Nous proposons la suppression de cet article parce qu'il modifie la loi CESEDA sur l'entrée et le séjour des étrangers et des demandeurs d'asile, et qu'il complique encore la situation des conjoints de Français. En effet, vous les obligez à apprendre le français dans leur pays d'origine alors même qu'ils pourraient le faire dans le pays d'accueil auprès de leur conjoint. C'est une barrière supplémentaire que vous êtes en train d'imposer. Cela montre bien, une fois de plus, l'esprit de ce texte, qui vise à créer des ségrégations entre les demandeurs de regroupement familial. Votre dispositif créera une situation pratiquement inextricable pour les conjoints de Français. Il était pourtant compréhensible qu'ils apprennent le français auprès de celui ou celle avec qui ils ont choisi de faire leur vie, sur le territoire où il vit, c'est-à-dire la France. Et nous savons que c'est sur le territoire français, là où vivent les Français, que l'on apprend le mieux notre langue et les valeurs que nous partageons.
Par ailleurs, la formation proposée est totalement inutile. Aucune précision n'est apportée quant aux modalités du contrôle : quelle autorité procédera à l'évaluation ? Quels sont les critères qui détermineront l'obligation pour l'étranger de se soumettre à cette formation ? La grille d'évaluation sera-t-elle la même pour tous ?
Votre projet de loi prévoit également l'abrogation de la disposition qui permet au conjoint de Français entré régulièrement en France et pouvant se prévaloir d'une vie commune d'au moins six mois de présenter sa demande de visa long séjour auprès des services préfectoraux, donc sans devoir repartir dans son pays d'origine. La suppression de cette dérogation figurait déjà dans la première version de votre projet de loi, en 2006. Cela signifie que le ressortissant étranger devenu conjoint de Français sera privé de toute possibilité de régulariser sa situation administrative sur place. À l'époque, au cours des débats parlementaires, auxquels nous sommes ici un certain nombre à avoir participé, cette possibilité d'obtenir un visa en France était censée atténuer la rigueur du dispositif, notamment dans les cas humanitaires.
Je rappelle, comme l'a ditJean-Pierre Brard il y a quelques instants, que le droit de mener une vie familiale normale est un principe général du droit et une exigence de l'article 8 de la CEDH, exigence qui semble difficilement compatible avec les barrières et les conditions que vous posez dans cet article 4 à l'encontre du regroupement familial, en particulier s'agissant des conjoints de Français.