Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2008 consacre la justice comme une priorité de l'État avec, pour le sixième exercice consécutif, une hausse significative des crédits de la mission qui lui est dévolue.
Les programmes « Administration pénitentiaire » et « Protection judiciaire de la jeunesse » progressent respectivement de 6,4 % et 1,6 %.
Le budget que nous examinons aujourd'hui est d'abord un budget de consolidation, en premier lieu parce qu'il permet la poursuite du programme immobilier lancé en 2002 dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, la LOPJ. Ainsi, d'ici à la fin de 2008 seront ouverts quatre établissements pénitentiaires représentant 2 550 places, 130 places supplémentaires dans les structures pour la protection judiciaire de la jeunesse – la PJJ – seront créées et trois établissements pénitentiaires pour mineurs, dont j'ai pu mesurer la pertinence, même s'il leur faut encore quelques mois de fonctionnement pour trouver leur pleine efficacité, seront construits.
En outre, ce budget autorisera des capacités de recrutement élevées. Les plafonds d'emplois de l'administration pénitentiaire augmenteront de 842 ETPT et ceux de la PJJ de 221 ETPT.
Enfin, madame la garde des sceaux, je tiens à saluer votre engagement en ce qui concerne les retards de paiement au secteur associatif de la PJJ. Ces difficultés récurrentes seront résolues l'an prochain. Je m'en réjouis car cela aura un impact direct sur la bonne exécution des décisions de justice.
Ce budget prévoit aussi des moyens spécifiques pour faire face aux évolutions de la délinquance. S'agissant, en premier lieu, de la situation des mineurs, quinze centres éducatifs fermés supplémentaires seront ouverts à l'horizon 2009. Les CEF ont en effet démontré leur efficacité. Les chiffres parlent d'eux-mêmes, comme le rappelait M. Couanau : un an après leur passage dans ces structures, 61 % des mineurs accueillis n'ont pas récidivé.
Ce constat global sur les CEF appelle deux remarques de ma part.
Tout d'abord, pour ce qui concerne la maîtrise des coûts de fonctionnement, je souhaite que, pour chaque CEF, soit analysée la possibilité d'augmenter la capacité d'accueil car, actuellement, ces structures reçoivent de huit à douze jeunes, pour un encadrement de vingt-quatre personnes et un coût journalier d'environ 600 euros par mineur, ce qui semble relativement élevé.
Ma seconde observation porte sur la dégradation de l'état de santé des jeunes délinquants. Dans certains CEF, la moitié des jeunes pris en charge font l'objet d'une injonction de soins ou présentent des troubles mentaux. Il est important d'apporter des solutions adaptées, et je tiens à souligner l'initiative que vous avez prise, madame la garde des sceaux, de consacrer 2 millions d'euros à la mise en place de cinq CEF à prise en charge médico-psychiatrique renforcée. Cela répond à une vraie nécessité, et je serai particulièrement attentive aux retours de cette expérience.
Si nous attachons une grande importance à la santé des mineurs, il convient de réserver une attention toute particulière à celle des détenus majeurs. Nous pouvons nous féliciter que des évolutions importantes soient programmées en ce sens. Ainsi, des unités hospitalières spécialement aménagées seront créées. Les premières ouvertures auront lieu dès 2009 à Lyon et à Rennes. Parallèlement, les placements sous surveillance électronique, fixe ou mobile, seront encore développés. Enfin, un projet de loi sur les délinquants dangereux sera prochainement examiné.
Je souhaite que les réformes engagées soient aussi l'occasion de parvenir à l'instauration d'un véritable partage d'informations entre les différents acteurs du monde carcéral, afin d'éviter que ne se reproduisent certaines erreurs, telles que la prescription de médicaments contre les troubles sexuels à un pédophile récidiviste quelques jours avant sa libération.
Je voudrais terminer en soulignant que l'augmentation constante des crédits de la justice est la condition sine qua non de la réussite des réformes votées depuis 2002 pour restaurer l'autorité républicaine. Mais ces hausses seraient vaines si elles n'aboutissaient pas à l'amélioration des conditions de détention et de réinsertion. Dans cette optique, madame la garde des sceaux, la prochaine loi pénitentiaire devrait être une avancée notable. Je souhaite d'ailleurs, conformément aux préconisations du comité d'orientation, qu'un parcours de mobilisation soit mis en place pour chaque détenu, afin de mieux connaître son profil social et psychologique.
L'univers carcéral sera donc au coeur de nos débats dans les semaines et les mois à venir. L'effort budgétaire consenti est important. Il s'accompagnera d'une nécessaire réflexion de fond sur les conditions de détention, l'utilité de la peine et la dignité des détenus et du personnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)