Une dépendance politique d'abord, puisque le président de France Télévisions sera nommé par le Président de la République, au nom du pragmatisme, lequel est devenu une espèce de sésame pour le Président de la République, sa majorité et son gouvernement. Puisque le CSA n'est pas indépendant, nous dit-on, autant que le président de France Télévisions soit nommé directement par le Président de la République. Au nom du pragmatisme, on institue le fait du prince ! Mais si le CSA n'est pas indépendant, pourquoi ne pas réformer cet outil de régulation et trouver un système qui permette de garantir son indépendance ? La proposition du Gouvernement est une régression démocratique et, avec mes collègues de gauche, nous saisirons le Conseil constitutionnel sur ce point.
Et que l'on ne vienne pas nous dire que le futur président pourra être indépendant : le fait qu'il soit nommé en conseil des ministres et que son mandat soit aligné sur celui du Président de la République crée entre ces deux personnages un lien consubstantiel qui annule effectivement toute indépendance.
Ce texte institue ensuite une dépendance économique. Lors de l'examen de la loi de 2000 sur l'audiovisuel, nous avons été, c'est vrai, un certain nombre à demander la suppression de la publicité sur la télévision publique. Mais il s'agissait pour nous de renforcer cet élément constitutif de la démocratie qu'est une télévision de service public, laquelle doit garantir l'indépendance, le pluralisme et la connaissance. Au lieu de cela, on brade, on rétrécit le service public et on fait des cadeaux à ses amis (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), en acceptant finalement l'idée selon laquelle la télévision n'est qu'un outil qui permet de « vendre du temps de cerveau disponible », comme l'a dit l'ex-PDG de TF1. Car le financement du service public audiovisuel est en dessous de tout !
On vient nous expliquer que cette loi était urgente, qu'il fallait sauver le service public, menacé par la dictature de l'audimat. Mais savez-vous que la réforme de la BBC, qui a donné naissance au BBC Trust, l'un des plus grands services publics audiovisuels de l'Union européenne, a abouti en 2007 après, non pas neuf ou dix mois de non-concertation, mais après quatre ans de discussion et pas moins de vingt-six séminaires gouvernementaux, auxquels ont été associés les téléspectateurs ? Aujourd'hui, la BBC peut être citée en exemple. J'ajoute que la redevance et la taxe prélevée sur le chiffre d'affaires du secteur privé sont bien plus élevées au Royaume-Uni qu'en France.
Ces quelques éléments de réflexion, que nous aurons l'occasion de détailler à la tribune, conduisent le groupe de la Gauche démocrate et républicaine à soutenir avec force la question préalable défendue par Patrick Bloche. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)