Cet article est essentiel dans le volet transport du Grenelle de l'environnement. Le transport du fret est un élément prioritaire pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. On ne peut donc que souscrire à l'économie générale de l'article 10 qui affiche l'ambition de transférer une part notable du fret vers des modes de transport alternatifs à la route.
La tâche est considérable. Comme M. Paul et M. Mamère l'ont rappelé, le fret ferroviaire et le fret fluvial ont reculé au cours des vingt dernières années. En 1974, 46 % du volume de marchandises transportées en France l'étaient par le rail ; en 2000, c'était 20 % et aujourd'hui 11 % seulement. Pour le fret fluvial, la situation est encore plus difficile. Même s'il connaît un regain , avec des taux d'augmentation supérieurs à 10 % depuis le début de la décennie sur la Seine et sur le Rhône, le fret fluvial a du mal à stabiliser sa part du trafic de marchandises, qui est de 2,1 %.
Plusieurs sujets abordés dans l'article méritent un vrai débat. En premier lieu, se pose la question de la régénération des infrastructures ferroviaires. Le rapport Rivier a mis en évidence le délabrement de beaucoup d'entre elles, au point que, faute d'un effort d'investissement important, une part très significative serait menacée. Il faut évidemment mener une politique très volontariste dans ce domaine, et nous y reviendrons à l'occasion de plusieurs amendements.
En deuxième lieu, se pose la question de l'efficacité du transport maritime et donc de l'acheminement vers et à partir de ces ports. Dans ce domaine également, il faut être volontaristes, et surtout se donner les moyens et mettre en place une programmation pour renforcer nos ports. Il serait donc bon que vous acceptiez, à l'occasion de ce texte, ce que vous n'avez pas voulu accepter dans le projet sur les ports que vous avez défendu, c'est-à-dire fixer une date assez rapprochée pour la réunion d'un CIADT qui mette en place un véritable schéma d'amélioration de la compétitivité des ports français.
En troisième lieu, je souligne l'importance du réseau fluvial magistral. Le Gouvernement soutient un certain nombre de grands projets, comme le projet Seine-Nord-Europe, ce qu'on ne peut qu'approuver. Mais sur les 8 000 kilomètres de canaux et de fleuves dont nous disposons, 2 000 kilomètres seulement sont navigables. En commission, l'ancien président de Voies navigables de France, François Bordry, a indiqué qu'on pouvait mettre à niveau une grande partie de ce réseau en consentant un effort de financement d'environ 100 millions par an pendant six à sept ans. C'est certainement difficile dans le contexte financier actuel. C'est pourquoi nous proposerons par amendement que l'État transfère le domaine public fluvial à VNF qui, en le valorisant, sera à même de mener à bien cette modernisation des canaux.
Enfin, vous proposez l'instauration d'une taxe kilométrique sur les poids lourds comme cela existe en Allemagne, en Autriche et en Suisse. Certes, ce dispositif peut menacer la compétitivité des transporteurs. Mais il est à la fois innovant, vertueux et utile. Il permettra de trouver des recettes nouvelles et de moduler la circulation en fonction de la congestion du trafic, pour mieux utiliser les infrastructures existantes. Mais il ne sera utile que si le produit de la taxe sert à moderniser et renforcer les infrastructures. Il conviendrait donc de le verser à l'AFITF. Le Gouvernement s'oriente dans cette voie, mais c'est bien l'intégralité du produit qu'il faut lui verser. Au passage, je précise un propos de M. Brottes : ce n'est pas Gilles de Robien qui a vendu les SEMCA, la décision figurait dans la déclaration de politique générale de M. de Villepin.