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Intervention de France Prioux

Réunion du 26 mars 2009 à 9h15
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

France Prioux, corédactrice en chef de la revue Population à l'Institut national d'études démographiques, INED :

Nous allons résumer les résultats de nos études sur la fécondité française et sur les effets possibles de la politique familiale sur la fécondité en France.

Le niveau de la fécondité française est relativement élevé puisque l'indicateur conjoncturel de fécondité en 2008 a dépassé deux enfants par femme : s'il est de 2,00 pour la France métropolitaine, il atteint en effet 2,02 avec les départements d'outre-mer.

L'augmentation récente de la fertilité n'est pas liée à un changement remarquable de comportement. Elle est due à l'évolution de l'âge à la maternité qui se traduit par une baisse de la fécondité aux jeunes âges et une remontée de celle-ci aux âges élevés. C'est la stabilisation récente de la fécondité des jeunes qui a permis à l'indicateur conjoncturel de fécondité de se redresser.

Ces mouvements annuels de la fécondité semblent influencés par la conjoncture économique. C'est ainsi que la fécondité a été à son plus bas en 1994-1995, période où le chômage était élevé.

Le bilan de la fécondité des générations montre que la descendance finale des générations nées entre 1950 et 1960 est supérieure à 2,1 enfants par femme. On observe ensuite une légère baisse entre les générations 1960 et les générations 1970 : la descendance se rapproche progressivement de deux enfants par femme. Pour les générations suivantes, on ne prévoit pas de nouvelle baisse. On aura peut-être même une légère hausse.

Parallèlement, l'âge de la maternité a beaucoup augmenté. L'âge moyen tous rangs confondus a augmenté de plus de trois ans entre la génération 1950 – 26,5 ans – et la génération 1970 – 29,6 ans –, l'âge moyen pour le premier enfant étant de 27,6 ans, soit un écart de deux ans.

Ce niveau de fécondité place la France dans les tout premiers rangs des pays européens : elle est au deuxième rang derrière l'Irlande, qui a une fécondité traditionnellement plus élevée, mais qui est en baisse d'une génération à l'autre, et se trouve à un niveau proche, en dehors de l'Union européenne, de celui de la Norvège qui a encore une fécondité supérieure à deux enfants par femme. Tous les autres pays ont une descendance finale légèrement inférieure à ce ratio. Les pays du Nord de l'Europe ont une fécondité comprise entre 1,9 et 2 enfants par femme. C'est en Europe centrale – Allemagne, Suisse, Autriche – et en Europe du Sud – Italie, Espagne – que la fécondité est la plus basse.

Le niveau élevé de la fécondité française des générations 1950 à 1960 est en partie liée à une stabilité de la répartition des familles par taille, qui est assez symétrique : 1-2-4-2-1. Sur 10 femmes, 1 seule n'a pas eu d'enfant, 2 ont eu un seul enfant, 4 ont eu deux enfants, 2 ont eu trois enfants et 1 seule a eu quatre enfants ou plus. La proportion de femmes sans enfant pourrait augmenter très légèrement et les mères de quatre enfants ou plus diminuer un peu dans les générations suivantes.

La répartition des familles par taille présente deux spécificités par rapport à nos voisins : une faible proportion de femmes sans enfant et une proportion relativement élevée de femmes ayant au moins trois enfants, ce qui contribue largement à expliquer notre niveau de fécondité.

Le désir d'enfant reste relativement élevé en France. En Allemagne et en Autriche, par exemple, où le taux de fécondité est bas, de plus en plus de femmes disent ne pas souhaiter d'enfant.

La bonne santé de la fécondité française est sans doute liée au fait que les femmes ne se sentent pas obligées de choisir entre fécondité et activité professionnelle, contrairement à l'Allemagne, par exemple, où avoir des enfants entraîne beaucoup plus souvent un arrêt de l'activité professionnelle.

Les différences sociales de fécondité se sont atténuées en France, mais c'est toujours aux deux extrêmes de la hiérarchie sociale que l'on observe la fécondité la plus forte, avec une courbe en J inversée : fécondité la plus élevée chez les ouvriers, la plus basse dans les catégories intermédiaires, et ensuite un peu plus élevée chez les cadres.

En France comme ailleurs en Europe, les femmes les plus diplômées restent plus souvent sans enfant que les autres, mais la différence est faible lorsqu'elles vivent en couple. Il ne semble pas y avoir alors d'incompatibilité entre la carrière et la maternité tandis qu'au Royaume-Uni on observe, au contraire, une forte polarisation de la fécondité chez les femmes les plus diplômées, certaines se « spécialisant » dans la fécondité, d'autres dans l'activité, et c'est probablement aussi le cas en Allemagne.

Je laisse à mon collègue M. Laurent Toulemon le soin de vous parler de l'impact possible des politiques familiales.

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