Dans un domaine comme la navigation maritime, où la France peut espérer d'importantes reconquêtes de parts de marché – elle en a tant perdu –, il me semble que la solution passe par la recherche de l'excellence. Nous disposons de centres de formation remarquables, pour lesquels l'incertitude n'a malheureusement que trop duré depuis cinq ans, bien que la région Bretagne – avec, derrière elle, tous ceux qui y ont intérêt – les soutienne activement.
C'est sur sa qualification – résultant de la filière d'excellence que je viens d'évoquer – que doit se faire le choix d'un responsable de navire français ou européen. Comme on l'a vu lors du procès de l'Erika, en cas de crise, c'est – indépendamment de l'état du bateau – de la qualité des personnels de commandement que dépend étroitement la sécurité des autres marins à bord comme celle de nos côtes. Sur ce point, nous avons une obligation de réussite.
Face au texte qui nous est proposé, de deux choses l'une : ou bien nous suivons René Couanau et refusons que le capitaine et l'officier en second puissent être des ressortissants européens – au risque de devoir, dès lors, abandonner le GIE fiscal, notre représentation permanente, insuffisante en personnel, n'étant pas en mesure de le défendre à Bruxelles ; ou bien, considérant qu'il est déjà trop tard pour repousser cette idée, nous acceptons que les deux officiers puissent être européens, mais en posant des conditions quant à la qualité de leur qualification. Cela doit alors nous conduire à aborder la question du pavillon européen. Nous hurlons depuis des années au sujet de la concurrence exercée par des pavillons ne respectant aucune règle – ni en termes d'état des navires, ni en termes de qualité des personnels, mal formés et mal rémunérés. L'une des réponses à ce scandale consiste à essayer d'entraîner avec nous, dans l'intention de reconquérir des parts de marché, d'autres pays européens intéressés par cet objectif et partageant notre volonté de le faire au moyen de navires de qualité dirigés par des personnels de qualité. À cet égard, la présidence française de l'Union européenne au second semestre 2008 peut sans doute apporter quelque chose.
Placés aujourd'hui face aux conséquences d'un texte et d'une politique que nous n'avons pas su mesurer en amont, nous sommes coincés. Je propose de sortir de cette situation par le haut : puisque le présent texte sera de toute façon adopté, alors il faut faire du pavillon européen un axe fort de la présidence française.
Il faut aussi qu'on fasse de nos écoles – je pense notamment à celles de Bretagne, que je connais bien – les éléments de l'excellence de la navigation maritime. Comme armateur au nom des collectivités territoriales, je reste persuadée que la navigation maritime française dépend de la qualité des services que nous offrons. Nous avons en effet des parts de marché lorsque nous offrons des services de qualité au niveau des prestations et de la sécurité. C'est vrai en particulier pour les conteneurs, y compris sur les lignes reliant la France et la Grande-Bretagne, alors pourtant que la concurrence est rude et que les prix chez nos voisins Anglais peuvent être particulièrement bas.
Il ne faut donc pas baisser les bras. Il faut refuser de tout tirer vers le bas. Le pavillon de complaisance, l'absence de formation, la réduction du nombre de personnes qualifiées à bord : voilà autant de mauvaises solutions. Puisque nous sommes au fond de la piscine, il est temps de donner au grand coup de pied et de remonter. C'est le pari que je vous demande de tenir, monsieur le secrétaire d'État, car je ne pense pas être dans la majorité dès demain. (Sourires.) Il y a là un vrai challenge : des bateaux et des marins de qualité. Ayons ce soir une pensée, pas simplement compassionnelle, pour ces personnels qui se sont formés, qui n'ignorent rien de ce qui se passe actuellement et qui, devant tant de difficultés, commencent à se demander si nous les connaissons ! Faisons-leur savoir que nous les connaissons, que nous les apprécions et que nous allons faire de la navigation maritime un dossier d'excellence français et européen ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)