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Intervention de François de Rugy

Réunion du 16 octobre 2007 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2008 — Exception d'irrecevabilité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

On pourra au moins admettre que votre politique a malheureusement une cohérence, celle de nous mener vers une société de rentiers, où l'héritier est préféré au salarié mais aussi à l'entrepreneur – ce qui est plus étonnant de votre part, mais force est bien de le constater. J'aimerais simplement vous rappeler que les pays européens les plus prospères, ceux qui ont le niveau de vie le plus élevé – quelle que soit, d'ailleurs, la couleur politique de leur gouvernement –, c'est-à-dire les pays scandinaves, sont aussi ceux où la progressivité de l'impôt est la plus forte et la fiscalité environnementale la plus développée. Vous devriez suivre cette voie. Tout cela, nous l'avions dit lors de l'examen du projet de loi « Travail, emploi et pouvoir d'achat ». Vous aviez déjà refusé de nous écouter, et vous le refusez toujours, même si l'on en jugera dans les débats à venir. Notre voix est pourtant celle du bon sens budgétaire et fiscal : on ne peut en effet, année après année, continuer à creuser les déficits en distribuant ainsi des cadeaux fiscaux de plusieurs milliards d'euros.

Ce projet de loi de finances n'est donc pas innovant et il ne fait qu'amplifier les mesures déjà consenties cet été. Ainsi, pour faire face à la décision du Conseil constitutionnel interdisant la rétroactivité de la mesure relative à la récupération des intérêts d'emprunt pour l'acquisition d'une résidence principale – ce sur quoi nous vous avions pourtant mise en garde –, vous proposez de faire passer de 20 à 40 % la possibilité de récupération, que celle-ci se traduise par une réduction ou un crédit d'impôt. Vous avez présenté cela comme une contrepartie à la décision, pourtant prévisible, du Conseil constitutionnel. En l'occurrence, cela ne changera strictement rien à la situation des Français qui ont déjà investi, il y a un an ou plus, dans l'acquisition de leur résidence principale : une fois encore, ils seront exclus du dispositif.

Je me permets par ailleurs de l'observer au passage : la technique qui consiste à dire, quand on ne tient pas une promesse, que c'est la faute du Conseil constitutionnel serait risible dans une cour d'école. Mais quand c'est le Président de la République qui le soutient, alors qu'il est supposé être le gardien de la Constitution, cela devient très grave : je rappelle en effet qu'il a déclaré dans une interview que, s'agissant du non-respect de sa promesse, les Français n'avaient qu'à demander des comptes au Conseil constitutionnel. Ma conviction est qu'il savait très bien à quoi s'en tenir lorsque la mesure a été intégrée au projet de loi TEPA, et que vous avez tenté de faire croire que vous tiendriez vos promesses.

Les Français ne sont sans doute pas dupes de ces artifices de langage. L'heure de vérité approche. Les promesses sur le pouvoir d'achat se sont transformées en cadeaux fiscaux aux plus riches. Face aux franchises médicales payées par tous et à la hausse prévisible – car inévitable – de la fiscalité pour les classes moyennes, le mirage des heures supplémentaires ne suffira plus.

En ce qui concerne l'immobilier, vous feriez mieux de prendre des mesures nouvelles, comme celles que nous avons déjà proposées, et que nous défendrons à nouveau au cours de ce débat. Je pense par exemple à l'isolation des logements neufs comme anciens, et ce afin de ne pas opposer ceux qui acquièrent un logement nouveau et ceux qui en ont déjà un, locataires et propriétaires ; au soutien, par exemple par le biais d'un crédit d'impôt, à l'installation de dispositifs de production individuelle d'énergies renouvelables. Cela aurait le triple avantage de contribuer à l'objectif unanimement partagé – du moins dans les déclarations – de la lutte contre l'effet de serre, de développer de nouvelles filières dans le bâtiment – et d'y créer ainsi des emplois –, et de réduire, enfin, la facture énergétique des ménages, donc de dégager du pouvoir d'achat durable. Vous voyez qu'en ce domaine, d'autres voies que celles que vous avez suivies sont possibles.

Le paquet fiscal du mois de juillet avait déjà été une occasion ratée ; ce projet de budget pour 2008 en est une autre. Pourtant, chacun reconnaît qu'il y a urgence. Sans compter qu'à la crise financière de cet été, que l'on a évoquée tout à l'heure à cette tribune, s'ajoute l'inexorable montée des prix du pétrole, lequel a de nouveau atteint des sommets ces jours-ci avec un baril à plus de 85 dollars.

Qu'attendez-vous pour agir, alors que le Prix Nobel de la paix a été attribué à Al Gore ? Hélas, madame la ministre, vous préférez déclarer votre flamme à M. Jacques Attali en approuvant les propositions de sa commission.

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