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Intervention de Jean-Louis Borloo

Réunion du 3 juin 2009 à 15h00
Politique énergétique — Débat d'initiative parlementaire

Jean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Si l'émission des gaz à effet de serre met en cause d'autres enjeux que l'énergie elle-même, en matière strictement énergétique, la deuxième rupture porté sur la tendance qui caractérisera l'Occident d'ici à 2020, à une augmentation constante des besoins énergétiques. Or la programmation française est en rupture par rapport à cette tendance puisqu'elle prévoit une baisse de l'ordre de 10 %, alors même que si l'on prolongeait notre tendance historique, en l'absence des mesures prises il y a un an, l'augmentation aurait été de plus de 25 %. Il s'agit donc d'une rupture énergétique majeure, rendue possible grâce à une politique de meilleure efficacité énergétique. Vous en connaissez les principaux aspects puisque vous les avez adoptés en première lecture et entièrement validés dans le cadre des projets de lois de finances et des projets de lois de finances rectificatives – je pense notamment au plan de rénovation thermique des bâtiments.

La France est donc engagée de manière très précise dans la voie d'une amélioration de l'efficacité énergétique et de la réduction de ses besoins énergétiques. Vous pourrez prendre connaissance dans le dossier qui vous sera transmis de l'intégralité des informations en valeur absolue et en pourcentage.

La troisième rupture repose sur le développement des énergies renouvelables. La France recourait historiquement à trois types d'énergie : l'énergie hydraulique ou le bois en matière d'énergies renouvelables – le recours à d'autres types d'énergies renouvelables demeurant marginal –, l'énergie nucléaire et, enfin, le charbon, le pétrole et le gaz. Il faut reconnaître que si la France, en valeur absolue par habitant, fait presque aussi bien que l'Allemagne en matière d'énergies renouvelables – elle est en la matière, contrairement aux idées reçues, un des meilleurs pays d'Europe –, c'est grâce à l'énergie hydraulique puisque le développement des autres énergies renouvelables était, je le répète, jusqu'à ces dernières années, marginal. La baisse tendancielle de l'énergie hydraulique et de l'énergie-bois ne fait donc que rendre encore plus considérable la stratégie actuelle de la France : alors que les énergies renouvelables, centrées sur l'hydraulique et le bois, représentent aujourd'hui 11 % de notre consommation, elles doivent passer à 23 % grâce au doublement de la production de bois-énergie ainsi qu'à la multiplication par six de la géothermie, par douze des réseaux de chaleur et par 400 du solaire photovoltaïque – chiffre, il est vrai, peu significatif, compte tenu de l'extrême faiblesse de la production photovoltaïque actuelle.

Si nous nous sommes engagés dans cette politique pour respecter à la fois les orientations du Grenelle de l'environnement et le paquet « climat-énergie » européen, nous devons la poursuivre non seulement pour assurer notre équilibre énergétique mais également pour répondre au développement de la recherche et des grandes filières professionnelles sur un sujet majeur de la compétitivité mondiale.

Si on prend l'âge moyen des députés, à l'époque de leur naissance, les Français consommaient près de quarante fois moins d'énergie qu'aujourd'hui : une véritable rupture s'impose donc. Du reste, le débat sur l'énergie carbonée est devenu le débat mondial.

Toutes les économies fonctionnent à l'énergie, du moins toutes les industries, ce qui explique le drame de l'Afrique, puisque un quart des Africains seulement ont accès à l'énergie primaire. Nul d'entre vous n'ignore les conséquences que ce fait a en matière de développement, de santé et d'alimentation, sans oublier la dévastation des forêts pour le bois de chauffe. L'essentiel de la compétitivité de demain suppose donc qu'on parvienne à l'économie verte, laquelle se jouera sur les cinq ou six énergies localisées de substitution. Tel est l'objet des mesures que vous avez adoptées récemment, visant notamment à simplifier les démarches administratives en matière de raccordement à l'énergie photovoltaïque, jusque-là véritable parcours du combattant en raison du nombre des autorisations à recevoir, des délais – jusqu'à quatorze mois –, de l'inscription au registre du commerce ou de la déclaration de TVA, le déclarant étant considéré jusqu'alors comme un producteur d'électricité. Les mesures que vous avez adoptées sont si efficaces que le nombre des raccordements mensuels équivaut désormais quasiment au parc installé il y a seulement dix-huit mois ! D'ici à la fin de l'année, le chiffre des raccordements sera quadruplé, voir quintuplé, ce qui explique le chiffre exceptionnel de progression que j'ai cité.

Nous avons par ailleurs réorganisé la recherche appliquée en mettant en place un comité stratégique des grands talents français – l'IFP, le BRGM, l'INES, le CEA et le CNRS – afin de travailler de manière très rapide sur le stockage et le transport de l'énergie ainsi que sur les rapports entre les différents systèmes technologiques, ce qui permettra de développer les capacités d'intelligence entre les différents réseaux et de rendre bientôt préhistoriques les systèmes primaires de distribution d'énergie.

Les autorisations de programme sont désormais données conjointement par le ministère de la recherche et le ministère du développement durable, ce qui est une nouveauté, avec à la clé deux fois un milliard d'euros, sans oublier 400 millions d'euros dans le cadre de l'ADEME, ce qui permet d'augmenter les capacités d'intervention sur ce type de recherches énergétiques.

Enfin, nous conservons notre capacité intellectuelle, scientifique et technologique en matière nucléaire afin d'être capables, le moment venu, de renouveler le parc.

Un document approfondi, je le répète, vous sera communiqué mais la stratégie et les idées sont d'ores et déjà parfaitement claires : nous nous orientons vers une politique de rupture en matière d'émission de CO2 et d'augmentation des besoins énergétiques : alors que ceux-ci augmentaient de 3 % par an jusqu'à l'heure actuelle, nous nous orientons vers une diminution du même ordre, ce qui représente 40 % de la facture pétrolière sur la période. Dans le même temps, nous conservons nos capacités scientifiques tout en nous efforçant de rendre la filière des énergies renouvelables aussi puissante que nous avons rendu, dans le passé, les autres filières énergétiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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