Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 18 décembre 2007 à 21h30
Pouvoir d'achat — Exception d'irrecevabilité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Cahuzac :

L'honnêteté nous oblige à dire que les conditions dans lesquelles ce texte est soumis à l'Assemblée nationale et bientôt au Sénat ont été jugées tout à fait inadmissibles sur tous ces bancs.

On peut en rappeler très brièvement l'historique : annoncé lors d'une conversation télévisée avec deux journalistes, ce texte a été, le mercredi suivant, présenté et adopté en conseil des ministres, puis soumis au Parlement dans la foulée. Vous êtes venu expliquer ce texte en commission, monsieur le ministre, alors même qu'il n'avait pas encore été distribué à tous les députés !

Je mets au défi les parlementaires chevronnés présents parmi nous de trouver dans ces dernières années un précédent à une telle précipitation et à une telle désinvolture à l'égard de la représentation nationale. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous le disons tous, même si c'est de façon différente, et je sais que là-dessus au moins nous sommes d'accord au fond.

On ne peut pas nier l'inflation du prix des produits de première nécessité. Or, s'agissant de dépenses contraintes, les économistes nous apprennent que la demande de ces produits ne présente aucune élasticité par rapport aux prix : quel qu'en soit le coût, on est obligé de se déplacer de se loger, de se chauffer, de se nourrir. Là encore, les chiffres sont parfaitement connus : ces dépenses, auxquelles les ménages sont contraints car elles satisfont des besoins vitaux, représentent 40 à 75 % de leur budget.

Il fallait donc faire quelque chose devant l'échec patent du projet TEPA adopté cet été, et dont nous constatons six mois après son adoption que, contrairement à ce qui avait été annoncé, il n'a eu aucune incidence positive, ni sur la croissance économique de notre pays, ni sur le pouvoir d'achat, en dépit du titre trompeur dont il est affublé.

Qu'en est-il, monsieur le ministre, des cinq articles que compte votre projet de loi ?

Le premier a fait dans un premier temps l'objet d'une présentation que j'ai jugé tronquée et manifestant une volonté d'illusion pour tout dire suspecte. En effet, pourquoi ne pas dire tout simplement que les jours de réduction du temps de travail seraient convertis en heures supplémentaires, et que ce ne serait qu'une fois ces heures supplémentaires réellement effectuées qu'un complément de revenu serait versé aux salariés ? Une telle formulation aurait été beaucoup plus simple, directe et franche, et je persiste à ne pas comprendre pourquoi, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous vous obstinez à parler de « rachat » de jours de réduction du temps de travail : il s'agit en réalité de les convertir en heures supplémentaires, le paiement de ces heures supplémentaires se faisant naturellement dans les conditions que nous connaissons, selon qu'existe ou non un accord d'entreprise ou de branche. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Entre une formulation claire et votre présentation, qui vise quelque peu à faire illusion, il y a toute la différence, monsieur le ministre, entre le magicien que vous n'êtes pas et l'illusionniste qu'il ne vous déplaît pas d'être à l'occasion. Il faut bien dire, et c'est un hommage qu'on doit vous rendre, que cela peut marcher à l'occasion.

À cet égard, vous me permettrez de rappeler que vous nous avez déjà présenté il y a trois ans, dans cette enceinte et du banc du Gouvernement, une réforme de l'assurance maladie dont vous nous assuriez, avec les mêmes accents de sincérité qu'aujourd'hui, la même détermination, probablement la même connaissance des textes et la même certitude de bien faire, que c'était « la der des ders », celle qui permettrait de la sauver. Rappelez-vous, mes chers collègues, qu'on vous promettait en 2004 qu'en 2007 l'équilibre des comptes de l'assurance maladie serait définitivement assuré, pour toujours et pour tout le monde. Nous connaissons le résultat : l'année où l'équilibre des comptes de l'assurance maladie devait être assuré est précisément celle qui a vu l'assurance maladie connaître le déficit le plus grave depuis sa création en 1945.

Pourtant, et c'est là que l'illusionnisme a pu fonctionner quelque temps, vous avez su faire accepter aux Français des sacrifices présentés comme le prix de cette réforme. Dois-je rappeler que, sous prétexte de sauver cette sécurité sociale, qui connaît cette année, je le répète, le déficit le plus grave de son histoire, vous avez imposé aux Français le forfait d'un euro par consultation, une augmentation de plus de 15 % du forfait hospitalier, une franchise – déjà ! – d'une dizaine d'euros sur les actes médicaux onéreux.

Surtout, monsieur Bertrand, c'est alors qu'a été institué le fameux dossier médical personnel (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), présenté comme la pierre angulaire de cette réforme structurelle qui devait remédier à tout. Or, mes chers collègues, aujourd'hui, en 2007, ce dispositif ne fonctionne toujours pas, et il ne fonctionnera, dans le meilleur des cas, qu'en 2017.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion