Au regard des objectifs fixés par le Grenelle de l'environnement, votre texte provoque une certaine déception, notamment sur la question du fret.
On s'aperçoit en effet que, si vous aviez bien fixé l'objectif d'une augmentation de 25 % de la part de marché du fret ferroviaire d'ici à 2012, le projet de loi retient un objectif moins précis, puisqu'il regroupe le développement du fret ferroviaire et celui du fret fluvial. Il ne s'agit évidemment pas de contester la nécessité de donner une impulsion nouvelle au développement du fret fluvial, qui a beaucoup diminué au cours des dernières années. Mais c'est également le cas du fret ferroviaire, et un certain nombre de régions ne peuvent, de par leur géographie, prétendre bénéficier du fret fluvial.
C'est la raison pour laquelle il serait souhaitable que l'alinéa 3 de l'article 10 soit précisé, afin qu'il soit bien clair que l'objectif volontariste d'une augmentation de 25 % de la part de marché du fret non routier concerne dans les mêmes proportions le fret ferroviaire et le fret fluvial. L'objectif doit être identique pour ces deux moyens de transport.
Par ailleurs, nous avons assisté, au cours des dernières années, à une baisse très significative de l'activité de fret ferroviaire. Celle-ci a en effet diminué, cette année, de 7 % par rapport à 2007, année au cours de laquelle elle était déjà en recul par rapport à l'année précédente – et l'on pourrait remonter ainsi au moins jusqu'à 2000. Dès lors, l'objectif d'une augmentation de 25 % à l'horizon 2012 est moins volontariste qu'il y paraît si l'on prend pour référence l'année 2008. Il serait donc souhaitable de retenir comme base de référence, non pas l'année du vote de la loi, mais une année antérieure : 2006 serait un moyen terme, mais il serait sans doute souhaitable de choisir une référence plus ancienne.
En faisant cette observation, je veux exprimer ma préoccupation face à une politique d'abandon, en particulier par la SNCF, de l'activité de fret ferroviaire, en tout cas du fret par wagon isolé. La concentration de cette activité autour de trois grands hub aboutit en effet à la fermeture de nombreuses gares. Dans la région Centre, par exemple, 80 fermetures sont d'ores et déjà annoncées, et rien ne dit qu'il n'y en aura pas davantage. Ainsi les entreprises de cette région n'ont plus d'autres perspectives que le recours au transport routier. Or, n'en déplaise à certains, il ne me semble pas que celui-ci contribue au développement durable et à la sécurité de nos concitoyens. Dans mon seul département, l'Indre-et-Loire, la fermeture de l'activité de fret par wagon isolé à Saint-Pierre-des-Corps se traduira par une augmentation annuelle de plus de 20 000 du nombre de camions sur les routes du département.
Et, quoi que l'on puisse en penser, il ne faut pas compter sur le développement des opérateurs de proximité, comme Proxirail, pour suppléer ce manque, car leur développement paraît très hypothétique, les chargeurs refusant toute participation financière. Quoi qu'on puisse en penser, ai-je dit, car on peut se demander pourquoi il faudrait, dans ces secteurs géographiques où des infrastructures de fret existent et où des investissements ont été réalisés, transférer l'activité à des opérateurs privés, dont on demandera en outre qu'ils soient financés par les collectivités territoriales, régions évidemment et départements. Si l'on peut comprendre l'intérêt que pourrait présenter le développement d'opérateurs privés dans des secteurs où les opérateurs publics sont absents et où l'activité de fret ferroviaire est inexistante, il y a tout lieu de s'interroger sur le sens d'un tel développement dans des régions où ils existent, comme c'est le cas à Saint-Pierre-des-Corps.
Enfin, je m'interroge sur les conséquences pour l'aménagement du territoire de la politique qui consiste à concentrer autour de trois hub seulement le développement des lignes de fret, car ce schéma a pour effet d'abandonner la façade atlantique et la desserte de l'ouest du pays. Il me semblerait donc utile de réfléchir à l'utilisation de la transversale Nantes-Lyon, qui passe par Tours et Vierzon, afin de desservir cette partie du territoire. Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, cette transversale est reconnue d'intérêt national et son utilisation présenterait l'intérêt non seulement de développer le fret ferroviaire sur l'ensemble du territoire, mais aussi de participer à la politique d'aménagement du territoire.