Monsieur le ministre, ma deuxième question porte sur les modalités de prélèvements des aides réorientées dans le cadre de l'arbitrage ministériel rendu le 23 février dernier.
Les 640 millions d'euros prélevés sur les aides aux grandes cultures pour financer notamment le soutien aux productions animales à l'herbe, ainsi que les 385 millions d'euros prélevés sur toutes les aides pour financer le dispositif de gestion des risques ou certaines productions fragiles, marquent une première avancée que les éleveurs attendaient depuis longtemps. Ils vous ont d'ailleurs témoigné leur satisfaction sur ce qu'ils considèrent comme « un premier pas positif dans la réorientation des aides de la PAC ».
Ce relatif satisfecit ne doit pas faire oublier les grandes insuffisances de l'accord du 20 novembre dernier. D'autant plus que le vernis de l'équité s'effrite si l'on considère que le taux de prélèvement sera uniforme sur toutes les aides aux grandes cultures. En définitif, il sera même particulièrement pénalisant pour des céréaliers dont les exploitations restent de taille modeste et dont les revenus sont fortement soumis aux fluctuations des prix d'achat des céréales. Je pense, bien sûr, à toutes les exploitations spécialisées en céréales des zones intermédiaires qui ont des niveaux de revenus et d'aides bien plus faibles que certaines zones privilégiées.
Un principe élémentaire voudrait qu'une véritable progressivité dans les prélèvements soit mise en place en fonction de la taille, des revenus de l'exploitation et du montant global des aides perçues. Comment concevoir que des soutiens différenciés, prenant en compte la diversité des systèmes de production, se concrétisent par le retrait à tous, sans distinction, de la même proportion d'aides directes, sans tenir compte de leur différence a priori ?
En effet, comment justifier que les céréaliers de certaines zones du Puy-de-Dôme, de l'Indre, ou du Cher sur des surfaces agricoles utiles de 50 à 70 hectares puissent, contribuer selon le même régime qu'un céréalier d'Île-de-France qui exploite plusieurs centaines d'hectares ? Comment justifier que l'on fasse contribuer de la même façon un producteur céréalier d'Aquitaine ou de Midi-Pyrénées ayant 15 500 euros de revenu annuel moyen, et un producteur céréalier d'Île-de-France ou de Champagne-Ardenne disposant de 45 000 euros de revenu annuel moyen ? Les réalités agricoles ne sont pas les mêmes et les revenus de référence des exploitants ne sont pas comparables !