On en a le droit ! Mais enfin…
À y regarder de près, madame la ministre, nous pourrions plutôt vous accuser, comme l'a fait Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, de publicité mensongère. Vous souhaitez mobiliser l'ensemble des acteurs, des bailleurs aux collectivités territoriales, en passant par les locataires et les salariés, qui paient le 1 % logement, à l'exception du principal intervenant : l'État !
Le budget 2009, qui, je l'ai indiqué, préfigurait en réalité la loi MOLLE, est sans appel : baisse de 720 millions en 2009 et perspectives guère encourageantes pour 2010-2011. Un collectif d'une quarantaine d'associations, de la Croix-Rouge à Emmaüs en passant par les Restos du Coeur mais aussi la CNL, avait dès novembre dénoncé un « désengagement inacceptable de l'État » : moins 351 millions pour la politique de la ville, moins 330 millions pour les programmes d'amélioration de l'habitat, moins 50 millions pour les aides à la personne. Certes, entre-temps, il y a eu le plan de relance. Mais, en réalité, celui-ci ne compense même pas le désengagement de l'État sur la seule année 2009 ! C'est dire sa faiblesse.
S'agissant de I'ANRU, le Président de la République a annoncé, à Douai, l'injection de 200 millions. La belle affaire, quand on sait que le financement de cette agence par l'État a chuté de 370 millions cette année ! Reste toujours un manque à gagner de 170 millions, et ce alors même que, d'après un article des Échos du 9 octobre, il faudrait actuellement à I'ANRU un milliard pour boucler les programmes en cours, sans parler de ceux en préparation. Je veux témoigner ici de l'inquiétude de nombreux maires qui ont dépensé beaucoup d'énergie et placé beaucoup d'espoir dans ces projets déterminants pour l'avenir de leurs villes et de leurs populations.
Le pillage du 1 % ne pourra rien face à ce constat. La situation est d'autant plus préoccupante que le plan de requalification des quartiers anciens dégradés, censé donner un nouveau rythme et une nouvelle dimension au programme de rénovation, n'est pas financé.
Au final, c'est l'ensemble du plan de relance qui manque de moyens et d'ambition. Sa faiblesse condamne toutes vos belles déclarations de principe et confirme l'inutilité de l'examen de ce projet de loi par notre assemblée. En réalité, 100 000 constructions supplémentaires en deux ans, dont seulement 30 000 PLUS et PLAI, ne résoudront nullement la crise que nous traversons, alors qu'il manque actuellement en France 900 000 logements économiquement accessibles. Je tenais tout de même à saluer le choix du Président de la République de doubler le prêt à taux zéro ; c'était l'objet d'un amendement des sénateurs communistes que vous aviez rejeté, madame la ministre, arguant de son coût trop élevé.
Je ne m'attarderai pas plus longuement sur le plan de relance, mais force est de constater que ces deux textes sont intrinsèquement liés et procèdent de la même démarche. Nous pouvons regretter qu'à l'heure où le Gouvernement vient de débloquer 13 milliards sur les 40 offerts aux banques, l'investissement réel de l'État en faveur du logement dans ce contexte exceptionnel se limite à 1,4 milliard.
J'en reviens au présent projet de loi, en souhaitant tout d'abord mettre l'accent sur son autoritarisme. Alors que l'État se désengage massivement et prélève davantage sur le logement qu'il ne distribue, votre projet MOLLE vise à concentrer le pouvoir dans les mains de l'exécutif, puisque vous placez sous votre tutelle les organismes bailleurs – c'est l'article 1er, avec le conventionnement obligatoire –, le 1 % – à l'article 3 – et les collectivités territoriales.
Qui plus est, la plupart des articles du projet renvoient à des décrets en Conseil d'État.