Il n'y avait pas de plan B. L'Union européenne s'est donc immobilisée et les regards étaient portés vers nous. En votant « non » au texte constitutionnel de 2005, nous avions contracté une double responsabilité vis-à-vis de nous-mêmes et vis-à-vis de l'Europe, celle de relancer au plus vite l'élan que nous avions contribué à briser.
Au fond, le référendum de 2005 nous donnait un avantage pour y parvenir : il nous montrait, en négatif, quelle Europe les Français voulaient. Ce que les Français avaient refusé, c'était d'abord la nature constitutionnelle du texte, et l'ombre d'une Europe fédérale qu'elle projetait. Si les Français voulaient de l'Europe, ils demandaient qu'elle soit définie à son plus juste niveau : dans le respect des Parlements nationaux ; dans le respect des différentes traditions sociales et publiques ; dans le respect, finalement, du principe de subsidiarité qui a toujours été, à mes yeux, la clé de voûte de la structure européenne.
La seconde perspective que les Français redoutaient, c'était l'installation d'une Europe impotente et impuissante. Dans la complexité du texte constitutionnel, une menace semblait apparaître. Celle d'une Europe incapable de mobiliser ses vingt-sept membres autour d'un projet, paralysée par des mécanismes de décision inadaptés à sa nouvelle étendue. Les Français ont craint son enlisement, et il n'est pas inconvenant de dire que le traité de Nice les confortait dans leur défiance.
La leçon est historique. Les Français n'ont pas peur de la réforme, pourvu qu'elle aille au coeur des choses. Les Français n'ont pas peur de l'Europe, pourvu qu'elle soit capable d'agir.