Messieurs les ministres, je ne m'étendrai pas sur les inconvénients de ce retour de la France au sein du commandement intégré de l'OTAN. Cette démarche risque tout d'abord d'affecter l'image de notre pays dans le monde. Du reste, ce n'est pas le rôle de la France que de se faire l'ambassadeur des États-Unis. D'autres pays européens savent le faire mieux que nous. En second lieu, les contreparties qui semblent avoir été obtenues au sein de l'Organisation sont minimes. Norfolk est une pyramide bureaucratique dont il ne peut pas sortir grand-chose et, pour le dire rapidement, la France n'obtient pas de grand commandement opérationnel. Notre entrée nous est, si je puis dire, très mal payée par les autres partenaires.
Mais le coeur du sujet demeure la question de la défense européenne. À cet égard, deux erreurs ont été commises. La première, tactique, a consisté à déclarer que la France revenait dans l'OTAN afin que les États-Unis reconnaissent la défense européenne. En annonçant cette décision comme certaine, on a coupé court à toute négociation ou contrepartie, tant du côté américain que de celui des autres pays européens. J'observe en la matière que la Maison Blanche a fait preuve d'un silence total, des plus explicites, sur les initiatives françaises en direction de l'OTAN. L'autre erreur, stratégique, me semble plus fâcheuse : à la suite de l'élargissement de l'Europe vers l'Est, l'OTAN a fait de même. De ce fait, l'application de l'article 5 perd de sa pertinence et il n'est vraiment pas certain que l'armée américaine et ses forces nucléaires entrent immédiatement en action en cas de problème aux confins de la Lituanie, par exemple.