Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment où nous engageons l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 et où nous allons axer beaucoup de nos remarques et amendements sur des questions financières, je souhaite rappeler, dans la droite ligne des ordonnances de 1946, que la finalité de tous nos débats vise avant tout à permettre à tous les Français et toutes les Françaises de vivre le plus longtemps possible en bonne santé, de profiter des joies de la famille et du bonheur d'une retraite méritée. Nous avons jusqu'à ce jour plutôt bien réussi dans cette voie, avec des données de mortalité qui nous placent parmi les meilleurs au monde, une politique familiale qui est souvent copiée et un système de retraite qui préserve les vieux jours de nos aînés.
Si je rappelle ces quelques éléments préliminaires, c'est simplement parce que, en corollaire de ce système envié par de nombreux pays, il existe un problème de financement : les coûts s'envolent, au risque de mettre à mal l'ensemble de notre édifice de protection sociale.
C'est dans ce contexte que vous nous proposez, mesdames et monsieur les ministres, un texte volontaire et réaliste.
Volontaire, car vous ne vous contentez pas de nous présenter un énième plan de sauvegarde de la sécurité sociale. Vous proposez, grâce à des réformes structurelles courageuses et ambitieuses, d'adapter notre modèle social aux enjeux des prochaines années avec un seul but : le maintien de la qualité de prise en charge en matière de santé.
Réaliste, car vous ne vous contentez pas d'explications théoriques et de mesures abstraites. Forts de nos acquis sociaux, vous proposez des actions concrètes pour l'ensemble des secteurs concernés, ce qui rend possible une maîtrise des coûts pour 2008.
J'axerai mon propos autour de trois points : le juste soin au juste prix, la démographie médicale et la recherche de nouvelles voies de financement.
Dans votre projet de loi, plusieurs articles visent soit à améliorer la connaissance médico-économique sur les stratégies de soins – c'est l'objet de l'article 29 –, soit à maîtriser des coûts d'intervention en fixant leur cadre conventionnel – c'est l'objet des articles 28, 30 et 31.
Si cela est essentiel pour le développement d'une maîtrise des dépenses médicalisées, je reste cependant plus réservé vis-à-vis de l'article 25. Celui-ci permet en effet aux pouvoirs publics de retarder l'application d'engagements conventionnels au constat de l'absence de dépassement de l'ONDAM ou en l'absence de déclenchement de la procédure d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie. Ce dispositif me semble, sur le plan technique et éthique, difficile à mettre en place. Il faudra, en effet, être en mesure d'analyser de manière objective les raisons de ce dépassement et surtout pouvoir le justifier par une conduite peu vertueuse des professionnels. Il sera nécessaire de leur apporter des garanties, et notamment d'appliquer avec discernement et prudence l'article 25.
Pour la démographie médicale, nous nous accordons tous à reconnaître qu'elle constitue l'enjeu majeur de notre système de soins pour les dix années à venir. S'il en est ainsi, c'est tout simplement parce que, dans les années 80, les gouvernements successifs ont privilégié, pour lutter contre l'augmentation des dépenses de santé, les actions visant à diminuer l'offre de soins plutôt que d'agir sur la demande. Ainsi, on a décrété que la France se contenterait de former moins de 4 000 médecins par an quand, dans le même temps, de nombreux experts annonçaient que la demande de soins allait progresser, en raison notamment du vieillissement de la population. Résultat : vingt-cinq ans après, la France manque de médecins, alors que l'on a empêché tant de jeunes, en raison d'un numerus clausus drastique, de faire le noble métier auquel ils se destinaient.
Madame la ministre de la santé, comme vous le rappeliez le 11 octobre dernier devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, « l'évolution de la démographie médicale n'est en rien une fatalité, mais elle doit être l'occasion de réfléchir aux moyens de mieux assurer la proximité et la permanence des soins ». Nous partageons votre analyse, et il va falloir beaucoup de pédagogie et de dialogue pour qu'ensemble, avec les jeunes médecins directement concernés par l'incurie des pouvoirs publics des années 80, nous trouvions la bonne manière d'arriver à une répartition équilibrée de l'offre de soins sur tout le territoire. Les maisons médicales sont à cet égard une réponse intéressante.
Enfin, concernant la recherche de nouveaux financements, permettez-moi de vous dire, mesdames et monsieur les ministres, que vous osez enfin, avec la franchise médicale, aborder le problème des coûts de fonctionnement de notre système de protection sociale par le bon côté. Ne nous leurrons pas : les coûts ne diminueront pas ! Ils ne peuvent qu'augmenter et, si nous voulons maintenir nos bons indicateurs de santé et investir dans le plan Alzheimer, dans les soins palliatifs et dans la lutte contre le cancer, il nous faut trouver des recettes nouvelles.
Lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy a proposé aux Français la création d'une franchise médicale. Aujourd'hui, vous nous invitez à la mettre en place. Nous ne pouvons qu'y être favorables, car elle va dans le sens de la responsabilisation du consommateur, tout en préservant les personnes les plus fragiles, qui en seront exemptées.