Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Yves Censi

Réunion du 11 décembre 2007 à 9h30
Contrats d'assurance vie non réclamés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Censi :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui la dernière étape législative de la proposition de loi que nous avions déposée, mon collègue Jean-Michel Fourgous et moi-même, voilà quelques semaines. On ne peut que se réjouir que ce texte d'origine parlementaire relatif aux contrats d'assurance vie non réclamés et en déshérence ait fait l'objet, à l'Assemblée, de nombreux amendements visant à résoudre certains problèmes induits par son sujet même, et que nos collègues sénateurs, dans leur sagesse, l'aient considérablement enrichi. Dès son entrée en vigueur, la loi aura une efficience réelle dans l'intérêt à la fois des bénéficiaires et des souscripteurs, puisque le nouveau cadre du contrat soumettra les assureurs à des obligations plus précises pour la recherche des bénéficiaires et permettra parallèlement de répondre à des dysfonctionnements qui donnaient lieu à des situations absurdes.

La proposition de loi répond à la nécessité de mettre fin à une situation par trop nébuleuse, en clarifiant les relations entre bénéficiaires, souscripteurs et assureurs, et en apportant des réponses aux dysfonctionnements qui perduraient depuis trop longtemps. Une telle situation n'était pas à la hauteur de l'attrait de ce contrat auprès des Français, l'assurance vie représentant près de 38 % de leur patrimoine financier. La représentation nationale se devait donc de l'encadrer par une loi claire et exigeante.

Deux axes forts se dégagent aujourd'hui du texte, en étroite corrélation avec les défis qui s'imposaient à nous lors de son élaboration. Le premier va dans le sens des intérêts des bénéficiaires d'assurance-vie, en faisant obligation aux assureurs de les rechercher, même si leurs coordonnées ne figurent pas au contrat, et en leur imposant un délai maximal d'un mois pour le versement du capital. Jusqu'à présent, la seule obligation d'information du bénéficiaire d'une assurance-vie résultait de la loi du 15 décembre 2005 : l'assureur averti du décès du souscripteur devait en informer le bénéficiaire, à condition que les coordonnées de celui-ci figurent au contrat, ce qui n'était évidemment pas toujours le cas.

Le deuxième axe encadre les conditions de souscription et d'acceptation du bénéfice de l'assurance-vie. C'est un point majeur de nos débats, qui a permis d'aboutir à une vraie réforme – en fait une modernisation – du principe du bénéficiaire acceptant. Avant la loi, le contrat contenait un déséquilibre au détriment du souscripteur, raison pour laquelle de nombreux stipulants ne souhaitaient pas informer leurs bénéficiaires de l'existence d'un contrat à leur profit éventuel. La présente loi instaure une liberté de rachat, voire la possibilité d'avance et de nantissement, sans pour autant ignorer les droits du bénéficiaire, bien au contraire. Nous avons ainsi introduit un véritable équilibre entre les droits et devoirs des parties : aucune ne pourra plus se sentir lésée, comme c'était trop souvent le cas jusqu'à présent. Nous pouvons nous réjouir d'avoir, ce faisant, renforcé, dans le contrat d'assurance-vie, la confiance qui est l'élément clé d'un produit financier aussi populaire.

Je remercie nos collègues sénateurs, et spécialement le rapporteur Henri de Richemont, pour leur contribution à cette loi, à travers quelques enrichissements particuliers. Tout d'abord, en matière d'information, les entreprises et les mutuelles d'assurances auront désormais obligation de s'informer sur le décès de leurs assurés, notamment en consultant le répertoire national d'identification des personnes physiques. Autre avancée considérable, un dispositif de protection des personnes faisant l'objet d'une mesure de tutelle et de curatelle sera mis en place dès la publication de la présente loi. Enfin, on peut se réjouir de l'amendement du sénateur Marini instaurant un dispositif d'évaluation de l'application de la loi à travers un rapport remis au Parlement avant le 1er juillet 2008.

La réflexion profonde menée sur le sujet depuis des mois a eu l'immense vertu de responsabiliser les professionnels des assurances, qui ont fait preuve jusqu'au bout de leur meilleure volonté. Leur participation active a débouché sur la préparation d'une charte de déontologie au niveau de la FFSA, qui répond de manière efficace notamment au problème de l'information des assurés et des bénéficiaires. Je me réjouis qu'une fois de plus les professionnels aient su être les acteurs des évolutions nécessaires. La volonté du législateur est d'agir dans l'intérêt de tous nos compatriotes, mais aussi de permettre aux professionnels de l'assurance de travailler dans un contexte réglementaire et législatif favorable au développement de leur secteur. Je suis convaincu que nous avons réussi à surmonter ce que certains essayaient de présenter, à tort, comme une contradiction entre des intérêts divergents. La clarté et la définition précise des obligations est bonne pour tous les acteurs. Le rapport prévu par la loi sera très instructif sur cette question.

Cette proposition de loi est également une illustration parfaite d'un travail parlementaire réussi, tant dans la concertation que dans le débat. Les premiers jalons en avaient été posés par la loi de sécurité financière du 1er août 2003, qui avait instauré l'obligation pour les assureurs d'envoyer chaque année au souscripteur une information relative à son contrat. Puis, la loi du 15 décembre 2005 avait imposé de faire figurer dans le contrat une information relative aux conséquences de la désignation du bénéficiaire. Les propositions du Médiateur de la République ont également été déterminantes en jetant les bases de solutions pérennes et adaptées aux problèmes des contrats non réclamés. Je tiens à remercier M. le ministre pour son écoute et son respect de la représentation nationale, le rapporteur Straumann et le président Warsmann, ainsi que le président du groupe UMP, Jean-François Copé, pour son volontarisme. Je veux dire combien les discussions parlementaires ont été constructives et animées par le seul souci – y compris de la part de nos collègues de l'opposition, à l'Assemblée comme au Sénat – de répondre au mieux à la diversité des situations des Français et de faire respecter le principe d'équité inhérent à tout contrat, avec une vigilance toute républicaine.

Mes chers collègues, nous pouvons nous féliciter d'avoir répondu à notre mission première : dans un contexte de réflexion profonde sur nos institutions, et devant la nécessité de renforcer les droits du Parlement, notre proposition de loi illustre parfaitement la capacité des représentants de la nation à apporter des réponses concrètes aux problèmes quotidiens de nos concitoyens, conformément à l'esprit de la Ve République. Je vous propose donc de voter le texte tel qu'il nous revient du Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion