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Intervention de Michel Barnier

Réunion du 26 mars 2009 à 15h00
Bilan de santé de la politique agricole commune — Questions

Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche :

M. Delatte a évoqué les régions intermédiaires. C'est une question que j'ai mise en débat, le 23 février. Pour répondre à son interpellation et à celle de Mme Vautrin sur la diminution du revenu des agriculteurs, je veux rappeler le contexte économique dans lequel nous travaillons et qui sera celui de 2010. Je n'ai pas la prétention de prévoir la conjoncture des marchés, mais tous les experts nous assurent que les prix sont durablement orientés à la fermeté, compte tenu d'une situation mondiale marquée par la différence durable entre l'offre et la demande de céréales, laquelle augmente dans les pays émergents, et par les accidents climatiques qui frappent certaines régions du monde.

La baisse des aides que nous avons décidée correspond, pour une exploitation de grande culture, à dix euros par tonne, ce qui est parfaitement supportable dans un contexte où les prix s'orientent à la fermeté. Je rappelle que par ailleurs, dans toute l'agriculture, les charges sont à la hausse et les prix à la baisse. Le ministre de l'agriculture que je suis ne peut que constater que la situation d'autres filières est bien plus difficile : le revenu des certains agriculteurs est deux à quatre fois inférieur à celui des céréaliers ; quant aux éleveurs ovins, ils vivent avec 4 000 ou 5 000 euros par ans, et leurs charges augmentent. Telles sont les conditions dans lesquelles les mesures de réorientation ont été décidées. Mais je suis heureux de vous confirmer, monsieur Delatte, que nous prendrons en compte, au terme de la concertation que je mène en ce moment, les difficultés particulières que connaissent les zones intermédiaires.

Mme Vautrin a rappelé le contexte dans lequel nous travaillons : le marché des céréales, totalement ouvert sur le monde, connaît une extrême volatilité des prix, d'autant que les instruments communautaires de régulation se sont effrités avec le temps, quand ils n'ont pas été détricotés. Quant aux outils nationaux, ils sont trop rigides et trop statiques.

Cependant, nous avons commencé à revoir la couverture des risques agricoles. Dans la loi de finances pour 2009, nous avons créé une véritable dotation pour aléas. Mais celle-ci est perfectible, car il est possible de travailler dans le sens d'un aléa économique. Nous expérimenterons ce type d'assurance dès 2010. En outre, j'ai prévu dans le bilan de santé la possibilité d'introduire une couverture des risques dans le premier pilier, ce qui était loin d'être acquis. Je pense que nous aurons l'occasion, par la contractualisation et la consolidation des filières, d'améliorer la situation et de trouver les bons outils, lorsque la loi de modernisation sera discutée par le Parlement, en fin d'année. Mais n'oublions pas l'essentiel : les marchés ne peuvent gouverner seuls l'agriculture. Il faut une régulation européenne et mondiale. Tel est précisément l'objectif du Président de la République.

Mme Branget a soulevé un problème important. Nous devons apporter à la préférence communautaire, qui est loin d'être un gros mot, de nouvelles exigences, notamment pour la vérification des produits qui entrent en Europe, lesquels doivent respecter les normes – notamment pour la santé des consommateurs – que nous imposons à nos producteurs. Mais le problème se pose aussi à l'intérieur de l'Europe. Pour avoir beaucoup travaillé sur les phytosanitaires, très utilisés dans l'arboriculture, je sais que certains produits interdits chez nous sont autorisés ailleurs. Il faut donc que toutes les institutions européennes jouent leur rôle.

Concernant les phytosanitaires, nous sommes parvenus pour la première fois, sous la présidence française, à un accord sur le paquet pesticides, première étape vers une harmonisation. Mais, dans tous les domaines où des pratiques différentes risquent de causer une concurrence déloyale, je suis décidé à rechercher, avec la Commission européenne, de bons outils d'harmonisation.

D'elle-même, la France a décidé de réduire de moitié l'usage des phytosanitaires dans les dix ans qui viennent. Au cours du Grenelle de l'environnement, un consensus s'est établi, pour le paquet Écophyto 2018, entre les agriculteurs, les producteurs et les industriels pour relever ce défi, qui suppose un considérable effort de recherche. Mais l'absence de concurrence déloyale est également indispensable. C'est pourquoi je vous rejoins, madame Branget, sur la nécessité de bâtir des outils d'harmonisation à l'intérieur de l'Union européenne.

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