainsi que des émissions de radio ultramarines ». On retrouve cette référence au caractère « local » ailleurs dans le projet de loi, mais l'échelon « régional » semble avoir été gommé : cela soulève des interrogations s'agissant de la prise en compte de l'organisation territoriale de France 3.
Enfin, même si ce ne sont pas des dispositions d'ordre législatif, je souhaite rappeler que l'esprit de la réforme, c'est aussi de mettre la création et le soutien aux créateurs au coeur des programmes et du nouveau service public audiovisuel. Notre réflexion doit l'intégrer : la télévision a un public mais elle est aussi le fruit du travail de ces créateurs.