Les fonctionnaires ont de multiples possibilités d'être détachés dans des collectivités publiques, d'être mis en disponibilité dans des organismes privés, d'être mis à disposition par convention… Les subtilités juridiques ne manquent pas pour faire en sorte qu'un fonctionnaire finisse presque par ne plus appartenir à la fonction publique. Nous le savons bien, du moins ceux d'entre-nous qui, fonctionnaires, sont détachés ou en disponibilité – dispositif souvent critiqué.
De leur côté, nos collectivités font appel à un certain nombre de prestataires privés – régies de quartiers, CAT, ateliers protégés – parce que nous avons conscience qu'il nous revient de remplir une mission sociale. Au-delà de l'embauche des fonctionnaires, nous devons donner du travail à des gens dont les compétences relèvent de l'économie sociale et qui peut-être ne trouveront pas d'emploi au sein de la fonction publique, soit parce qu'ils n'ont pas la capacité de réussir un concours, soit parce qu'ils sont trop fragiles sur le plan physique ou sur le plan psychologique.
Il existe aussi une volonté forte de l'État de « boucler » l'intercommunalité. Ce texte vise à contribuer à la simplification du millefeuille administratif avec ses communautés de communes qui, petit à petit, développent des compétences nouvelles – prestations communes, par exemple, pour lesquelles on met à disposition des fonctionnaires, des regroupements de personnes, les unes travaillant pour une commune, les autres pour une autre. Or nous sommes en train d'inventer un échelon supplémentaire, une machinerie lourde alors que toutes les possibilités existent déjà depuis le niveau le plus bas – j'ai évoqué les prestations – jusqu'au plus haut niveau – les contractuels : quand on ne trouve pas un fonctionnaire de haut niveau dans un concours, on peut faire appel à un contractuel par une dérogation en général accordée très facilement.
J'avoue donc ne pas très bien comprendre. J'en reviens à l'exemple que j'ai cité au cours de la séance précédente, de ces postiers relevant aujourd'hui pour moitié du droit privé et pour moitié du droit public. Ainsi, des 150 postiers que j'ai reçus il y a trois jours, ceux relevant du droit privé étaient bien moins payés que ceux relevant du droit public. La question se pose donc du délabrement programmé de la fonction publique.
On note par ailleurs une terrible confusion des genres. Ainsi, j'ai embauché dans ma commune un agent pour encadrer un certain nombre de personnes. Il est sapeur-pompier et auto-entrepreneur. Il pourra être mis demain à disposition d'un groupement d'employeurs pour travailler au sein d'une autre structure. Nous sommes en train de découdre complètement le statut de fonctionnaire. L'agent dont je parle finira par ne plus l'être : il exercera quatre ou cinq activités qui toutes relèveront d'un droit différent.
Nous serons donc plongés dans une confusion totale qui aboutira à la disparition de la fonction publique (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…