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Intervention de Jean-Patrick Gille

Réunion du 12 juin 2008 à 9h30
Modernisation du marché du travail — Texte de la commission mixte paritaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Patrick Gille :

La négociation, quoique imposée par la loi de janvier 2007, n'est pas suffisante et ne peut être automatique validée par le législateur.

Notre rôle a été de clarifier, de préciser et de sécuriser l'accord, en nous assurant qu'il renforce également le contrat social. Le groupe SRC s'est ainsi mobilisé pour que le CDI soit reconnu par la loi comme la forme normale et générale du contrat de travail, pour définir la période d'essai et pour préciser que la rupture conventionnelle ouvre bien droit à l'assurance chômage de droit commun pour le salarié.

En commission mixte paritaire, nous avons également lutté pour revenir sur l'amendement de la majorité sénatoriale qui supprimait l'appel en cas de litige lors d'une rupture conventionnelle. Notre collègue Alain Vidalies a brillamment démontré que non seulement cet amendement était contraire à la volonté des syndicats, mais aussi et surtout qu'il était inconstitutionnel et qu'il risquait d'introduire un précédent dangereux. C'est pourquoi son maintien nous aurait conduits à revoir notre vote, comme nous avons été tentés de le faire après le changement d'attitude du Gouvernement vis-à-vis des partenaires sociaux. Je veux parler des annonces de M. Bertrand concernant l'offre raisonnable d'emploi, le travail du dimanche – dont l'entrée en vigueur a été différée – et, surtout, le démantèlement des 35 heures dans le cadre de négociations entreprise par entreprise. Le président Méhaignerie a eu la sagesse de calmer l'ardeur de ses troupes ; bien lui en a pris.

Pour notre part, nous avons voulu nous en tenir à une transcription fidèle de l'accord. C'est pourquoi nous déplorons que celle-ci ne soit que partielle. En effet, les innovations de la loi ne suffisent pas à mettre en oeuvre une véritable « flexicurité », dont l'accord contient pourtant tous les éléments. Nous transcrivons ainsi un accord déséquilibré, qui fait la part belle aux attentes du patronat, renvoyant une partie des avancées obtenues par les syndicats au domaine réglementaire et aux négociations sur l'assurance chômage et la formation professionnelle. L'équilibre de l'accord dépendra donc des négociations à venir, d'où nos craintes, compte tenu de la manière dont elles s'engagent.

Nous nous apprêtions à célébrer la naissance de la flexicurité à la française dans le cadre d'un dialogue social renforcé. Mais les partenaires sociaux ont été trahis et l'accord sur la représentativité, qui servira finalement de véhicule législatif au démantèlement des 35 heures, risque de sonner le glas de cette démocratie sociale que vous vantez tant, alors que vous êtes en train de l'assassiner.

Enfin, votre projet de loi n'est pas à la hauteur des difficultés persistantes que connaît notre marché du travail : pénurie de main-d'oeuvre qualifiée d'un côté, précarisation croissante, qu'il risque encore d'accentuer, de l'autre. L'amélioration statistique de la situation du chômage ne saurait masquer l'augmentation du nombre des travailleurs pauvres dans notre pays. Or le projet de loi ne répond absolument pas à cette préoccupation.

Bref, nous voyons dans cette modernisation l'accompagnement fataliste de la mondialisation, qui tient plus d'une dérégulation du marché du travail inspirée du modèle anglo-saxon que de la volonté de sécuriser les parcours professionnels. Sans aller jusqu'à dire que le projet de loi modifie l'équilibre de l'accord, il en est, pour user d'une analogie musicale, une réduction en mineur, qui en ternit l'éclat et en réduit la portée. C'est pourquoi, tout en saluant le travail des partenaires sociaux, le groupe SRC s'abstiendra…

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