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Intervention de François de Rugy

Réunion du 16 octobre 2007 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2008 — Exception d'irrecevabilité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

…que l'on apprend plus difficilement dans des classes plus chargées. Je vois donc mal comment faire mieux s'il y a proportionnellement moins d'enseignants devant les élèves ou les étudiants. Sans compter le millier de postes administratifs qui vont aussi être supprimés dans l'éducation nationale. On pourra toujours multiplier les grands discours sur la sécurité dans les établissements scolaires, mais ils seront sans valeur et sans effet si la présence humaine recule, notamment du fait des suppressions de postes de surveillant ou de conseiller d'éducation.

Autres perdants, les chômeurs de longue durée et les jeunes sans qualification. Avoir supprimé les emplois-jeunes il y a cinq ans ne vous a pas suffi, puisque, aujourd'hui, les contrats d'avenir ou les contrats d'accompagnement vers l'emploi vont être réduits de 30 000.

Comme vous l'avez encore rappelé lors des questions au Gouvernement, madame la ministre, vous avez choisi, au début de l'été, d'encourager les heures supplémentaires – pour un coût exorbitant – plutôt que la création nette d'emplois nouveaux : il faut en effet le dire aux Français, c'est l'un ou l'autre puisque les commandes, et donc l'emploi dans les entreprises, ne sont pas extensibles à l'infini. Imaginez un seul instant ce que l'on aurait pu faire en affectant les 4 ou 5 milliards d'euros dépensés au titre de l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires au soutien et à la création d'activités nouvelles et durables, dans les écotechnologies par exemple. Il y a donc bien, monsieur le ministre, deux politiques différentes en matière d'emploi.

Au passage, s'agissant des heures supplémentaires, avez-vous lu, madame la ministre, un rapport indépendant commandé par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'entreprise Renault ? Ce rapport conclut que 20 % des personnes interrogées dans le technocentre – c'est-à-dire des ingénieurs et des cadres – de Renault à Guyancourt travaillent au-delà du nombre d'heures hebdomadaires prévues, et que l'entreprise aurait reconnu le rôle du dépassement des horaires dans les suicides qu'elle a malheureusement connus. Et il ne s'agit, je le répète, que d'emplois de cadres ou d'ingénieurs : imaginez les effets de votre mesure sur des ouvriers ou des employés déjà soumis à des cadences difficiles. Ce n'est pas céder au misérabilisme que de le dire : tous ceux qui sont allés dans des entreprises savent que certaines d'entre elles imposent de telles cadences, et que l'intensification du travail n'est pas une vue de l'esprit. L'effet de la mesure relative aux heures supplémentaires s'ajoutera ainsi à des conditions de travail déjà bien dégradées dans certains secteurs, comme le bâtiment ou la grande distribution : on peut imaginer quel en sera le résultat s'agissant de la santé au travail. En tout état de cause, je ne crois pas qu'il s'agisse de la meilleure façon de « revaloriser le travail » – votre leitmotiv.

Comme nous vous l'avons déjà dit, les recettes vont pâtir du paquet fiscal, et ce alors que les gouvernements précédents avaient déjà entrepris, à l'initiative, d'ailleurs, de Nicolas Sarkozy – qui était alors à votre place en cumulant vos deux fonctions, madame la ministre et monsieur le ministre, puisqu'il était en charge de l'économie et des finances –, de réduire le nombre des tranches de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, réduction que votre projet de loi pérennise. Nous proposerons au contraire, en soutenant les amendements de nos collègues Jean-Claude Sandrier et Jean-Pierre Brard à ce sujet, d'augmenter, non pas l'impôt sur le revenu, mais le nombre des tranches, afin d'accroître sa progressivité et donc de le rendre plus juste socialement. Cette progressivité, contre laquelle vous luttez avec acharnement depuis cinq ans, met à mal tant l'équité entre les citoyens et les contribuables que la justice sociale. Or je rappelle que l'article XIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui fait partie intégrante de notre Constitution – et j'en reviens donc aux motifs de cette exception d'irrecevabilité –, dispose que la contribution « doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».

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