a d'abord rappelé que le Sénat avait adopté, le 11 janvier 2007, le projet de loi autorisant le Gouvernement à approuver la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre la France et Monaco, et, le 25 septembre de la même année, le projet de loi autorisant le Gouvernement à approuver la convention destinée à adapter et à approfondir la coopération administrative entre les deux Etats.
Les deux conventions visées, tout comme l'accord relatif à la mise à disposition de personnels de la police nationale française au profit de la Principauté de Monaco à l'occasion d'événements particuliers, dont l'Assemblée nationale a récemment autorisé l'approbation, sont à replacer dans le contexte d'une relation bilatérale franco-monégasque particulièrement dense et profondément rénovée par le traité d'amitié et de coopération du 24 octobre 2002.
L'enclavement de la Principauté et l'imbrication de nos liens expliquent les fortes spécificités de cette relation. Monaco forme avec les communes environnantes et Menton un bassin d'emploi de 100 000 habitants. Sur 44 000 salariés travaillant à Monaco, 30 000 sont de nationalité française, et vivent soit à Monaco soit dans les communes limitrophes françaises.
La convention de coopération administrative est unique en son genre et le reste dans sa nouvelle version, même si celle-ci est beaucoup plus respectueuse de la souveraineté monégasque que ne l'était la convention de 1930 qu'elle va remplacer. La convention d'entraide judiciaire est pour l'essentiel classique, mais comporte aussi des instruments très modernes de coopération.
Avant de présenter les stipulations de la convention de coopération administrative, le Rapporteur a indiqué que, si les deux tiers des salariés de la Principauté étaient de nationalité française, c'était aussi le cas d'une partie importante des fonctionnaires : 267 fonctionnaires français, parmi lesquels 255 appartiennent à l'éducation nationale, sont en effet actuellement détachés à Monaco.
Cette situation est rendue possible par un traité du 28 juillet 1930, qui non seulement ouvre aux ressortissants français tous les emplois publics de Monaco, mais leur en réserve même certains, alors que les Monégasques ne peuvent accéder qu'à une partie des emplois publics français et sous réserve, notamment, de l'accord d'une commission composée exclusivement de Français.
La nouvelle convention rééquilibre les choses, tout en maintenant une situation plus favorable aux Français qu'aux personnes d'une nationalité tierce pour occuper les emplois publics monégasques.
Le traité de 1930 réserve à des ressortissants français les emplois publics les plus importants (ministre d'Etat, directeur des services judiciaires, directeur des relations extérieures, conseiller du gouvernement pour l'intérieur et directeur de la sûreté publique) et tous ceux qui intéressent la sécurité, l'ordre public, les relations extérieures de la Principauté et l'exécution des accords conclus avec le gouvernement français, ceux d'officiers du corps de carabiniers et de sapeurs-pompiers, celui de chef des services fiscaux et une majorité de ceux de magistrats siégeant dans les tribunaux de la Principauté.
La convention pose au contraire le principe selon lequel « les emplois publics en Principauté reviennent aux ressortissants monégasques ». Il est néanmoins prévu que, pour les postes les plus importants, les deux pays se consultent avant que le Prince procède à la nomination, le titulaire ne pouvant être que français ou monégasque.
Cette condition de nationalité s'appliquera aussi aux emplois relatifs à la sécurité et à l'ordre public. La convention accorde en outre une priorité aux ressortissants français pour tous les autres emplois publics non pourvus par des ressortissants monégasques. Les Français pourront occuper ses emplois soit par voie de détachement, soit sur contrat.
Alors que le traité de 1930 limite l'accès de personnes d'une nationalité tierce aux emplois publics monégasques « inférieurs », la convention autorise le recours aux ressortissants d'un autre Etat pour tous les emplois qui ne seraient pourvus ni par un Monégasque ni par un Français. Rien n'empêche que ces emplois soient de haut niveau, mais il n'en reste pas moins que le recours à des ressortissants d'un Etat tiers a vocation à rester exceptionnel.
La convention réserve enfin un traitement moins restrictif que le traité de 1930 aux Monégasques désireux d'occuper un emploi public en France : elle leur donne accès à tous les emplois ouverts aux ressortissants de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, c'est-à-dire « aux corps, cadres d'emplois et emplois dont les attributions, soit sont séparables de l'exercice de la souveraineté, soit ne comportent aucune participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique de l'Etat ou des autres collectivités publiques ».
Le Rapporteur a déploré à cet égard que les ministères concernés n'aient pas été en mesure de lui indiquer le nombre de Monégasques qui occupent actuellement un emploi public en France.
Par ailleurs, la convention pose les fondements d'une coopération administrative classique, dont les formes sont les mêmes que celles que peut prendre la coopération administrative entre la France et de nombreux autres pays (par exemple : missions professionnelles d'étude, échanges d'experts, accueil de stagiaires, organisation de séminaires).
Le Rapporteur a ensuite présenté la convention d'entraide judiciaire en matière pénale. Aujourd'hui, l'entraide judiciaire en matière pénale, civile et commerciale entre la France et Monaco est régie par une convention sur l'aide judiciaire signée le 21 septembre 1949.
La convention signée le 8 novembre 2005 à Paris porte exclusivement sur l'entraide judiciaire en matière pénale : par son article 25, elle abroge les stipulations relatives à ce type d'entraide contenues dans la convention sur l'aide judiciaire de 1949, dont les autres stipulations restent en revanche formellement en vigueur.
Dans les faits, les autres domaines d'entraide judiciaire relèvent désormais du droit communautaire. Les règlements 442001 et 2201203, dits règlements « Bruxelles I et II bis », ont en effet transféré les compétences de négociations en matière de coopération judiciaire, hors droit pénal, de l'action intergouvernementale vers le champ communautaire, retirant aux Etats membres le droit de contracter avec des Etats tiers des obligations portant sur des dispositions ayant fait l'objet de règles communautaires.
Les principes de coopération sur lesquels repose la nouvelle convention sont les mêmes que ceux qui s'appliquent à l'entraide judiciaire en matière pénale de la France avec les nombreux autres Etats qui ont conclu avec elle un accord bilatéral de ce type. Mais la confiance qui existe entre les deux pays, leur proximité géographique et culturelle et celle de leur organisation judiciaire, la présence importante de fonctionnaires et de magistrats français dans la Principauté permettent de nouer une coopération particulièrement approfondie et qui autorise le recours à des méthodes innovantes.
C'est ainsi que la convention pose une série de règles applicables à l'audition par visioconférence de témoins, d'experts, voire de personnes poursuivies pénalement, à l'organisation de livraisons surveillées, à la constitution d'équipes communes d'enquête et à la réalisation d'enquêtes discrètes.
Dans tous les cas, le principe de souveraineté des deux Etats est respecté, les règles applicables étant toujours celles du pays où l'opération commune se déroule, mais tout est fait pour que la coopération soit la plus complète et efficace possible.
Malgré les réticences monégasques traditionnelles en matière de coopération dans le domaine fiscal, Monaco a accepté de collaborer avec la France lorsque les poursuites pénales portent sur les impôts et taxes visés par les conventions fiscales de 1950 ou de 1963 ; la Principauté ne pourra pas non plus invoquer le secret bancaire pour refuser une demande d'entraide judiciaire.
Ces deux conventions modernisent donc les relations entre les deux Etats, qui seront toujours aussi étroites, voire davantage en matière de coopération judiciaire, mais plus équilibrées.
Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a adopté les projets de loi (nos 186 et 767).