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Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 15 juillet 2009 à 21h30
Formation professionnelle tout au long de la vie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarisol Touraine :

Le second pilier d'une sécurité sociale professionnelle, c'est évidemment la formation elle-même et sa qualité.

A cet égard je salue certaines mesures comme la tentative de simplifier le système, dont il n'est pas certain qu'elle soit vraiment aboutie ; je doute que les premiers concernés trouvent vraiment le système plus lisible. Des mesures plus convaincantes sont la portabilité du droit individuel de formation ou la création du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, même si l'on peut regretter certaines faiblesses.

Autre volonté positive : celle de s'adresser en priorité aux moins formés. Néanmoins cette volonté peine à se concrétiser ; ainsi vous avez hardiment écarté ce qui était pourtant présent dans l'accord national interprofessionnel sur la formation professionnelle de janvier dernier : le droit à la formation différée. Il s'agit de donner aux salariés n'ayant pas de formation initiale un droit de se former par la suite. Les partenaires sociaux déplorent sa disparition du projet de loi. L'article 40 nous empêche d'agir en faveur de son rétablissement, même si nous avons essayé. Nous espérons que le texte évoluera dans le bon sens.

La troisième composante d'une sécurité sociale professionnelle est la sécurisation des parcours. Qu'est ce que cela signifie concrètement ?

Cela veut dire que l'on fait le pari que la stabilité et l'absence de précarité sont des facteurs positifs d'insertion professionnelle. Le texte issu des débats en commission prévoit ainsi que le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels pourra bénéficier davantage aux salariés précaires ; c'est une bonne chose, mais cela ne me paraît pas suffisant. Dans un rapport remis au gouvernement il y a déjà quelques années, Pierre Cahuc et Francis Kramarz recommandaient la suppression de tous les statuts d'emploi précaire.

Par ailleurs il faut aussi en finir avec les licenciements brutaux, et permettre aux salariés de se maintenir dans l'entreprise tout en engageant des formations qui les aide à se reconvertir. On cite très souvent l'exemple d'Ericsson : en Suède, la mise en place d'un dispositif de ce type a permis à des salariés de ne jamais être licenciés et de se former à d'autres métiers.

De ce point de vue, la responsabilité des entreprises doit être encouragée. Or vous nous proposez une politique incroyablement étatiste. Il s'agit d'un des points faibles de votre texte, et le constat, déjà fait pour ce qui concerne les régions et les partenaires sociaux, vaut aussi pour les entreprises elles-mêmes, quand on voit la place extrêmement réduite, quasiment inexistante, que vous leur accordez. Elles sont pourtant l'un des acteurs centraux des politiques qui s'adressent aux salariés, et il est vain d'imaginer que l'on puisse aboutir à une réforme durable sans implication forte des employeurs.

Enfin, une sécurité sociale professionnelle, c'est un accompagnement personnalisé et différencié très suivi. On peut comprendre que ce sujet n'ait pas été traité dans la version initiale du projet de loi. Toutefois, il y a eu des évolutions, et rien n'est prévu par ailleurs, alors que la situation de Pôle emploi ne peut que nous inquiéter, même indépendamment de la manière dont le Gouvernement semble choisir d'en faire son unique interlocuteur pour la politique de formation.

À mon tour, je veux insister sur la nécessité de territorialiser les politiques de l'emploi et les politiques de formation : la proximité, la cohérence par rapport aux spécificités des bassins d'emplois et des populations sont des conditions indispensables au succès.

Au-delà de l'intérêt que peut susciter ce texte, et des avancées qu'il comporte sur certains sujets, il est surtout décevant : décevant au regard des attentes, décevant au regard des besoins, décevant par rapport aux ambitions qu'il portait. Finalement, ma principale inquiétude est qu'en faisant voter ce projet de loi, vous ne repoussiez à une date très lointaine la véritable réforme pour une sécurité sociale professionnelle, dont notre pays a besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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