Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen du collectif intervient cette année dans un contexte particulièrement perturbé par la crise économique que nous traversons. C'est ainsi le second projet de loi de finances rectificative, après celui pour le financement de l'économie et avant celui dédié à sa relance, qui traduira budgétairement les mesures annoncées par le Président de la République. À tout le moins en matière de collectifs, l'année 2008 aura été faste, et je m'en félicite puisque c'est le signe de la réactivité du Gouvernement.
Traditionnellement, la discussion du collectif de fin d'année est l'occasion de faire le point sur l'exécution du budget en cours, de procéder aux ajustements nécessaires et d'apprécier la situation de nos finances publiques à quelques jours de la clôture de l'exercice. Cette situation est bien entendu fortement marquée par la conjoncture. Le Gouvernement a persévéré cette année encore, et je l'en félicite, dans la voie courageuse de la maîtrise de la dépense, les ouvertures de crédit, déjà plus limitées qu'en 2007, étant entièrement compensées par les annulations. Au final, l'enveloppe de dépenses n'excédera la prévision initiale que des 4 milliards déjà prévus dans le précédent collectif et uniquement dus à l'accroissement de la charge de la dette du fait de l'inflation et de la remontée des taux d'intérêt. Le poids de la conjoncture se marque surtout à la diminution sensible des recettes, aggravée par l'approfondissement de la crise ces deux derniers mois et désormais évaluée à 7 milliards, ce qui portera le déficit à 51,4 milliards.
Des progrès restent cependant possibles, sur des points qui, malheureusement, ont fait l'objet d'observations récurrentes de notre commission.
Je pense en premier lieu, et en dépit des efforts réalisés en début d'année, aux opérations militaires extérieures. Un très gros effort d'ajustement aux dépenses prévisibles a été conduit ces deux dernières années, avec des crédits inscrits en loi de finances initiale de plus en plus élevés, portés à 475 millions en 2008. Après le troisième décret d'avance, augmentant de 259 millions les crédits dédiés, le rapport de la Cour des comptes relève encore un manque de l'ordre de 100 millions, le coût estimé pour 2008 étant de 852 millions d'euros. En dépit des efforts, la sous-budgétisation reste donc importante.
L'essentiel de cette dépense est en réalité connue d'avance, puisque 90 % des dépenses sont reconductibles d'une année sur l'autre et que l'on a une idée de l'évolution de nos engagements. Ont été inscrits 475 millions en 2008, pour une dépense alors prévisible de 640 millions, 510 millions ont été ouverts en 2009, pour un coût connu en 2008 de 850 millions, et aucune forte baisse dans les engagements n'est à prévoir. Des marges de progrès existent pour rapprocher la dotation initiale de la dépense réelle.
De la même façon, nous avons été amenés à nous interroger sur l'absence de prévision, dans la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », des dépenses relatives aux crises et calamités prises en charge par le fonds national de garantie contre les calamités agricoles, doté par décret d'avance de 23,3 millions en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, sans qu'il y ait eu la moindre dotation en loi de finances initiale. Il semble pourtant qu'il n'y ait malheureusement pas d'année sans gel, tempête, grêle ou sécheresse justifiant le déblocage de crédits d'urgence, et, dès lors, le FNGCA devrait être doté au moins à l'étiage constaté lors des précédentes lois de règlement.
Dernier exemple, enfin, la prime de Noël pour les bénéficiaires du RMI, pour laquelle 378,8 millions d'euros de crédits ont été ouverts par décret d'avance, afin d'en permettre le versement anticipé fin novembre. Si l'on peut se réjouir bien évidemment d'une telle disposition, il serait plus cohérent qu'elle intervienne dès le début de l'année.
Le présent collectif comporte plusieurs mesures nouvelles dont je me réjouis particulièrement car elles contribuent à une clarification des relations de l'État avec les opérateurs, à une plus grande transparence budgétaire, mais aussi à une amélioration de la sécurité juridique des contribuables et, en contrepartie, au renforcement de la lutte contre la fraude fiscale.
Il en est ainsi bien sûr du dégrèvement permanent de taxe professionnelle pour les investissements nouveaux, qui va permettre de soutenir en 2009 les investissements des entreprises et aidera celles-ci à continuer de préparer l'avenir en dépit de la crise. C'est une mesure de bon sens, et un puissant soutien à notre économie dont il faut se féliciter. C'est aussi le prélude à une réforme plus générale, souhaitable, et devenue indispensable, de la taxe professionnelle, attendue depuis de nombreuses années.
A cet égard cependant, monsieur le ministre, il me paraît essentiel de garder un lien entre la fiscalité locale et le territoire. Si ce lien disparaissait, il y aurait un grand risque que, demain, les collectivités ne fassent plus l'effort d'accueillir des entreprises sur leur territoire. Il est important que les communes ou les groupements qui font cet effort en créant les équipements nécessaires, puissent demain bénéficier d'une ressource en lien avec cette activité. (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Autre mesure dont il convient de se réjouir : vont être restitués à la SNCF 594 millions d'euros de TVA indûment collectée, ce qui va permettre le reversement aux régions et le règlement, commencé en loi de finances initiale pour 2009, de la question de la contribution aux services régionaux de voyageurs, trop longtemps source de contentieux. Il s'agit d'une avancée importante, il s'agit aussi du respect par l'État d'engagements pris à l'égard des collectivités régionales à l'occasion du transfert des services régionaux de voyageurs. Je veux y voir un signe positif pour l'avenir des relations entre l'État et les collectivités territoriales.
Je me félicite également de la création d'un cadre budgétaire de gestion par l'État des quotas de CO2, qui en autorisera une gestion dynamique, même si je n'ignore pas les polémiques inévitables quant aux branches qui devront fournir l'effort nécessaire pour alimenter la réserve destinée aux nouveaux entrants.
Puisque j'en suis aux questions industrielles, j'apprécie également qu'aient été pris en compte dans le collectif le problème du consortium des industriels électro-intensifs, ainsi que celui du financement du tarif réglementé transitoire d'ajustement aux marchés, ce qui évitera de se retrouver dans l'incapacité d'assurer la compensation des fournisseurs, et autorisera la poursuite d'un dispositif des plus utile à nos industries.
Sur le premier point, je souhaite bien évidemment évoquer le délai extrêmement long qu'il a fallu à la Commission européenne pour approuver le dispositif – il l'a été au mois d'août seulement, ce qui a malheureusement empêché le consortium des électro-intensifs de lever les ressources bancaires nécessaires à son financement.
Alors que le Gouvernement a fait un effort tout particulier pour le refinancement des banques afin d'assurer le financement de l'économie, je souhaite vivement qu'il fasse preuve de fermeté envers les établissements bancaires de la place pour que les prêts nécessaires au fonctionnement du consortium des électro-intensifs, dont dépendent 120 000 emplois industriels dans notre pays, soient mis en oeuvre dans les meilleurs délais. D'après les indications dont je dispose aujourd'hui, il manquerait plus de 50 % de la ressource à lever.