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Intervention de Christian Paul

Réunion du 25 novembre 2008 à 21h30
Communication audiovisuelle et nouveau service public de la télévisionnomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Paul :

Cette commission a servi de paravent au texte définitif, tricoté et détricoté par des amendements snipers, nouvelle catégorie de frappe chirurgicale sur la télé publique, qui vit en quelque sorte le martyre de saint Sébastien. Dans Le Monde d'hier, du reste, huit membres éminents de la Commission Copé viennent de crier à la trahison tant ses travaux, qui n'étaient pas parfaits, sont dénaturés par les amendements de l'UMP.

L'horreur politique s'illustre encore par un climat d'ingérence permanente, celle du Président, la vôtre, celle de quelques parlementaires, monsieur Lefebvre, habitués de l'intimidation sur les agences de presse, les rédactions et les chaînes.

On retrouve autour de ce texte et des pratiques actuelles de l'UMP l'odeur incommodante des années de plomb de l'ORTF, celles d'Alain Peyrefitte dans les années 60, celles de Michel Poniatowski dans les années 70. On voit ainsi arriver au fil des amendements la tentation, ici de supprimer le journal national de France 3, là de fusionner les chaînes parlementaires, comme s'il y avait au fond trop d'information, trop de débat, peut-être trop de politique et sans doute trop d'impertinence.

Le comble a été atteint avec les conditions de nomination et de révocation du président de France Télévisions.

Il y a là, madame la ministre, l'abandon d'un lent progrès démocratique, lent mais continu, marqué par l'émancipation des médias, des radios, des télévisions, vers plus de liberté, pour la presse écrite également. Depuis la Libération, à chaque étape, gouvernements et majorités ont considéré que les entreprises de la presse et des médias réclamaient un statut protecteur et que les médias publics n'étaient pas des entreprises publiques comme les autres. La première loi sur les médias dans la France du XXIe siècle renonce à ce parfum de liberté, imparfaite sans doute, forcément inachevée, mais tellement essentielle.

Pour conduire cette politique choquante et dangereuse, Nicolas Sarkozy a pratiqué l'une de ces fausses transgressions qui lui tiennent lieu de tactique : la suppression de la publicité comme piratage des idées de la gauche, comme si, pour la gauche, le premier critère d'une bonne télévision était la présence ou non de la publicité.

Non, pour nous, la jauge d'une bonne télévision, c'est la liberté, celle dont le nom s'écrit grâce à l'indépendance des rédactions, au non-conformisme des esprits, au professionnalisme des journalistes, en un mot, grâce au pluralisme des médias.

En nommant lui-même le président de France Télévisions, Nicolas Sarkozy a cédé avec gourmandise à la tentation monarchique. En s'octroyant le pouvoir de le révoquer comme un valet, il dispose d'un pouvoir de sanction permanent, comme un lacet passé autour du cou.

Voilà pour l'horreur politique.

Il y a aussi l'erreur économique, et je voudrais brièvement énoncer les trois fautes, il y en a sans doute d'autres, qui vont déstabiliser la télévision publique et de nombreux médias privés.

La première, la principale peut-être, c'est l'insécurité budgétaire.

Je veux d'abord viser cette pseudo-clause de sauvegarde qui figure à l'article 18. En refusant de donner à la compensation, nécessaire après la suppression de la publicité, un caractère intégral et de faire figurer ce terme dans le texte comme nous l'avons demandé en commission, le Gouvernement et la majorité, réduite ce soir à moins de députés qu'il n'y a de doigts à une main, signent un nouveau meurtre parfait, l'étranglement budgétaire en différé. On a l'apparence de la justice mais la réalité de la précarité budgétaire. On rejoue la partie chaque année dans un dialogue qui verra les patrons des chaînes publiques aller mendier à Bercy, sans doute en échange de nombreuses contreparties, l'allocation budgétaire de l'année qui suit.

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