Le texte de l'article 3 est suffisant pour comprendre à quel point cet article est inacceptable : « Lorsque le Premier ministre fait savoir au président de l'assemblée qu'une proposition de résolution contient une injonction à l'égard du Gouvernement ou que son adoption ou son rejet serait de nature à mettre en cause la responsabilité de celui-ci, cette proposition ne peut être examinée en commission ni inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée. » Vous apprécierez la précision des termes employés !
Le projet de loi organique impose aux parlementaires de nombreux délais : le président de l'Assemblée « transmet sans délai » les propositions de résolution au Premier ministre, « une proposition de résolution ne peut être inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée moins de huit jours après son examen en commission », « une proposition de résolution ayant le même objet qu'une proposition antérieure ne peut être inscrite à l'ordre du jour avant l'expiration d'un délai de douze mois suivant la discussion en séance de la proposition antérieure », comme nous le verrons à l'article 4.
Or de telles exigences temporelles ne se retrouvent pas en ce qui concerne l'exécutif, l'avis du Premier ministre n'étant enfermé dans aucun délai, ce qui aggrave le déséquilibre des pouvoirs au détriment du Parlement. On peut en outre se demander si l'absence de réponse vaudra accord ou désaccord ; la question mérite d'être posée. Enfin, le Premier ministre pourra ne jamais donner d'avis sur une proposition de résolution, qui sera ainsi enterrée.
Le Premier ministre a donc un pouvoir de vie et de mort sur les propositions de résolution. Il peut les estimer irrecevables sans avoir à se justifier ni à rendre public son avis. Comme les assemblées sont dessaisies de tout débat sur un tel avis, l'exécutif peut ainsi brider le pouvoir législatif sans que les parlementaires disposent d'un droit de réponse.
Enfin, ne serait-il pas souhaitable que le Conseil constitutionnel soit appelé à connaître de l'irrecevabilité opposée par le Gouvernement ? C'est une idée qui a été émise lors du débat sur la révision constitutionnelle à l'été 2008. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans le débat sur les amendements ; il convient de trouver d'autres voies de dialogue que le dépôt d'une motion de censure que semblait préconiser le Gouvernement cet été.