Comme vient de le dire M. Urvoas, l'article 7 a déjà suscité de nombreux débats et fait couler beaucoup d'encre. Nous sommes dix-sept à intervenir sur le sujet cet après-midi, ce qui prouve bien le malaise provoqué par cette disposition, y compris dans les rangs de la majorité, comme l'a expliqué Bernard Debré.
M. Urvoas a fait référence au discours du 12 juillet 2006, à Épinal, d'un président qui veut institutionnaliser ce que j'appellerai une équivoque institutionnelle et une pratique démocratique déviante. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nicolas Sarkozy a expliqué à cette occasion, en effet, que le Président de la République gouverne et que, de ce fait, il est responsable, ce qui lui a inspiré cette facilité politicienne : il doit pouvoir s'exprimer devant l'Assemblée nationale sans pour autant être sanctionné.
Si je parle d'« équivoque », c'est que, dans les institutions de la Ve République, le Président ne gouverne pas : il n'est qu'un arbitre. Cet article 7 mettrait un terme au découplage entre pouvoir d'État et responsabilité gouvernementale. Cela va d'ailleurs dans le sens de ce que nous avons déjà constaté. Le Président de la République accorde en effet bien peu de considération à son Premier ministre, qu'il a qualifié de collaborateur. Le Président de la République, qui est élu, non pas par l'Assemblée nationale, mais par le peuple, n'a de compte à rendre qu'au peuple. Seul le Premier ministre est responsable devant l'Assemblée nationale. Si le Président de la République vient devant nous, en étant en quelque sorte irresponsable, il apportera la preuve qu'il a contribué à pervertir nos institutions en faisant du Président le véritable chef de l'exécutif.
Pourquoi accepterions-nous de cautionner une dérive qui a été amplifiée par le gouvernement Jospin – je ne crains pas de le dire alors pourtant que je siège sur les bancs de la gauche ? C'est lui qui a inversé le calendrier électoral et fixé à cinq ans le mandat du Président de la République, le ramenant ainsi à la durée de celui des députés, ce qui rend la dissolution presque impossible.
Pour aller jusqu'au bout de la logique du Président de la République, il faudrait modifier plus significativement notre Constitution. Il faudrait notamment introduire une disposition qui existe par exemple dans certains États des États-Unis, le recall vote. C'est cette procédure qui a amené le gouverneur Schwarzenegger au pouvoir. Il suffit que 12 % des électeurs se rassemblent et demandent un référendum pour révoquer le gouverneur en place. Pourquoi ne pas prévoir une telle mesure puisque nous avons, paraît-il, adopté un référendum d'initiative populaire ? Celui-ci s'apparente surtout, à mon sens, à un référendum d'initiative parlementaire.