Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Thierry Gaiffe

Réunion du 16 décembre 2008 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Thierry Gaiffe :

Avant tout, je précise que le Comité Richelieu est une association apolitique. Mais force est de constater que, par rapport à ses prédécesseurs, toutes couleurs politiques confondues, le ministre actuel prête aux PME une oreille plus attentive, probablement parce qu'il est lui-même fils d'artisan. Son approche de la place des PME dans les marchés de défense est extrêmement volontariste. Auparavant, nous ne bénéficiions pas d'une écoute aussi attentive à la DGA, ce qui prouve les hommes politiques peuvent venir à bout d'une certaine inertie administrative, s'ils en ont la volonté.

En ce qui concerne la dualité de nos activités, j'estime que, dans le contexte actuel, rester dans le seul secteur militaire est une erreur stratégique grave. Certains de mes confrères n'ont malheureusement pas le choix, mais j'invite leurs bureaux d'étude à réfléchir à une ouverture sur le civil – d'autant que, depuis quinze ou vingt ans, celui-ci est plus avancé que le militaire en matière de haute technologie.

Pour prendre un exemple personnel, j'ai inventé, avec des confrères ingénieurs, une nouvelle technologie, a priori destinée au secteur militaire : les centrales inertielles – notre entreprise est la seule PME au monde à en fabriquer – et en France, nous sommes les concurrents directs de SAGEM. À la fin des années 1990, on m'a dit : « ne rêvez pas : vous n'arriverez jamais à vendre à la défense nationale. Nous sommes satisfaits de SAGEM et nous n'avons pas en France les moyens d'avoir plusieurs acteurs – surtout si vous êtes une PME. » Voilà qui avait le mérite d'être clair ! Nous nous sommes donc tournés vers la marine civile, pour laquelle nous avons pu équiper des pétroliers. Une fois un certain chiffre d'affaires atteint, il leur a fallu reconnaître que mon matériel, qui permettait d'aller chercher du pétrole à 3 000 mètres de profondeur, était performant en environnement difficile et qu'il pouvait équiper la marine militaire.

Cet aller-retour entre le civil et le militaire est important quelle que soit la taille de l'entreprise, mais plus encore pour les PME. Notre faiblesse réside dans la trésorerie : nous avons des carnets de commande pour deux ou trois ans, mais lorsque le marché militaire se rétracte, nous sommes confrontés à d'importantes difficultés. Dans le domaine civil, la visibilité est à plus court terme, mais la réactivité est plus forte – or, par nature, une PME doit être réactive. J'incite donc vivement les PME à fonctionner sur un mode dual.

J'en viens à la question sur le patrimoine. Il existe plusieurs cas de figure. Lorsque les capitaux propres atteignent un niveau critique et qu'une PME est positionnée sur un secteur stratégique pour la défense nationale, elle devient une proie intéressante. M. Juillet a été nommé il y a quelques années haut commissaire à l'intelligence économique. Une de ses missions est d'être attentif à ce que les entreprises considérées comme stratégiques ne soient pas absorbées par de grands groupes internationaux, en particulier américains. Onze secteurs d'activités essentiels pour la nation ont été retenus. Pour chacun d'entre eux, une liste de PME stratégiques a été dressée. Bien que chef d'entreprise et président d'une association de PME, dont le tiers travaille pour le monde de la défense, je n'ai eu accès à aucune des deux listes, classées secret défense. J'ignore même si ma propre entreprise est considérée comme stratégique, et si l'on m'empêcherait d'ouvrir son capital si j'en ressentais un jour le besoin. Si une entreprise est stratégique, il faut du moins que ses dirigeants soient informés. Aujourd'hui, il convient de se demander ce qui pourrait se passer dans un contexte de crise. Interdire de vendre fait sens, mais existe-t-il un plan B ?

Une seconde problématique tient au départ en retraite d'un chef d'entreprise désireux de transmettre ses actifs. Les possibilités de transmission ne sont pas claires. Là encore, j'ignore quelles sont les intentions du haut commissaire à l'intelligence économique sur cette question.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion