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Intervention de Daniel Goldberg

Réunion du 5 mai 2009 à 15h00
Suppression du délit de solidarité — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Goldberg :

Pourtant, cet article est clair dans sa rédaction, et je ne prendrai ici que les termes qui nous importent dans ce débat : toute personne qui, par aide directe ou indirecte, facilite le séjour irrégulier d'un étranger peut être incriminée. Aucune exemption n'est prévue, pas même à l'article L. 622-4, pour ce qui concerne l'aide apportée dans le cadre de la fourniture d'un repas ou d'un hébergement, quand il ne s'agit pas d'une situation de détresse absolue.

Les personnes qui viennent en aide aux étrangers en situation irrégulière le font, le plus souvent, en ayant parfaitement conscience de la situation de l'étranger pour ce qui est de la régularité de son séjour en France. Lorsque ces « aidants bénévoles » facilitent un tel séjour, le délit est donc constitué, car intentionnel.

De plus, le fait que l'opportunité ou non d'engager des poursuites soit laissée à l'appréciation du ministère public ne peut être satisfaisant pour les législateurs que nous sommes.

Enfin, des gardes à vue disproportionnées qui créent le désarroi chez celles et ceux qui font oeuvre de solidarité, des inquiétudes professionnelles injustifiées – je pense aux travailleurs sociaux, qui sont inquiétés – et, plus encore, des décisions administratives comme le refus d'accorder la nationalité française à une personne du seul fait qu'elle a hébergé son conjoint, décision que le ministre a lui-même justifiée devant moi, il y a quelques jours, ces faits, relatés dans tout le pays, montrent bien que rien n'empêche que cette loi puisse s'appliquer durement.

Et, vous le voyez, je ne m'appuie même pas sur un certain nombre de jugements qui font polémique, mais sur le souhait de ces bénévoles – je le répète car il me semble que vous ne l'avez pas écouté –, qui nous ont demandé, à nous qui les avons rencontrés, de faire en sorte qu'ils ne soient plus hors-la-loi.

Quel que soit le résultat du vote, nous l'aurons emporté. Notre message, réaliste quant au fait que le droit doit s'écrire clairement pour s'appliquer justement, est aujourd'hui approuvé par une large partie de l'opinion. Le ministre a perdu à vouloir démontrer l'indémontrable. Il s'est perdu dans des justifications qui tenaient plus de la défense de son parcours personnel que de l'analyse concrète de ce que nous proposons.

S'il fallait un dernier élément pour le démontrer, il tient à l'ouverture d'esprit qui lui a manqué et qu'il aurait pu avoir en acceptant les seules modifications que nous proposions à l'article L. 622-4 : elles auraient permis, sans changer les éléments constitutifs du délit, d'exempter de poursuites celles et ceux qui contribuent à préserver l'intégrité physique ou la dignité d'une personne en situation irrégulière. Mais il a tout rejeté, en examinant à peine nos propositions, pour mieux endosser son nouveau rôle de « ministre de fermeture ». Mes chers collègues, il vous est encore possible de faire en sorte que les choses en aillent autrement.

Il est facile de conclure ses interventions en citant Jaurès, comme l'a fait le ministre encore récemment. Pour ma part, je préfère ne pas le trahir et lui rester fidèle, dans la lettre comme dans l'esprit, en rappelant que Jaurès demandait, peu de temps avant sa mort, de « protéger les ouvriers étrangers contre l'arbitraire administratif et policier pour qu'ils puissent s'organiser avec leurs camarades de France et lutter solidairement avec eux sans crainte d'expulsion ». Voilà le message de Jaurès que nous continuons, quant à nous, de défendre aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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