Face à cela, que se passe-t-il ? Les maires paniquent et sollicitent des cabinets pour rechercher les médecins. Que puis-je répondre aux maires d'un canton qui compte quatre médecins, mais dont trois partiront à la retraite dans deux ans ? Donnez-moi des éléments de réponse. Je vous fais confiance ! Il faut savoir que les moyennes sont particulièrement trompeuses. Les moyennes nationales et régionales – en Bretagne, par exemple – sont satisfaisantes, en termes de médecins généralistes. Toutefois, certaines zones sont déjà dépourvues de médecins. En région PACA, nous rencontrons les deux extrêmes. Des secteurs comptent déjà trop de médecins, ce qui soulève d'autres difficultés, alors qu'il en manque dans les Alpes du Sud. Le problème de la permanence des soins n'est que le révélateur des difficultés de demain en matière de démographie médicale, parce que l'on oublie un élément majeur : l'âge des médecins en activité. Des solutions incitatives existent, mais je dois reconnaître que j'en doute quelque peu aujourd'hui. Les maisons médicales donnent satisfaction. La très belle maison médicale de Loudéac a permis de conforter la situation des médecins, qui sont à l'aise et heureux de travailler en partenariat avec les infirmiers et autres professions de santé. Nous n'avons pas pour autant attiré de jeunes médecins.
Je ne crois pas davantage aux incitations financières. Parlons vrai ! Dans les zones à faible densité, les médecins généralistes multiplient les actes et gagnent correctement leur vie. Donner quelques sous en plus ne permettra pas d'en attirer. Aujourd'hui, s'agissant des jeunes médecins, l'arbitrage se situe entre l'argent et le temps. Cela concerne particulièrement les jeunes femmes, qui sont nombreuses, ce dont on peut se réjouir, mais qui ont d'autres exigences que leurs prédécesseurs. Nous devons savoir les attirer. Je doute en particulier de la fameuse carte médicale en peau de léopard. Ainsi, on attirera, au mieux, un médecin dans les petits cantons, mais cela ne permettra pas d'ouvrir un cabinet médical, seule solution satisfaisante, puisque collective.
Je préconise donc des solutions volontaristes. Je suis attaché au principe de la médecine libérale mais je suis convaincu que si elle ne sait pas prendre ce tournant, dans deux ans, trois ans, peut-être même avant, on exigera de nous que nous ouvrions des dispensaires composés de médecins salariés ! C'est précisément pour éviter cela que nous devons savoir adapter les principes auxquels nous sommes attachés. Mon idée est très simple. Il existe des secteurs où la démographie médicale est satisfaisante, voire excessive. Il faut donc y tarir l'installation en appliquant un principe simple : la liberté d'installation demeurerait, mais un médecin ne pourrait s'installer qu'à condition de remplacer un confrère. Le nombre de médecins serait donc maintenu sans toutefois être augmenté. Dans tous les autres secteurs, la liberté serait totale.
Je réponds donc à la volonté du Président de la République qui a expliqué qu'en matière de démocratie médicale il fallait au minimum s'inspirer des négociations entre l'assurance maladie et les infirmières, ces dernières ayant accepté de ne pas s'installer dans les zones où les professionnels sont trop nombreux.
L'assurance maladie ne peut pas rester les bras ballants. Comme le dit le Président de la République, elle n'a pas vocation à tout prendre en charge sans rien contrôler, sans rien réguler.
Nous devons donc adapter nos grands principes de façon à distinguer deux types de zone. Nous inciterons ainsi implicitement les uns et les autres à aller vers les secteurs où nous avons besoin de médecins.
Enfin, que l'on ne nous dise pas que ce n'est pas l'avis des médecins. J'ai eu, au téléphone, le président de l'Ordre de mon département. Les médecins, dans ces secteurs, demandent de telles solutions, parce qu'ils se rendent compte de la situation. J'ai reçu il y a quelques jours dans ma permanence un médecin, pratiquement à bout, qui se demandait quoi faire. Il n'arrive plus à fermer sa porte car les malades débarquent en permanence chez lui. Ce que je crains, c'est que lui et d'autres ne fuient demain, à cinquante-cinq, cinquante-six ou cinquante-sept ans, vers la médecine salariée, qui leur offre un genre de vie plus satisfaisant à bien des égards.
Que l'on ne nous dise pas non plus qu'on verra demain, car nous n'avons qu'une seule occasion de résoudre le problème, c'est ce texte. Si nous loupons cette marche, au terme de notre mandat, nous n'aurons rien à dire sur le sujet. Nous devons donc nécessairement prendre des mesures.
Le bon peuple a parfois le sens des mots fleuris et des expressions qui parlent. Quand la vache est malade le dimanche, dit-on chez moi, le véto, on l'a. Quand c'est la grand-mère, il faut attendre le lundi. Nous devons savoir répondre à ces récriminations peut-être simplistes, mais particulièrement claires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)