Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Bernard Kouchner

Réunion du 20 mai 2009 à 16h15
Commission des affaires étrangères

Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes :

Monsieur Rochebloine, les six pays que vous avez cités ne sont pas les premiers à connaître des tensions entre eux ; c'est même la raison pour laquelle il faut qu'ils fassent partie d'un même ensemble. L'Angleterre et la France ne se sont-elles pas combattues pendant 650 ans, l'Allemagne et la France pendant un siècle ? Comme nous avons accepté l'Union à vingt-sept et l'Union pour la Méditerranée, nous avons accepté le partenariat oriental, dans un contexte particulier : le Conseil était présidé pour la dernière fois par M. Topolanek, Premier ministre tchèque démissionnaire, grâce auquel, par ailleurs, le Sénat tchèque venait de voter le traité de Lisbonne. Cela nous a donné l'occasion, pour commencer, d'écouter les uns et les autres. Des projets ont été évoqués et vont prendre corps, mais cela ne contrariera en rien nos autres cadres d'action. Le partenariat oriental est l'une des formes que prend la « politique de voisinage » de l'Union. Il reste que la Russie n'en fait pas partie et qu'il est indispensable de développer le dialogue et la coopération avec elle. Les priorités de ce partenariat oriental seront politiques et économiques, avec une participation européenne au financement de divers projets.

Concernant l'Union pour la Méditerranée, on ne peut nier que la situation est bloquée. Au-delà des quelques tentatives de rencontre entre des ambassadeurs, il sera bien difficile de progresser tant que la situation ne sera pas éclaircie au Proche-Orient. Récemment, avec nos amis égyptiens, qui partagent avec nous la présidence et qui nous avaient réunis à Bruxelles, nous avons décidé d'aller de l'avant. La conférence qui devait avoir lieu à Monaco a été reportée et se tiendra à Paris. Peut-être faudra-t-il procéder autrement, mais encore une fois, tout dépend de l'évolution de la situation au Proche-Orient. Il y a des projets de coopération économique et technique – le plan solaire, par exemple, est très avancé – et nous soutenons toutes les initiatives que prennent les entreprises, mais il n'y a pas d'avancées au niveau politique.

Nous avons signé le 3 décembre à Oslo le traité sur les bombes à sous-munitions, contrairement à certains pays comme la Chine et les Etats-Unis. Le processus suit son cours pour que le Parlement soit saisi du projet de loi de ratification. J'espère que cela pourra être fait en juin, mais je ne peux pas encore vous donner de date précise.

En ce qui concerne l'agence culturelle, le projet avance. Des réunions thématiques sont organisées sous la direction du secrétaire général du Quai d'Orsay, M. Pierre Sellal. Fin juin, nous ferons un premier bilan, notamment sur la forme juridique que cette agence devra prendre ; je pense qu'il faudra passer par la loi, qui dotera l'agence du statut d'établissement public. Et le 3 ou le 4 juillet, au centre culturel de Dakar, à l'occasion du cinquantième anniversaire, j'apporterai des précisions, compte tenu des 20 millions d'euros supplémentaires que nous avons obtenus. Quant au dépôt du projet de loi, qui suppose que les nombreux obstacles soient surmontés, il n'est pas envisageable avant le mois de septembre, au plus tôt. L'une des questions auxquelles il faut répondre est celle-ci : est-ce l'ambassadeur qui doit déterminer la politique de la France dans un pays, aussi bien en matière culturelle qu'en matière de développement ?

Monsieur Lecou, ou bien le Traité de Lisbonne peut entrer en vigueur avant la fin de l'année, ou il n'y aura pas d'élargissement. Oui, certains pays des Balkans occidentaux sont plus avancés que d'autres ; c'est le cas de la Croatie, pays candidat confronté, au seuil de son adhésion, à la Slovénie sur un problème majeur de frontière. Pouvons-nous le régler ? Nous tentons de le faire . Avec l'Union européenne, nous faisons pression pour parvenir à une solution. Comme la Croatie, nous savons bien que la Serbie aura elle aussi un jour vocation à intégrer l'Union européenne.

L'Albanie devrait elle aussi rejoindre l'Union européenne d'ici quelques années ; elle est moins loin qu'on ne le pense d'être prête. En ce qui concerne l'ARYM, c'est le conflit avec la Grèce sur le nom même de Macédoine qui fait obstacle à l'entrée de cet Etat dans l'Union. La France a soutenu la Grèce en tant que membre de l'Union européenne, mais pour le moment les propositions d'appellation qui ont été faites n'ont pas pu faire l'objet d'un accord. Que pouvons-nous faire ? L'ARYM a pour objectif d'ouvrir les négociations d'adhésion avec l'Union, mais encore faudrait-il lever ce blocage.

Quant au Kosovo, ce n'est pas encore à lui de faire une demande, même si soixante pays, dont la France, l'ont reconnu. La Serbie, si elle sait faire preuve de souplesse, démontre également son attachement à une position proche de celle de la Russie – associant contradiction et fermeté, sur le Kosovo comme sur l'Ossétie et l'Abkhazie. Là aussi, c'est un problème politique difficile ; nous attendons, et en même temps nous faisons pression. Sur le terrain, comme me l'ont dit les représentants du Kosovo que j'ai rencontrés hier, les choses se passent bien. Le tribunal de Mitrovica est maintenant à la disposition de la mission EULEX de l'Union européenne.

Madame Fort, sur la Turquie, les choses sont très simples. Le Président de la République a dit à plusieurs reprises qu'il était défavorable à son entrée dans l'Union européenne. J'ai été extrêmement troublé par l'attitude de la Turquie au moment du sommet de Strasbourg et je reste sur mon trouble. Des chapitres sont ouverts dans les discussions entre l'UE et la Turquie, mais il faudra des années pour qu'elle remplisse les conditions requises. Un autre partenariat a été esquissé par le Président de la République, tant pour la Turquie que pour la Russie ; ce partenariat aurait un caractère économique mais pourrait également répondre aux propositions faites par le président Medvedev sur la sécurité en Europe.

Monsieur Lecoq, en ce qui concerne la demande de M. Netanyahu il y a quelques jours que l'Autorité palestinienne reconnaisse le caractère juif de l'Etat d'Israël, nous ne sommes pas du tout partisans de l'introduction d'un nouveau préalable à la reprise du dialogue politique. De même que nous continuerons à défendre l'Etat d'Israël avec détermination, nous continuerons à défendre avec détermination la création d'un Etat palestinien. C'est dans la suite du processus de paix que nous pourrons examiner les précisions qu'il convient ou non d'apporter sur la qualification de ces Etats.

L'expression « human rights » est employée au moins autant que l'expression « droits de l'Homme » ; et franchement, je ne crois pas que le choix entre les deux ait un caractère politique. Les organisations International Crisis Group et Human Rights Watch parlent de human rights, et pourtant elles sont parfois plus exigeantes encore que les organisations françaises. Par ailleurs, concernant la question du Sahara occidental, nous avons en effet favorablement reçu la proposition marocaine, laquelle a rencontré un accueil positif aux Nations unies, parce qu'elle permettait de relancer un processus qui est bloqué depuis trente ans. Nous sommes évidemment tres attentifs à la situation des réfugiés sahraouis et à la question des droits de l'homme dans cette région, même si elle ne relève pas du mandat de la MINURSO...

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion