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Intervention de Sauveur Gandolfi-Scheit

Réunion du 18 juin 2009 à 9h30
Dispositions relatives au fonctionnement de la collectivité territoriale de corse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSauveur Gandolfi-Scheit :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi du sénateur Alfonsi, tendant à modifier certaines dispositions relatives au fonctionnement de la collectivité territoriale de Corse, me donne aujourd'hui l'occasion d'aborder une question qui m'a toujours préoccupé. Les différents mandats que j'ai exercés pendant plus de vingt ans, au sein de l'Assemblée de Corse et en tant que conseiller exécutif, m'ont permis de prendre toute la mesure des difficultés inhérentes à la gouvernance en Corse.

Depuis 1982, notre île a connu des évolutions institutionnelles très importantes. Sans en reprendre les grandes phases, qui ont été rappelées par Mme la ministre et M. le rapporteur, il convient de bien comprendre que la Corse a toujours été confrontée à des difficultés institutionnelles majeures. Il serait sans doute exagéré d'imputer à ce seul fait le relatif retard qu'accuse notre île par rapport au continent, mais il ne faut certainement pas le minimiser.

En voulant adapter les institutions aux spécificités corses, bien réelles, le législateur a construit au fil du temps un meccano institutionnel complexe et illisible. L'enfer est pavé de bonnes intentions, dit-on, et aujourd'hui force est de reconnaître que ce système n'a que trop duré. La Corse ne peut s'offrir le luxe d'attendre encore pour régler ses problèmes de gouvernance.

Permettez-moi de vous livrer brièvement quelques remarques générales qui dépeignent bien la situation politique sur l'île.

En 2004, dix-neuf listes se disputaient la région au premier tour et sept listes se sont maintenues au second tour, dont trois étaient issues de fusions. Pire, ces sept listes ont donné naissance à dix groupes à l'Assemblée de Corse ! Voici la preuve, s'il en fallait une, que les listes ainsi constituées ne sont souvent que des listes de circonstance sans cohérence.

On assiste à un émiettement dévastateur de la classe politique corse, et cette multiplication des candidats ne rime pas avec foisonnement des idées. Qui n'a pas constaté que l'absence de seuil de fusion a pu être, par le passé, propice aux épopées solitaires d'hommes politiques mus par des motivations quelque peu éloignées de la défense de l'intérêt général ?

La prime offerte à la liste arrivée en tête au second tour est clairement insuffisante. L'obtention de trois sièges supplémentaires n'est pas en mesure d'offrir à l'Assemblée de Corse une majorité stable. La conséquence est simple : les décisions sont prises au plus petit commun dénominateur. Or, comme vous le savez tous, la collectivité territoriale a la charge de compétences étendues. Il faut sortir de cet immobilisme dévastateur pour tous les Corses, en instaurant une prime majoritaire raisonnablement suffisante pour assurer à la fois une majorité et une bonne représentativité de l'Assemblée de Corse.

Par ailleurs, depuis le statut Joxe de 1991, imposé contre l'avis de la majorité des élus corses, le bicéphalisme qui résulte de la coexistence de l'Assemblée de Corse et du Conseil exécutif conduit à une confusion pour l'ensemble des citoyens.

Tout comme le préconise le rapport Balladur, la modification du mode de scrutin a le mérite de traiter un mal profond. Cette proposition de loi représente également une voie centrale, consensuelle et acceptable pour tous ceux qui ont comme seule ambition de répondre aux besoins de la Corse.

La Corse n'a pas besoin de voir perdurer des batailles de personnes qui ne se démarquent pas d'un point de vue idéologique.

Enfin, je suis convaincu que cette proposition de loi permettra à la majorité élue en 2010 d'affronter avec les meilleurs atouts les problèmes rencontrés par la Corse. Il faut, en effet, pouvoir prendre des décisions fortes et courageuses pour accélérer encore le développement économique de l'île.

Il faut tout autant penser à l'action de la région en matière d'aménagement du territoire afin d'assurer un développement insulaire harmonieux. Il faut aussi intervenir pour permettre à la culture de vivre et de se développer par-delà les frontières.

Tout ceci ne doit surtout pas nous faire oublier qu'il est urgent et nécessaire de redéfinir les conditions de mise en oeuvre de la continuité territoriale. Cette continuité, prévue par les textes depuis trente-cinq ans déjà et dont, je le rappelle, le but premier était de gommer les handicaps de l'insularité en alignant le kilomètre maritime et aérien sur le ferroviaire, n'a jamais été, ou peu, appliquée.

Toutes ces questions majeures, ne pourront être réglées sans cette nécessaire refonte du mode de scrutin. Le mode de gouvernance de la collectivité territoriale de Corse, du fait de l'étendue des compétences qu'elle détient, se doit d'être efficace. La majorité qui émergera au lendemain des élections territoriales de 2010 devra être, non une majorité de gestion, comme on l'entend souvent, mais une majorité d'ambition, courageuse et résolument tournée vers l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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